La corruption est un fléau endémique au Congo-Brazzaville. Vulgarisée depuis le haut sommet de l’Etat, elle est omniprésente dans le système de gouvernance du pays. Si bien que lorsque le président congolais, Denis Sassou-Nguesso, annonce, du jour au lendemain, vouloir s’y attaquer, personne ne le prend au sérieux, puisqu’il serait le premier à tomber, et servirait de cas d’école.
Après avoir publiquement mis en garde les détourneurs de deniers publics, le chef de l’Etat a surpris ses concitoyens en intervenant pour la remise en liberté provisoire de Ludovic Itoua. Accusé pour des faits de malversation financière estimée à 3 milliards de F CFA (4,5 millions d’euros), l’actuel directeur général des impôts n’aura eu qu’à débourser 18 pauvres millions de F CFA pour mettre fin à sa détention.
Cette situation intervient alors que les autorités fédérales américaines cherchent, activement, à saisir un appartement de luxe appartenant à la fille du dictateur de Brazzaville. Celui-ci est situé dans la Trump Tower de New York, d’une valeur de 7.1 millions de dollars (4.3 milliards de F CFA). Une propriété de Claudia Lemboumba-Lepandou née Sassou-Nguesso. Acquis en 2014, ce logement n’a jamais été occupé (la propriétaire vivant entre Brazzaville et Libreville) et aurait été financé avec des fonds publics. Bien sûr !
Si l’on ne se limite qu’à ces deux événements très récents, qui ne représentent qu’une goutte d’eau parmi les innombrables affaires de corruption du Congo-Brazzaville, on peut s’interroger sur le rôle de la Haute autorité de lutte contre la corruption (HALC) qui, en 4 années d’existence, n’a encore produit aucun rapport d’activités.
En réalité, la HALC sert de trompe-l’oeil au régime en place dans sa lutte contre la corruption. En effet, soucieux de son image à l’international, plus précisément de ce qu’il en reste (pas grand-chose quand même), Denis Sassou Nguesso veut donner l’impression d’un changement de gouvernance dans son pays. Cocorico !
Si la HALC, qui bénéficie des moyens considérables de l’Etat, était indépendante, plusieurs grosses têtes du parti présidentiel seraient, déjà, en prison. Au moins, les trois quarts des collaborateurs du dictateur seraient en taule et la quasi-totalité du clan d’Oyo auquel appartient sa propre famille, ne respirerait plus l’air libre de Brazzaville. Mais, Sassou qui a pris le Congo-Brazzaville en otage, fait ce qu’il veut, quand il veut, comme il veut, sans avoir à y répondre. Voilà pourquoi on ne voit pas très bien ce que les Américains venus de la lointaine Américaine pourraient y faire, les Congolais sur place au Congo étant, totalement, dépassés.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)