Les voyages du pape ne s’expliquent pas toujours. Même quand ils peuvent l’être, ils ne sont pas, parfois, convaincants et encore moins, souvent, approuvés. C’est le cas du voyage annoncé, à Brazzaville et Pointe-Noire, du pape François, en 2023. Une catastrophe pour le monde catholique africain. Un voyage périlleux qui embarrasse au plus haut point les chrétiens congolais et même une partie du Vatican. Pourquoi ? Parce que le président, Denis Sassou-Nguesso, qui invite, ainsi, malicieusement, le pape, est accusé d’avoir assassiné le cardinal congolais, Emile Biayenda, le tout premier cardinal de l’Afrique centrale, qu’il aurait même, selon certains témoignages, fait enterrer vivant. Cette histoire a toujours scandalisé les chrétiens congolais, et hanté les couloirs de l’épiscopat congolais, mais pas que. Quant aux chefs d’Etat congolais, quand il ne les a pas fait assassiner (cas des présidents Marien Ngouabi et Alphonse Massamba Débat), il les a, carrément, chassés par un coup d’état militaire (cas du professeur Pascal Lissouba, président démocratiquement élu, contraint de fuir le pays en 1997). Depuis cette date, Sassou s’est installé à la tête du pays, changeant la constitution en 2016, au terme de ses deux mandats de 7 ans. Il compte, maintenant, mourir au pouvoir, afin d’échapper à la colère du peuple. Les observateurs les plus neutres lui attribuent l’assassinat de plus de 40.000 Congolais. Pas moins. Cela fait de lui le champion toutes catégories des chefs d’Etat africains qui oppriment et assassinent leur peuple. Bref, il y aurait beaucoup trop à dire et que le pape ne sait déjà. Il en est conscient le pape François. Mais que sa conscience le juge pour cet acte anti-congolais (anti-humain) qu’il va accomplir contre l’avis des Congolais. En choisissant de venir (sans conditions) rehausser l’image de marque d’un serial-killer, il prend ses responsabilités devant Dieu qu’il dit servir. Un voyage à ses fins personnelles qui, plus est, videra les caisses publiques congolaises déjà bien vides. Un opposant congolais lui adresse un courrier virulent mais censé que nous avons choisi de publier car les Congolais, généralement, silencieux parce que dominés par la peur de l’ogre de Brazzaville, n’en pensent pas moins.
« Très cher Saint Père,
Nous savons que vous êtes maintenant en train de préparer avec beaucoup de soin votre prochain voyage pour une visite officielle au Congo Brazzaville, à l’occasion du 140e anniversaire de l’installation de la première mission catholique dans ce pays et du 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques de cet Etat avec le Vatican, qui se tiendra dans le courant de l’année 2023 et à laquelle, si Dieu le veut, vous irez volontiers conclure ces festivités.
Très cher Saint Père, vous êtes d’ores et déjà consacré pour le peuple meurtri du Congo, qui attend votre arrivée pour accéder à une liberté qui donne de la joie, qui nourrit l’espoir et prépare l’avenir car depuis l’assassinat odieux du cardinal Emile Biayenda, le 22 mars 1977 (quatre jours seulement après l’assassinat crapuleux du président Marien Ngouabi, le 18 mars 1977, et trois jours avant l’assassinat tout aussi crapuleux de son prédécesseur, le président Alphonse Massamba-Débat, le 25 mars 1977. Le corps de ce dernier n’a jamais été retrouvé), il n’est plus d’endroit sur cette Terre du Congo qui ne soit souillé de sang humain tant celui qui la gouverne depuis ce mois sombre de mars 1977 aime le goût du sang.
Très cher Saint Père,
Plus de 45 ans semblent s’être écoulés depuis ces assassinats. Le peuple meurtri du Congo attend de vous que vous puissiez aider celui qui gouverne cette Terre du Congo depuis ces assassinats odieux à être une « antenne réceptive prête à saisir les germes de nouveauté suscités par l’Esprit Saint », et que vous puissiez l’aider à prendre ce regard de bonté et à trouver des moyens nouveaux et courageux pour changer enfin son « cœur de cobra » en un « Cœur Humain ».
Très cher Saint Père,
Le peuple meurtri du Congo, Peuple de Dieu, vous prie de confier, de manière spéciale, cette Terre du Congo souillé de sang humain à la Vierge.
Plus de 45 ans après l’assassinat du cardinal Emile Biayenda, votre venue sur cette Terre du Congo souillé de sang humain se veut être un geste de l’église universelle qui, porte à Dieu, par sa Mère et notre Mère, le cri de douleur de ce peuple meurtri qui souffre en silence depuis toutes ces années et implore la fin de la violence, et qui confie l’avenir de cette Terre du Congo souillé de sang humain à la Reine de la Paix.
Le peuple meurtri du Congo, Peuple de Dieu, veut la Paix, non pas une paix des simples slogans mais une Paix sacrée, et puisqu’il convient de se disposer à invoquer la Paix sacrée en étant renouvelé par le pardon de Dieu, cela doit commencer par la libération immédiate et sans condition de tous les prisonniers politiques et détenus d’opinion.
Très cher Saint Père,
Le peuple meurtri du Congo, Peuple de Dieu, vous prie d’accueillir cette demande de la libération des prisonniers politiques et détenus d’opinion comme un préalable à votre venue à Brazzaville.
Pour cela, nous vous remercions de tout coeur, en vous demandant de prier pour nous.
Fraternellement,
Le 15 décembre 2022
Bienvenu MABILEMONO
Chair, CLC ».