A quoi servent les embrassades des musulmans avec à la clé une récitation des sourates du Saint Coran, qui marquent l’amitié et la solidarité, si celles-ci restent de vaines pratiques sans effet réel ? Après un exil de trois ans entre Paris et Cotonou, l’ancien premier ministre du Niger, Hama Amadou, est rentré, à Niamey, pour s’incliner sur la tombe de sa mère, récemment, décédée. Sous le coup d’une peine d’emprisonnement qui reste huit mois à courir, il a été très bien accueilli par la direction de son parti politique ainsi que les militants de celui-ci. Les ministres du gouvernement sont, aussi, venus lui faire part de leurs condoléances dont le puissant ministre de l’Intérieur et futur candidat du PNDS, le parti au pouvoir, à la prochaine élection présidentielle, Mohamed Bazoum. Dimanche, 17 novembre, c’est la première dame du Niger, Malika Issoufou, en compagnie de l’épouse du premier ministre, qui s’est rendue au domicile de Hama Amadou pour lui présenter ses condoléances les plus attristées après le décès de sa mère. Alors que les deux épouses des deux plus hautes personnalités de l’exécutif s’entretenaient avec l’ancien premier ministre, le téléphone de la première dame a sonné. Au bout du fil, c’était son mari, le président de la République, qui a demandé à parler à son frère Hama à qui il tenait à faire part, lui aussi, de ses condoléances. Le vivre-ensemble à la nigérienne est en train de faire des merveilles. D’où la question de savoir si on ne se dirige pas, rapidement, vers une grâce présidentielle, une prérogative du président de la République, qui s’exerce de façon discrétionnaire ?
Il faut dire les choses telles qu’elles se présentent. A deux ans de l’élection présidentielle de 2021, Hama Amadou fait figure de favori. Si ce scrutin se tenait, aujourd’hui, il le gagnerait haut la main. A condition qu’il soit libre et transparent. Car c’est cela le problème au Niger : la fraude électorale qui profita, largement, à l’actuel président lors du dernier scrutin, en 2016, face, justement, à Hama Amadou. Les différents recours visant à faire valoir ses droits devant la justice n’avaient rien donné. Ayant décidé de respecter la constitution qui limite le nombre de mandats à deux, ce qui est à son honneur, l’absence de Mahamadou Issoufou, peut encourager de facto la tenue d’une élection présidentielle transparente.
Mais, avant de parler de cette élection qui aura lieu en 2021, l’urgence est dans le fait que ce lundi, 18 novembre, matin, Hama Amadou a été arrêté à son domicile avant d’être déféré à la prison de Fillingué, à 180 kilomètres, au Nord de Niamey. Il lui reste huit mois de prison à purger, après sa condamnation dans une affaire de trafic de bébé. Mais, au regard de la détente dont les deux parties font preuve (ils sont des frères et amis avant d’être d’affreux adversaires politiques), Hama Amadou ne va-t-il pas bénéficier de la grâce présidentielle de Mahamadou Issoufou ? (Sur notre photo Hama et Mahamadou, deux fervents croyants, partagent le même tapis de prière pour vénérer Allah le Très Miséricordieux).