Que n’a-t-on pas entendu ce lundi, 11 février, matin, sur les ondes de RFI de la bouche du président de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara ? Il a déclaré que la « Côte d’Ivoire est un pays bien tenu », qui affiche « un taux de croissance de 8% en moyenne depuis plusieurs années, ce qui fait d’elle l’un des quatre pays au monde à afficher une telle performance », que « le taux de croissance des trois prochaines années serait du même ordre entre 7 et 9% », que « l’inflation est contenue entre 1 et 2% par an », que « le déficit public se situe à 3 ou 4% » bon an mal. Bref, que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Au micro de Christophe Boisbouvier à qui il n’a présenté que le (très très) bon côté de la réalité, le président ivoirien a, tellement, vanté les succès de sa gouvernance qu’on est étonné de savoir, quelques heures après ses déclarations lénifiantes, qu’il est en guerre, depuis un mois, contre ses enseignants du primaire, du secondaire et du supérieur, lui, le libéral-social, héritier de l’houphouétisme dont le dialogue est la principale caractéristique. N’a-t-il pas juré ce matin qu’il avait la fibre sociale ? Pourquoi ne négocie-t-il pas alors avec ses enseignants qui sont en grève depuis quatre semaines ?
Sacré Alassane Ouattara ! Voilà un homme qui a réussi à décapiter la coalition qui a fait de lui, le président de la Côte d’Ivoire à deux reprises, en se séparant des deux personnes clés (Bédié et Soro) sans lesquelles il n’aurait jamais été président de la Côte d’Ivoire. Soro, par les armes, l’a fait monter au pouvoir en créant une rébellion qui a divisé la Côte d’Ivoire sous Gbagbo pendant cinq ans. Quant à Bédié, il a accepté de lui offrir le vote du PDCI sur un plateau d’argent pour se faire élire en 2011 et réélire en 2015. Le président ivoirien a, visiblement, la mémoire courte. Dire qu’il ne sait pas renvoyer l’ascenseur, n’est pas suffisant. Il faut dire qu’il fait montre d’une attitude négative qui relève, plutôt, de la psychiatrie.
La grève des enseignants des écoles primaires, secondaires et des professeurs de l’Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan, la principale de Côte d’Ivoire, est rentrée dans sa quatrième semaine, paralysant tout le système éducatif du pays.
Le mouvement dans le primaire exige, entre autres demandes matérielles, « la suppression des cours du mercredi ». Le secondaire réclame une hausse des indemnités de logement, appuyé par leurs collègues du primaire.
Dans le supérieur, la CNEC (Coordination nationale des enseignants-chercheurs et chercheurs de Côte d’Ivoire) a annoncé « un an de grève » à l’Université d’Abidjan, après des sanctions disciplinaires infligées à deux professeurs, suspendus de toutes activités académiques pour une période d’un an, pour des « violences » perpétrées à la présidence de l’université.
La CNEC exige la « révocation du professeur Abou Karamoko », président de l’Université, « comme condition impérative à toute reprise des activités académiques ». Un bras de fer qui ne dit pas son nom.
« Nous demandons au gouvernement d’ouvrir des négociations pour que des solutions soient trouvées pour sauver l’école ivoirienne » a souligné M. Zadi, l’un des leaders syndicaux. Les syndicats ont proposé la nomination d’un médiateur mais le gouvernement ne l’entend pas de cette oreille. Pourtant, il est « libéral-social ».
A Bouaké, deuxième ville du pays, les jeunes sont en congé forcé depuis des semaines. Ils ont manifesté, la semaine dernière, leur mécontentement face à cette situation.