Le dictateur tunisien a encore frappé. Cette fois-ci, c’est à Afrique Education qu’il s’en est pris en censurant le numéro 535-536 d’août-septembre 2024. Ce numéro a été interdit de vente sur l’ensemble du territoire. Nous venons seulement d’être alertés, le distributeur local ayant gardé le silence (par peur du régime ?). Il a dû attendre le numéro 537 d’octobre au travers du nouveau numéro qui chasse l’ancien, pour annoncer cette « bonne » nouvelle au distributeur qui l’a répercuté à la direction de la revue.
Selon les informations glanées auprès de notre distributeur, l’élection présidentielle à laquelle se présentait le dictateur suprême, notre collègue universitaire, Kaïs Saied, était candidat, n’a pas aidé. D’autant plus que le titre en bas de couverture annonçait la couleur : « Présidentielle en Tunisie : Kaïs Saied (le pion d’Ursula von der Leyen) candidat à sa propre succession ». Un titre jugé « insolent » par le Palais de Carthage. Quand on pense que le président est un professeur émérite de droit constitutionnel et qu’il a passé l’essentiel de sa vie à enseigner les principes de démocratie et de liberté à ses étudiants, on n’en revient pas. Le pouvoir corrompt-il autant ? Jusqu’où peut aller la volonté de puissance et de domination d’un homme qui de surcroît maîtrise le droit du bout des doigts ?
Le dictateur vient de s’octroyer 90,7% des voix (pas moins), ses deux adversaires, Ayachi Zammel et Zouhair Maghzaoui, ayant eu respectivement 7,35% et 1,97% selon l’ISIE.
Nous aurions pu mettre à nouveau le vainqueur en bas de couverture du numéro 537 d’octobre si les résultats n’étaient pas sortis tard. Le titre aurait été moqueur et le dictateur nous aurait, peut-être, à nouveau, censuré.
Notre revue a l’habitude d’être malmenée en Tunisie. Pendant le régime de Ben Ali, elle n’avait jamais (jamais) obtenu une autorisation pour être vendue en Tunisie. Malgré les multiples démarches du distributeur local que je rencontrais, personnellement, régulièrement, pendant les Journées Presse organisées, chaque année, par les NMPP (Nouvelles messageries de la presse parisienne). Nous pensions respirer avec l’arrivée du président constitutionnaliste. C’est raté car lui est plus méchant : il n’interdit pas l’entrée de la revue dans le pays, mais, il ne la laisse pas se vendre. Une pure perte ! C’est vraiment mesquin Cher Collègue Professeur-Président.
Le bas de couverture du numéro 537 d’octobre 2024, actuellement, chez les marchands de journaux, est partagé par le président algérien, Abdelmadjid Tebboune et Kaïs Saied à nouveau avec un titre neutre « Commerce au Maghreb : Rapprochement entre la Tunisie et l’Algérie – Eloignement du Maroc ». Est-il censuré au moment où j’écris ces lignes ? Je l’ignore. Si tel est le cas, je vous tiendrai informés dès que possible.
Professeur Paul TEDGA
Docteur de l’Université de Paris 9 Dauphine (1988)
Auteur de sept ouvrages
Fondateur en France de la revue Afrique Education (1993)