Un mois après le début de l’assaut du maréchal, Khalifa Haftar, sur Tripoli, l’impasse est totale : les positions militaires sont figées et tout dialogue semble impossible pour sortir de cet énième conflit en Libye devenue terrain de luttes d’influence entre grandes puissances. Alors que les Nations-Unies avaient planifié l’organisation d’une grande Conférence internationale sur la Libye, les 14 et 15 avril 2019, certaines puissances internationales dont les Etats-Unis et la France, se sont coalisées pour apporter leur soutien militaire au maréchal, Khalifa Haftar, qui ambitionnait de prendre, militairement, Tripoli pour se présenter à cette conférence en vainqueur de la guerre. Pour la première fois, les Etats-Unis et la Russie, se sont, même, retrouvés, ensemble, pour soutenir l’offensive du maréchal. Malheureusement, celle-ci a été bloquée par les forces coalisées autour du premier ministre, al-Sarraj.
Arrivées rapidement aux portes de la capitale, les forces de l’autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL du maréchal Khalifa Haftar) se sont heurtées aux troupes pro-GNA (Gouvernement d’union nationale), aidées de milices venues de plusieurs villes de l’Ouest, notamment, Misrata, qui accusent le maréchal Haftar de vouloir instaurer une nouvelle « dictature militaire » comme sous Mu’ammar al Kadhafi.
Les lignes ont peu bougé sur le terrain, depuis plus de trois semaines, même si les pro-GNA ont desserré un peu l’étreinte de l’ANL avec une contre-attaque lancée le 20 avril.
Des combats urbains se tiennent, toujours, dans la banlieue sud de la capitale, à Aïn Zara, pointe avancée de l’ANL à une douzaine de km du centre-ville, à Salaheddine et Khalat al-Ferjan (environ 20 km du centre-ville).
Plus à l’Ouest, les pro-GNA ont repris du terrain autour d’al-Aziziya. Des affrontements se déroulent autour de l’aéroport international (30 km de Tripoli) -inutilisé depuis sa destruction par des combats entre milices en 2014- et au nord de la ville de Gharyan (80 km au sud-ouest de Tripoli), une base arrière de l’ANL.
De part et d’autre, les forces sont équivalentes.
« L’ANL compte 25.000 hommes : 7.000 réguliers et 18.000 membres des milices. Le GNA peut compter sur 18.000 membres des 200 milices de Misrata, la Force Rada (1.500 combattants de Tripoli), la Brigade de Nawasi (1.800 de Tripoli), la garde présidentielle (800). Les forces aériennes comptent, chacune, une quinzaine d’appareils et une poignée d’hélicoptères », explique Arnaud Delalande, consultant sur les questions de défense spécialisé sur la Libye.
Au plan international, aucune condamnation sérieuse n’a été émise à l’encontre de Haftar. La communauté internationale accepte de facto la poursuite d’une guerre périlleuse et prompte à connaître une plus grande détérioration. Trois membres du Conseil permanent de sécurité (Etats-Unis, Russie et France) soutiennent Haftar dans son offensive contre le gouvernement mis en place par les Nations-Unies.
Conséquence, au Conseil de sécurité de l’ONU, les pays membres n’ont pas réussi à s’entendre sur une résolution britannique demandant un cessez-le-feu, il y a quelque temps.
La France, accusée par le GNA de soutenir, politiquement, Haftar, a démenti et appelé à « un processus politique sous l’égide de l’ONU ».
Les puissances régionales sont, elles aussi, à la manœuvre.
Khalifa Haftar est soutenu par l’Egypte, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis, partisans de régimes forts pour contrer l’influence des islamistes. La Turquie et le Qatar, sont, eux, favorables au GNA.
Autrement dit, après s’être mis ensemble pour mettre Kadhafi dehors, la France et le Qatar ne voient plus l’avenir de la Libye de la même façon.
Le GNA a exclu toute négociation avec Khalifa Haftar tant qu’il ne retire pas ses troupes.
Mais, tout laisse penser qu’il s’agit d’une guerre potentiellement très longue et peu propre.