Le premier tour de la présidentielle qui se tiendra au Nigeria en février 2019 opposera deux vieux routards de la politique issus du Nord du pays : le chef de l’Etat sortant, Muhammadu Buhari, 75 ans, sera face à l’ancien vice-président et riche homme d’affaires, Atiku Abubakar, 71 ans. Atiku Abubakar a une excellente carte à abattre : De 1999 à 2007, il avait été le vice-président du général-président, Olusegun Obasanjo. Ce dernier, qui fut l’un des anciens chefs d’Etat nigérian à avoir laissé une bonne image en quittant sa fonction, avait appelé à voter contre Goodluck Jonathan alors qu’ils appartenaient tous les deux au même parti politique. Il se rangea dans la catégorie des déçus de son régime qui appelèrent à voter le général, Muhammadu Buhari. Mais le triste bilan de l’actuel président l’a contraint, à nouveau, à réviser sa position. S’il apporte son soutien à son ancien vice-président, Atiku Abubakar, l’actuel président candidat à sa succession aura de gros soucis à se faire.
Atiku Abubakar a obtenu 1.532 voix, soit, deux fois plus que son principal rival, le gouverneur de l’Etat de Sokoto (Nord), Aminu Tambuwal, avec 693 voix.
« Merci de m’avoir choisi. C’est une victoire pour nous tous. La tâche de remettre le Nigeria sur les rails commence maintenant », a déclaré Atiku Abubakar sur son compte Twitter, avant même la proclamation des résultats définitifs.
Plus de 3.000 délégués des 36 Etats et d’Abuja ont voté pour le candidat de leur choix lors de ces primaires de deux jours.
Outre le gouverneur de l’Etat de Sokoto, Atiku Abubakar avait, notamment, face à lui le président du Sénat, Bukola Saraki (317 voix), et Rabiu Kwankwaso, un ancien gouverneur de l’Etat de Kano (158 voix).
Le vainqueur de la primaire est issu du Nord à majorité musulmane – plus précisément de l’Etat d’Adamaoua -, selon une règle tacite au Nigeria selon laquelle la présidence doit alterner tous les deux mandats entre un candidat du Nord et un candidat du Sud. Buhari (qui est aussi du Nord) a, déjà, effectué un premier mandat.
L’ancien vice-président, qui s’est, déjà, présenté quatre fois à la présidentielle, est, aussi, un homme d’affaires qui a amassé une fortune colossale dans l’import-export, le pétrole, l’agriculture ou encore les télécommunications.
Issu d’un milieu modeste, ce musulman polygame, père de 20 enfants a passé une vingtaine d’années aux douanes nigérianes où il a peu à peu grimpé pour en devenir le numéro 2, avant de se tourner vers le secteur privé.
Sa richesse a, toujours, été ternie par des accusations de corruption ou des scandales de conflits d’intérêts, mais, aucun de ses détracteurs n’a réussi à en apporter les preuves ni à le traîner en justice.
Atiku Abubakar (sur notre photo avec Olusegun Obasanjo) est un ancien transfuge de l’APC (parti de Muhammadu Buhari) qu’il avait quitté fin 2017 à cause de son bilan critique pour rejoindre le PDP, le parti d’opposition.
Peu de différence idéologique opposent les deux partis rivaux. Les principaux enjeux se cristalliseront donc autour de l’économie, dans un pays qui peine à sortir d’une grave récession, du chômage et de l’insécurité.
La lutte contre la corruption et la secte Boko Haram seront également au coeur des débats, beaucoup reprochant à Buhari d’avoir mené une chasse aux sorcières davantage destinée à évincer ses opposants qu’à assainir l’administration publique. Quant à Boko Haram qu’il disait avoir éradiqué, ses soldats tués presque quotidiennement continuent de subir la loi de cette secte terroriste.