En mettant en garde, dans sa circulaire du 6 mars 2024, les compagnies d’assurance, qui se rendent coupables de sous-tarification des primes automobiles, le ministre camerounais des Finances, Louis Paul Motaze, a tenté, une nouvelle fois, de créer un électrochoc chez les acteurs de ce secteur clé de l’économie nationale. Car, cette pratique, qui ne date pas d’hier, est devenue comme une seconde nature lorsqu’il s’agit de commercialiser des produits d’assurance auto.
Le fait qu’elle ait perduré jusqu’à maintenant, malgré les nombreux rappels à l’ordre du gendarme des finances publiques, ainsi que, d’autres organes de contrôle, comme l’Association des sociétés d’assurance du Cameroun (ASAC), dénote, à la fois, d’un laxisme des autorités pour faire face à ce problème, mais aussi, d’une volonté de leur part de ne pas freiner les efforts de développement, particulièrement, poussifs, de cette industrie.
D’après Thierry Kepeden, le président de l’ASAC, 40 à 45% des voitures en circulation sur le territoire camerounais ne disposent pas de couverture. Cette donnée aberrante constitue un défi pour les différentes parties impliquées, à savoir, le gouvernement, les sociétés d’assurance, et les sinistrés. En effet, la non-perception des primes d’assurance de ces véhicules représente un manque à gagner considérable pour les assureurs, et pour l’Etat, en termes de recettes fiscales.
En cas de sinistre causé par ces automobilistes, se pose le problème de l’indemnisation des victimes, lesquelles finissent, parfois, par être livrées à elles-mêmes, étant donné que la responsabilité de l’accident n’est imputable à aucun assureur. Ce sont ces trois conséquences indésirables, qui incitent le désir de l’Etat de sensibiliser, une énième fois, sur la problématique des primes d’assurance sous-évaluées.
Si toutes les sociétés d’assurance, ainsi que, leurs intermédiaires, venaient à appliquer la directive de leur ministre de tutelle, les primes automobiles enregistreraient leur deuxième hausse en moins de deux ans, la première étant survenue suite à la décision des pouvoirs publics d’augmenter le coût de la vignette automobile de 33% à 100%, en fonction de la puissance fiscale du véhicule, dans le cadre de la Loi de Finances 2023.
Ce changement réglementaire avait généré une manne financière si importante pour les caisses du Trésor public du Cameroun, que la sous-tarification des polices d’assurance automobile avait été reléguée au second plan. Aujourd’hui, au-delà de la sensibilisation, on voit mal comment l’Etat pourrait s’aventurer à sanctionner les assureurs, qui résisteraient à son interpellation, sans s’attirer les foudres des populations camerounaises, déjà, largement éprouvées financièrement car ponctionnées par ailleurs.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)