Toujours droit dans ses bottes, le ministre malien des Affaires étrangères du Mali, Abdoulaye Diop, reste une valeur sûre du pouvoir du colonel-président, Assimi Goïta. Son action, du reste, saluée par les diasporas africaines, irrite, souvent certaines crinières, au sein des espaces onusiens. Surtout quand il dit la vérité (qui blesse) et qu’on n’aime pas entendre.
Dans la semaine du 7 août, avec sa collègue du Burkina Faso, Olivia Ragnaghnewendé Rouamba, venue à Bamako consolider les relations économiques, politiques, culturelles et sociales entre les deux pays, Abdoulaye Diop a fait une action préventive, en co-signant avec elle, à l’attention des Nations-Unies et du Conseil de sécurité, une lettre pour expliquer la situation réelle, qui prévaut au Niger et qui nécessite la mise en place d’un cadre de dialogue et de concertation, et non une intervention militaire dont les peuples du Niger, ni ceux de la sous-région, ne souhaitent nullement. Lors de sa conférence de presse de la semaine dernière, à Bamako, le dynamique ministre, Abdoulaye Diop, a mis l’accent sur le principe de la réciprocité que devraient cultiver ses homologues de l’Afrique pour savoir se faire respecter. Voici quelques-uns de ses propos choisis en vrac pendant cette longue conférence de presse :
« Renvoie mon ambassadeur, je renvoie ton ambassadeur. C’est le seul code pour se comprendre. Car quelqu’un marche sur ton pied, toi, tu cries et tu ne fais rien, il va revenir marcher sur ton pied encore. C’est pourquoi nous, on a décidé de faire la même chose. Même pour les problèmes de visas, c’est la même réciprocité. Imaginez que vous êtes dans un pays, vous découvrez sur les réseaux sociaux que le consulat de France annonce que, pour des considérations géopolitiques et de tension dans la région, on ne donne plus de visas aux Maliens. D’ailleurs, tous nos consulats sont fermés. Mais vous êtes là, vous avez une ambassade, vous devez écrire une note officielle. Mais c’est hier que j’ai vu la note de l’ambassade de France. Vous écrivez pour dire que dans trois ou quatre jours, nous allons fermer pour telle ou telle raison. Mais c’est inadmissible qu’on découvre une telle décision dans les réseaux sociaux. Même si nous avons plus de gens qui partent, ce n’est pas plus important. De toutes les façons, ils ont posé un acte pour dire qu’ils ne nous donnent plus les visas. Nous aussi, nous fermons notre consulat pour dire qu’on ne leur donne plus les visas. C’est une question de respect (applaudissements dans la salle). Parce que s’il n’y a pas la réciprocité, cela veut dire que tu admets que lui vaut mieux que toi. La dignité et le respect, ça se mérite mais il y a une certaine douleur à assumer dedans, c’est vrai. S’ils pensent qu’ils n’ont pas besoin de nous, ils se trompent et on les laisse se tromper. Nous, on sait qu’ils ont (beaucoup) besoin de nous. S’ils sont là, ce n’est pas pour nos beaux yeux. Ils savent qu’ils sont là pour leurs intérêts. Ils ont quelque chose à gagner sinon ils ne seraient pas là. C’est une erreur de croire que nous, on ne vaut rien et c’est eux qui nous apportent quelque chose. C’est du donnant-donnant. C’est pourquoi je considère que la réciprocité est une donnée importante pour notre souveraineté.
C’est la même chose pour la compagnie Air France. On se lève un beau matin pour décider, unilatéralement, qu’on suspend les vols alors que nous avons des conventions qui régissent ce partenariat. Il y a des gens qui quittent les Etats-Unis, ils sont dans l’avion et au moment d’arriver à Paris, ils trouvent que tous les vols sont annulés. La compagnie se lève et ferme tout parce qu’elle dit qu’il y a des problèmes avec le Mali, alors qu’il n’y a aucun problème en réalité. Si c’est pour sanctionner le Mali parce que le Mali a supporté le Niger, tant pis pour eux, on supporte le Niger et on le fera (applaudissements dans la salle). Ca ne nous dissuadera nullement. Là aussi, nous avons mis la réciprocité. Nous avons appelé Air France pour lui dire que maintenant que vous dites que vous allez reprendre vos vols le 11 août, eh bien, vous ne reprenez pas le 11 août (applaudissements dans la salle) ».
En effet, à 24 heures de la reprise des vols d’Air France sur Bamako, soit, le 10 août 2023, le directeur général de l’Agence nationale de l’aviation civile du Mali, le colonel, Drissa Koné, dans une correspondance en date du 10 août 2023, a notifié au délégué d’Air France pour le Mali, une décision d’annulation de l’autorisation d’exploitation de vols d’Air France du programme « Saison Eté 2023 approuvé lors du Comité d’attribution des Créneaux Horaires (COHOR).
Dans sa correspondance, le directeur général de l’Agence nationale de l’aviation civile du Mali, a, clairement, indiqué qu’il accusait réception de la correspondance d’Air France l’informant de la suspension de la desserte de Bamako à compter du 07 août au 11 août 2023 inclus. « Evoquant des raisons liées à la géopolitique dans la région du Sahel et des contraintes de sécurité de vos clients et de vos équipages, vous aviez décidé d’annuler vos vols sans notification préalable aux autorités maliennes tout en provoquant un désagrément aux passagers », a-t-il accusé.
Avant de rappeler que cela « constitue un manquement notoire vis-à-vis de l’Autorité de l’aviation civile conformément aux dispositions des autorisations d’exploitation de vols délivrées aux compagnies aériennes en début de chaque saison IATA qui indiquent clairement de notifier toute modification au moins soixante-douze (72) heures avant l’opération». Par conséquent, le colonel, Drissa Koné, a informé Air France que ce manquement entraîne l’annulation de son autorisation d’exploitation de vols du programme « Saison Eté 2023 approuvé lors du comité d’attribution des Créneaux Horaires (COHOR). Pire, il a indiqué que : «votre créneau pourrait être accordé à une autre compagnie qui le solliciterait».
Par ailleurs, le directeur général de l’Agence nationale de l’aviation civile du Mali, a invité Air France à lui soumettre son programme, à nouveau, « avant la reprise des activités pour la desserte de Bamako, conformément, aux dispositions de l’article 19 de l’Accord entre la République du Mali et la République française relatif au transport aérien, signé le 05 août 1961 à Paris ».
Conclusion : Il s’agit bel et bien, ici, du principe de réciprocité, qui est appliqué à Air France. Ni plus ni moins. Pour le colonel, Drissa Koné, cette décision est la conséquence de l’attitude d’Air France « d’annuler ses vols sans notification préalable aux autorités maliennes tout en provoquant un désagrément aux passagers ».
L’annonce de cette nouvelle de l’annulation de l’autorisation d’exploitation des vols d’Air France du programme «Saison été 2023», a provoqué une grande inquiétude chez des milliers de clients de la compagnie. Mais, gageons qu’Air France, à l’avenir, ne procédera plus jamais (jamais) de la sorte avec les autorités maliennes sinon, elle connaît la foudre qui s’abattra sur ses appareils.