Grand allié des Russes, ce qui chamboule les équilibres géo-stratégiques de la région, le président, Omar el-Béchir, a assuré, lundi, 14 janvier, que la contestation qui secoue le Soudan depuis près d’un mois ne parviendrait pas à bout du pouvoir qu’il exerce depuis près de trois décennies, lors d’un rassemblement de ses partisans au Darfour (Ouest). Le message est adressé, non seulement, à ses opposants de l’intérieur, mais surtout, à ceux qui les manipulent sur le plan international, à commencer, par ceux qui avaient imposé la partition (sans raison) du pays, à savoir, les Américains, très mécontents de l’arrivée des Russes dans la sous-région.
« Les manifestations ne conduiront pas à un changement de pouvoir », a dit Omar el- Béchir devant la foule rassemblée à Niyala, capitale du Darfour-Sud, au lendemain de premières manifestations antigouvernementales dans cette région théâtre d’un conflit meurtrier depuis le début des années 2000.
« Il y a une seule voie vers le pouvoir, et c’est celle des urnes. Le peuple soudanais décidera en 2020 qui doit les gouverner », a déclaré le général-président, Béchir, 75 ans, dont une troisième candidature à l’élection présidentielle prévue l’an prochain est pressentie. Autrement dit, à 75 ans, il n’est pas du tout fatigué. 75 ans est même l’âge moyen des dirigeants africains, l’âge auquel ils aspirent à une nouvelle jeunesse, à la tête des affaires des Etats !
L’actuel mouvement de contestation au Soudan a débuté le 19 décembre après la décision du gouvernement de tripler le prix du pain, dans un pays en plein marasme économique. On peut, dès lors, se poser la question de l’utilité de la présence russe dans le pays : en fait, Moscou sait vendre des armes et la sécurité. Moscou n’a jamais su vendre les tomates ni le développement économique. Peut-être que Vladimir Poutine y pense-t-il ?
A Khartoum, les manifestations se sont, ensuite rapidement, transformées en une contestation du pouvoir d’Omar el-Béchir, qui dirige le pays d’une main de fer depuis 1989.
Vingt-quatre personnes sont mortes depuis le début du mouvement, selon un bilan officiel. Les ONG Human Rights Watch et Amnesty International parlent elles d’au moins 40 morts, dont des enfants et des personnels médicaux.
« Le Soudan a beaucoup d’ennemis et ces ennemis comptent quelques personnes parmi nous qui ne veulent pas la stabilité et la sécurité », a ajouté le chef de l’Etat soudanais, en brandissant sa canne à l’adresse de ses partisans qui scandaient « reste, reste » (notre photo).
« Nous ne permettrons à personne de détruire notre patrie en pillant et en brûlant nos propriétés », a-t-il clamé.
Les manifestations ont commencé dans plusieurs localités avant de gagner Khartoum. Plusieurs bâtiments et bureaux du parti du Congrès national (NCP) de M. Béchir ont été incendiés lors des premiers jours de la contestation.
Dimanche, 13 janvier, des rassemblements ont eu lieu à Khartoum, mais aussi, pour la première fois, depuis le 19 décembre, à Al-Facher, capitale de l’Etat du Darfour-Nord, et à Niyala. Ils ont été réprimés par la police à coups de gaz lacrymogènes, d’après des témoins.
Vaste comme la France, la région du Darfour, dans l’Ouest du pays, est secouée, depuis 2003, par un conflit opposant les forces soudanaises à des rebelles issus de minorités ethniques et s’estimant marginalisés par le pouvoir central.