Un style vif, des chapitres courts, pour relater trente ans de sa vie politique. Passions, qui sort, jeudi, 27 juin, et est tiré à 200 000 exemplaires, est à l’image de Nicolas Sarkozy. On y retrouve un ton percutant, qui ne s’embarrasse pas de périphrases, des anecdotes piquantes et drôles et in fine un témoignage très éclairant sur l’histoire intime et humaine de la droite au cours de ces dernières années.
Alors bien sûr, dans ce récit à la première personne, c’est forcément « sa » version des faits qui l’emporte, sa façon de ressentir l’Histoire et les histoires dont il fut témoin ou acteur. Mais Passions évite le côté pompeux ou compassé qui peut parfois caractériser ce genre de livre ou d’exercice. Il ne s’inscrit pas dans la catégorie des livres politiques dont on est abreuvé. Le ton y est libre et libéré, donc « ça balance ».
Il y a ses faiblesses qu’il confesse aisément (« je suis naturellement excessif »), son côté affectif (« les sentiments sont sans doute ce qu’il y a de plus important dans la vie »), son ambition et son obsession pour la politique et avant tout sa peur de l’ennui. Il y a aussi des coups de griffes : contre les juges et les journalistes.
Avec Chirac, une amitié qui tourne parfois à la haine.
Il y a du romanesque dans ce récit très personnel, à l’image de ses relations ambivalentes, dit-il, et paradoxales, avec Jacques Chirac, sorte de fil rouge qui hante par sa présence tout le livre. Une amitié quasiment filiale – et paternelle – qui tourne, parfois, à une forme de haine. Pour qui aime la politique, le récit des face-à-face avec Chirac est saisissant. Quand on le lit, on croit les entendre. On savoure les scènes avec Dominique de Villepin et cette fureur pendant l’affaire Clearstream lorsque Nicolas Sarkozy menace ceux qui auraient ourdi le complot de les « accrocher lui-même à des crocs de boucher »…
Il y a aussi ces révélations, quand Cécilia lui annonce sa volonté de divorcer l’après-midi même de sa confrontation de l’entre-deux-tours avec Ségolène Royal, ou encore, ses inquiétudes sur l’état de santé du président Chirac après son AVC.
Mais il y a encore mieux : les portraits plutôt saignants, écrits avec cet air de ne pas y toucher : de François Fillon « dissimulé », Dominique de Villepin « perché dans un monde virtuel » ou encore Ségolène Royal « capable d’affirmer quelque chose dont elle ne croit pas un mot ». Celui d’un Jacques Toubon découvrant sur le tard – très tard – sa passion pour les droits de l’homme. L’ancien chef de l’Etat termine son livre le 16 mai 2007, le jour de son entrée à l’Elysée. Il faudra donc attendre un éventuel tome 2 pour découvrir le récit du quinquennat… et de ses dessous. Notamment ses relations avec les dictateurs africains dont son ami devenu ennemi au point d’organiser son assassinat : le bouillant colonel libyen Mu’ammar al Kadhafi.
On y découvre, aussi, son respect pour l’actuel chef de l’Etat et son admiration pour Brigitte Macron. De l’opportunisme sans doute !
Et si l’on ne trouve que peu de commentaires sur la droite aujourd’hui ou du moins ce qu’il en reste, on peut lire entre les lignes et retenir cette phrase : « J’étais obsédé par la nécessité du rassemblement des plus centristes jusqu’aux plus souverainistes. Le risque de l’élongation ne me faisait pas peur, celui de la rétractation, oui ! » Plus qu’un programme.
Passions, éditions de l’Observatoire, 19,50 euros.