COTE D’IVOIRE : Pourquoi Alassane Ouattara a poussé Guillaume Soro à la démission de la présidence de l’Assemblée nationale

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Ce n’est plus un événement (comme cela aurait pu l’être) car tous les Ivoiriens attendaient cette démission de Guillaume Soro de la présidence de l’Assemblée nationale. L’intéressé l’avait confié à ses proches et le président de la République, Alassane Ouattara, lui-même, avait annoncé ce départ, le mois dernier, alors qu’ils recevaient des journalistes. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et on ne s’empêchera pas de poser, au moins, deux questions : première question : après avoir, grâce à sa rébellion armée, installé Alassane Ouattara au pouvoir, Soro a-t-il été bien payé en retour ? Deuxième question : Si Blaise Compaoré, l’ancien mentor de Guillaume Soro, n’avait pas perdu le pouvoir au Burkina Faso, les choses se seraient-elles passées ainsi ?

« A cet instant précis, je rends ma démission », a annoncé Guillaume Soro, en froid avec le chef de l’Etat, Alassane Ouattara (notre photo quand les relations entre les deux hommes étaient au beau fixe). « Refuser de démissionner conduirait à une crise institutionnelle. On ne peut risquer de mettre en péril la paix fragile (…) pour conserver un poste », a-t-il ajouté.

Explication : Guillaume Soro a été poussé à la démission par le président Ouattara, après avoir refusé de participer à la mutation, fin janvier, de la coalition au pouvoir, le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), en un grand parti unifié. Cette mutation a, aussi, été à l’origine de l’implosion (de l’intérieur) du RHDP qui a vu le départ de ses rangs de son président en la personne d’Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA. Pour réussir son coup politique, Alassane Ouattara s’est vu accuser de faire le chantage aux postes politiques contre tous ceux qui refusaient d’adhérer au RHDP (parti politique).

Pour avoir résisté, Guillaume Soro en a tiré les conséquences : s’il faisait de la résistance en se maintenant à son poste, le président de la République aurait rendu sa vie invivable.

Agé de 46 ans, Guillaume Soro présidait l’Assemblée nationale depuis 2013. Il avait été, auparavant, le premier chef du gouvernement du président, Alassane Ouattara, après son arrivée au pouvoir en 2011. C’était une période en or pour lui.

De 2002 à 2011, il a été le chef de la rébellion qui a contrôlé la moitié nord de la Côte d’Ivoire, pendant la présidence de Laurent Gbagbo. Cette rébellion avait soutenu, militairement, Alassane Ouattara contre Laurent Gbagbo lors de la crise post-électorale meurtrière de 2010-2011, où les deux hommes revendiquaient la victoire à l’élection présidentielle.

Guillaume Soro avait été élu président de l’Assemblée alors qu’il était vice-président du Rassemblement des républicains (RDR), le parti au pouvoir, qui s’est, ensuite, transformé pour donner naissance au RHDP.
Très discret sur le plan médiatique depuis plusieurs mois, voyageant beaucoup à l’étranger, il venait de déclarer sa candidature à l’élection présidentielle de 2020.

Mais, sauf cas de force majeure, Alassane Ouattara, qui termine son deuxième et dernier mandat, est en train de créer les conditions politiques à sa réélection pour un troisième mandat. Son allié et grand-frère, Henri Konan Bédié, a refusé de l’accepter, d’où le clash entre les deux hommes. Guillaume Soro a, aussi, senti que le président ne voulait pas partir, et il a dit Non. Il s’est déclaré candidat à cette présidentielle, d’où sa démission forcée de la chambre basse du parlement ivoirien.

La Côte d’Ivoire est en train de livrer ses secrets. Au fur et à mesure, ses (grands) fils se dévoilent.

Après son dernier discours de président de l’Assemblée nationale auprès de ses collègues députés, qui l’ont, par ailleurs, beaucoup applaudi, Guillaume Soro (qui n’a pas encore démissionné de son poste de député) a quitté l’enceinte de l’institution à bord d’une petite voiture qu’il a conduite lui-même.

Pressent-il, déjà, que le pouvoir se prépare à diligenter des enquêtes anti-corruption pour salir sa gestion à l’Assemblée nationale ?

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