Le procès de l’ex-chef des Jeunes patriotes ivoiriens, Charles Blé Goudé, qui devait s’ouvrir, mercredi, 18 décembre, a été reporté, un pourvoi en cassation ayant été déposé, selon son avocat, Maître Suy Bi Gohoré. C’est le président, Alassane Ouattara, qui est derrière cette manœuvre alors qu’il a transféré Blé Goudé à la CPI (Cour pénale internationale) où il avait été élargi de ses charges, au grand étonnement du pouvoir ivoirien, même s’il n’a pas encore recouvré sa totale liberté. Est-ce par peur de le revoir revenir en Côte d’Ivoire où, forcément, il constituerait une menace certaine pour le pouvoir que le président Ouattara, décide de le poursuivre à nouveau ? Après avoir raté la réconciliation des Ivoiriens, Alassane Ouattara semble vouloir recourir à un troisième mandat, qui, pense-t-il, le mettrait à l’abri de certains désagréments. Il craint la loi du Talion : « Oeil pour œil, dent pour dent ». Mais de là à s’en prendre à Charles Blé Goudé, il n’y a qu’un pas qu’il a franchi, se fichant des qu’en dira-t-on. Même la procureure de la CPI, Fatou Ben Souda, qui cherche à garder Blé Goudé en prison à La Haye, doit se demander les raisons pour lesquelles « son client » est, au même moment, poursuivi par les tribunaux ivoiriens ? La Côte d’Ivoire n’est plus un Etat de droit. La Côte d’Ivoire devient une dictature. C’est comme si Alassane Ouattara avait perdu le nord (c’est-à-dire le sens de toute mesure).
Le président du tribunal criminel d’Abidjan a décidé de «retirer l’affaire du rôle» dans l’attente de l’examen du pourvoi par la Cour de cassation, qui pourrait prendre plusieurs mois, a expliqué l’avocat. Charles Blé Goudé est accusé par la justice ivoirienne d’«actes de torture, homicides volontaires et viol», selon ses avocats, qui dénoncent une «violation flagrante» de ses droits. En effet, Blé Goudé, acquitté en première instance par la CPI de crimes contre l’humanité, est en liberté conditionnelle aux Pays-Bas, dans l’attente de l’examen de l’appel de la procureure. Il ne peut pas rentrer en Côte d’Ivoire tant que la procédure n’est pas terminée.
L’audience qui était programmée mercredi constituait «une violation flagrante» du «droit élémentaire (de Blé Goudé) à un procès équitable, qui requiert la présence de l’accusé», avait expliqué, mardi, 17 décembre, Maître, Ndry Claver, un autre de ses avocats, lors d’une conférence de presse. Le pourvoi en cassation est fondé sur l’absence de Charles Blé Goudé et sur d’autres vices de forme dans la procédure, a indiqué Maître Suy Bi Gohoré. «Charles Blé Goudé n’est pas en fuite, il ne se soustrait pas à la justice ivoirienne. Il est à la CPI par l’action des autorités ivoiriennes», avait souligné Maître Ndry Claver. Charles Blé Goudé avait été transféré à la CPI en 2014 par Alassane Ouattara. Son parti, le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples, a dénoncé un «harcèlement politique contre son président». L’ancien «général de la rue» (notre photo), ainsi, surnommé pour sa capacité à mobiliser les partisans de l’ex-président ivoirien, Laurent Gbagbo, a annoncé avoir des ambitions présidentielles à long terme, après la prochaine élection d’octobre 2020.
Après avoir lamentablement échoué à réconcilier les Ivoiriens, un échec marqué par le départ du PDCI d’Henri Konan Bédié du RHDP, Alassane Ouattara ne sait plus sur quel pied danser. Désormais perçu comme un être humain, foncièrement, méchant et ingrat, il doit absolument se trouver un remplaçant de poids comparable au PDCI-RDA, ce qui n’est pas une mince affaire.