Le nouveau président du Brésil, Lula da Silva, vient d’effectuer une visite officielle en Chine. Lors d’un discours prononcé le 3 avril, à l’occasion de la cérémonie d’investiture de Dilma Roussef, ancienne présidente du Brésil, à la tête de la Nouvelle banque de développement (NBD), la banque des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) dont le siège est à Shangaï, il a dit tout le bien qu’il pensait du multilatéralisme dans les relations internationales.
« Chaque soir, je me demande pourquoi tous les pays sont obligés de réaliser leurs échanges commerciaux en dollars. Pourquoi ne pouvons-nous pas utiliser notre propre monnaie ? Pourquoi ne pas innover ? Qui a décidé que la monnaie serait le dollar, après la disparition de l’étalon-or ? », s’est interrogé le nouveau président du Brésil, à cette occasion.
Le dollar n’était pas seul dans son viseur, mais aussi, la Banque mondiale et, surtout, le Fonds monétaire international (FMI), qui sont accusés d’opérer une nouvelle forme de colonisation dans les pays du tiers-monde, et notamment, de l’Afrique. Depuis que les pays africains, par exemple, appliquent des programmes sous la surveillance des institutions de Bretton Woods, aucun d’entre ne s’en est sorti. C’est comme si le but de ces programmes était de les maintenir dans le système de liberté économique hyper surveillée, le contrôle des institutions de Bretton Woods étant exercé par les pays du G7 dont les Etats-Unis sont le pays dominant avec son dollar. D’ailleurs, n’est-il pas admis que le patron du FMI est généralement un ressortissant européen tandis que celui de la Banque mondiale est toujours américain ? Les rôles sont donc partagés et c’est à cette domination que les pays du BRICS entendent mettre un terme. C’est donc avec raison que le président brésilien a affirmé que la banque des BRICS pouvait, devait devenir la « grande banque du Sud global » capable de libérer les pays émergents « de la soumission aux institutions financières traditionnelles, qui veulent nous gouverner ». Personne ne le contestera en Afrique et même dans le tiers-monde.
« Nos intérêts dans la relation avec la Chine ne sont pas que commerciaux », mais (ils aident) à contribuer à « équilibrer la géopolitique mondiale », pense tout haut le président brésilien. Plus d’une oreille a dû siffler à Washington et dans les cénacles atlantistes. D’autant que Lula a réinsisté, au cours de sa visite, sur la nécessité de trouver une solution négociée au conflit ukrainien. « Les Etats-Unis doivent cesser d’encourager la guerre et parler de paix, l’Union européenne doit commencer à parler de paix », a-t-il déclaré.
Echapper à l’hégémonie du dollar et aux grandes institutions financières internationales issues de la conférence de Bretton Woods, redonner toute sa place aux Nations-Unies afin de « construire une nouvelle géopolitique pour changer la gouvernance mondiale », Lula annonce clairement la couleur. Vivement qu’il programme une tournée en Afrique !
Si certains nostalgiques du monde occidental ne sont pas convaincus de la solution de rechange que proposent les BRICS car ils ne seraient que cinq pays (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), qu’ils sachent que l’Argentine (actuellement malmenée par le FMI) est candidate à son adhésion, tout comme des pays au non-alignement affiché comme l’Algérie, l’Iran et beaucoup d’autres.
Les BRICS au nombre de cinq, disposent d’un poids économique plus important que le G7, les 7 pays les plus industrialisés de la planète, selon des données fournies récemment par Acorn Macro Consulting, un institut de recherche britannique.
Après le lancement de la banque des BRICS, on assistera à la création d’une monnaie des BRICS pour assurer les transactions des pays membres en lieu et place du dollar et de l’euro. Ce sera dans un deuxième temps, qui n’est pas si lointain.