Il en a une peur bleue, de l’extradition. Celui qu’on nommait vice-président quand son frère, Blaise Compaoré, officiait comme président de la République du Burkina Faso. Aujourd’hui, le vent a tourné et François Compaoré a fui le pays (comme son frère Blaise) avant d’être rattrapé par la justice française. Ce mercredi, 13 juin, justement, cette justice française décidera de son sort, après qu’il a été mis en cause dans l’enquête sur l’assassinat du journaliste, Norbert Zongo, en 1998. Une affaire que le clan Compaoré ne recommencerait plus si c’était à recommencer.
Agé de 64 ans, François Compaoré (sur notre photo pendant sa toute puissance) a été arrêté à l’aéroport de Paris Charles-de-Gaulle, fin octobre, en raison d’un mandat d’arrêt émis le 5 mai 2017. Il n’est pas inculpé, à ce jour, dans son pays, dans cette affaire.
Alors qu’il enquêtait sur la mort de David Ouédraogo, le chauffeur de François Compaoré, Norbert Zongo et trois personnes qui l’accompagnaient avaient été retrouvés morts calcinés dans leur véhicule, le 13 décembre 1998, à Sapouy (Sud du Burkina Faso). Des assassinats comme savaient les commettre le régime de Blaise Compaoré. Sauf que celui de Zongo a révolté la population, en premier lieu, les journalistes. Trop c’était trop. On commençait à en avoir marre des crimes crapuleux sous le régime de Blaise Compaoré, crimes qui restaient impunis.
Fin mars, lors de l’audience qui s’est tenue devant la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris, ses avocats avaient réclamé que soit écartée cette demande d’extradition, soulignant, notamment, son manque de solidité.
Alors que la justice burkinabé affirme que des documents incriminent François Compaoré dans la mort de Norbert Zongo, l’avocat de ce dernier, Me Pierre-Olivier Sur, avait balayé leur existence, soulignant qu’ils n’avaient pas été transmis à la justice française.
« Si vous n’avez pas ces documents, au bout de dix mois, c’est que ces documents n’existent pas », avait-il martelé.
L’avocat avait, également, plaidé le risque de voir la peine de mort s’appliquer à son client, en dépit des assurances fournies par le Burkina Faso.
Un arrêt de 2014 de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, condamnant le Burkina Faso pour avoir manqué de diligence dans son enquête sur ces assassinats avait également été au cœur des débats.
L’avocate représentant le Burkina Faso, Me Anta Guissé, avait soutenu que c’est notamment en raison de cet arrêt que le dossier avait été rouvert par la justice burkinabè. « Ce qui vous est demandé, c’est que la justice burkinabè puisse faire son travail », avait-elle ajouté à l’audience, relevant que François Compaoré s’était « soustrait » à cette justice en quittant le pays.
A l’inverse, Me Mathias Chichportich, qui défendait, lui aussi, François Compaoré, avait fait valoir que, selon cet arrêt, M. Compaoré avait bien été entendu par la justice de son pays en tant que témoin et qu’il ne pouvait pas être reproché à l’Etat burkinabè, alors dirigé par son frère, d’avoir fait obstruction à la justice à cet égard.
Classé en 2003, après un « non-lieu » en faveur du seul inculpé, le dossier Zongo a été rouvert à la faveur de la chute de M. Compaoré, fin octobre 2014, chassé par la rue après 27 ans au pouvoir.
Depuis cette perte du pouvoir par le clan Compaoré, les dossiers n’arrêtent pas de sortir des tiroirs où ils moisissaient depuis des lustres.