Le 10 octobre 2019, au siège du PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire), Maurice Kakou Guikahué, secrétaire exécutif de ce parti, affirmait ceci : “Que la Commission électorale soit réformée ou non, le PDCI ira aux élections présidentielles de 2020 et les gagnera.”
Je ne suis pas contre la plate-forme de Konan Bédié ; j’ai applaudi quand celui-ci est allé rendre visite à Laurent Gbagbo, à Bruxelles, et je me réjouis qu’il réclame, ouvertement, son retour en Côte d’Ivoire, mais, certains comportements de son parti inquiètent, en tout cas, poussent à se poser des questions comme les suivantes : La révision de la commission n’est-elle plus une priorité ? Si cette commission non revue déclare, demain, le RHDP (Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix) vainqueur alors que celui-ci a perdu dans les urnes, que diront les militants et dirigeants du PDCI ? Et puis, à partir du moment où l’on a créé une plate-forme pour faire aboutir des revendications communes et permettre à tous les partis politiques de compétir à chances égales, peut-on prêcher, encore, pour sa chapelle ?
Neuf jours après la déclaration de Guikahué, le PDCI a organisé un meeting à Yamoussoukro (samedi, 19 octobre 2019). A ce meeting, auquel participaient le RACI (Rassemblement pour la Côte d’Ivoire) qui soutient la candidature de Soro, le COJEP (Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples) de Blé Goudé et le FPI (Front populaire ivoirien, tendance Laurent Gbagbo), il y avait, semble-t-il, un monde fou, tout comme il y avait foule à celui du Parc des sports de Treichville, le 14 septembre 2019. Ici, comme là-bas, on chanta, dansa, insulta et moqua le RHDP. C’est bien et beau, tout cela, mais, organiser des meetings, est-ce l’unique action que devraient mener des gens qui veulent mettre fin au calvaire des Ivoiriens ? Ensuite, qu’y a-t-il d’extraordinaire à mobiliser des dizaines de militants et de sympathisants alors qu’ailleurs (Alger, Port-au-Prince ou Conakry), ce sont des centaines de milliers de personnes qui sont, chaque jour, dans la rue pour protester contre l’injustice et l’arbitraire ? Cette plate-forme, qui semble se satisfaire de petits meetings, lutte-t-elle vraiment pour les Ivoiriens ? L’objectif de ceux qui en font partie, objectif qui ne sera jamais avoué, n’est-il pas de se servir, une fois de plus, du peuple pour revenir au pouvoir et pratiquer, à nouveau, leur sport favori : se remplir les poches, s’empiffrer, profiter, seuls, des fruits de la croissance, jouir de toutes sortes d’avantages, pendant que le petit peuple, pour lequel tout le monde prétend se battre, se débat et meurt dans une misère déshumanisante? Et jusques à quand le peuple va-t-il se laisser berner et instrumentaliser ?
Au lieu d’invoquer, constamment, le nom d’Houphouët, ceux qui se targuent d’être ses disciples et qui n’ont même pas été capables d’entretenir ce qu’il a construit, devraient mener les combats de leur temps comme Houphouët mena et gagna les batailles de son époque.
Jean-Claude DJEREKE
Professeur de littérature à l’Université de Temple (Etats-Unis).