CRISE ENTRE LA FRANCE ET L’ALGERIE : Alger prêt au bras de fer avec Paris et à la riposte

Date

Alors que le gouvernement français a donné six semaines à Alger pour réexaminer «la totalité des accords» (top chrono), Alger répond ne pas être dans l’intimidation et prêt à répondre du tac au tac dès lors que les conventions signées entre les deux pays ne seront plus respectées. Le rapport de force est d’ores et déjà établi entre les deux pays où personne n’entend perdre la face. A Alger, on affirme que la provocation vient de la France et non de l’Algérie.

L’éclaircie que laissaient entrevoir la visite de Nicolas Lerner, patron des renseignements français, à Alger, et les appels au dialogue lancés par le président, Abdelmadjid Tebboune, dans la presse française, ont fait long feu. A peine un mois et on a tout oublié et la petite guerre a repris de plus belle. A Paris, c’est le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, le poil à gratter du gouvernement Bayrou, qui a allumé le feu, suite à l’attaque au couteau de Mulhouse par un Algérien en situation irrégulière. Mais, il ne faut pas avoir la mémoire courte : l’énervement des autorités algériennes trouve, sans doute, son explication dans le choix d’Emmanuel Macron de soutenir le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental en juillet 2024. Une décision que Tebboune (sur notre photo, dans les bras d’Emmanuel Macron en août 2022 à Alger) qui envisageait un voyage en France a considéré comme étant un coup de poignard dans le dos de l’Algérie. Depuis, la mésentente est totale et non moins cordiale.

Deuxième provocation ou erreur (c’est selon) pour Alger : l’ultimatum de six semaines donné au gouvernement algérien pour réexaminer « la totalité des accords » entre les deux pays. Inacceptable, répond-on à Alger qui est « près au rapport de force ». On se demande si François Bayrou, certainement pressé par les ultras de son gouvernement dont certains membres ne cachent pas leur sympathie à l’endroit du Rassemblement national, a pris suffisamment du recul avant de lancer un ultimatum à …l’Algérie dont le caractère coriace et retors est connu de tous.

Le 27 décembre 2025, sortie du CICI (Comité interministériel de contrôle de l’immigration) où visiblement, Jean-Noël Barrot a du mal à trouver toute sa place.

Exprimé, mercredi, 26 février, sa surprise et son étonnement face à des mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire français prises par le gouvernement français à l’encontre de ressortissants algériens titulaires de documents de voyage spéciaux les exemptant de formalités de visas, le ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines a dénoncé dans un communiqué : « Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères a fait état de mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire français prises à l’encontre de ressortissants algériens titulaires de documents de voyage spéciaux les exemptant de formalités de visas. Le gouvernement algérien exprime sa surprise et son étonnement quant à cette annonce dont il n’a été aucunement informé comme le commandent les dispositions de l’article 8 de l’accord algéro-français en matière d’exemption réciproque de visas pour les détenteurs de passeports diplomatiques ou de service ». Le ministère algérien précise, en outre, que « les autorités algériennes n’ont aucune connaissance de pareilles mesures restrictives à l’exception de deux cas précis intervenus sur la période récente ».

Et d’entrer dans les détails : « Le premier cas, sur demande d’explications algérienne, a fait l’objet d’expression de regrets de la part des autorités françaises et a été qualifié d’incident malheureux dû à une rupture dans la chaîne de commandement. Le deuxième cas intervenu très récemment fait l’objet actuellement d’une même demande d’explications adressée aux autorités françaises », souligne le texte du ministère. Et de renchérir en précisant que l’annonce de ces mesures dont l’Etat algérien « n’a pas été informé s’inscrit dans la longue liste des provocations, des intimidations et des menaces dirigées contre l’Algérie. Celles-ci sont de nul effet sur notre pays qui n’y cèdera pas. Toute mesure attentatoire à ses intérêts fera l’objet de mesures réciproques, strictes et immédiates ».
Et de conclure que « L’Algérie est manifestement devenue l’enjeu de querelles politiques intra-françaises où tous les coups bas politiciens sont permis dans le cadre d’une compétition, dont l’extrême droite est l’instigateur, le référent et le donneur d’ordres », avant d’ajouter que « Cette dynamique qui entraîne dans son sillage, non seulement, des forces politiques françaises, mais également, des membres du gouvernement français, peut avoir des conséquences incalculables sur la relation algéro-française dans toutes ses dimensions ».

Le chef de la diplomatie française, Jean Yves Le Drian, le 21 janvier 2020, chez le président Abdelmadjid Tebboune. Les relations entre les deux pays étaient bonnes. Aujourd’hui, elles ne le sont plus. A qui le faute ?

Invité sur FranceInfo TV, ce matin, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, s’est refusé à toute dramatisation de la situation qui est, déjà, extrêmement grave. Très proche d’Emmanuel Macron, il semble ne pas apprécier la tournure donnée à cette question de visas par le gouvernement Bayrou. Il a affirmé que les relations avec l’Algérie dont il a la gestion en tant que ministre des Armées seront préservées, notamment, dans le domaine du renseignement et de la coopération contre le terrorisme. De quoi donner un peu de courage au patron du Quai d’Orsay, Jean Noël Barrot, qui semble flotter dans le rapport de force au sein du gouvernement où ses collègues de l’Intérieur et de la Justice semblent entraîner François Bayrou dans une posture que, lui, le centriste n’a pas habitué l’opinion publique.

Envie d’accéder aux contenus réservés aux abonnés ?

More
articles

×
×

Panier