La CENAP (Commission électorale nationale autonome et permanente) va devoir montrer son indépendance vis-à-vis du pouvoir. La Cour constitutionnelle, aussi, même si les candidats de l’opposition n’iront rencontrer sa présidente et l’ensemble de son bureau, que plus tard.
Ce 24 juin 2016, à 12 heures, heure de Libreville, René Aboghé Ella, le président de la CENAP avait marqué son accord pour recevoir les candidats à l’élection présidentielle du 27 août, en présence de l’ensemble de son bureau. Autour du candidat de l’Union nationale, Casimir Oyé Mba qui en avait fait la demande, avaient pris place les candidats devant affronter le président sortant, Bongo Ondimba Ali (BOA) dont de sérieux soupçons pèsent sur son acte de naissance. Parmi les plus importants, et par ordre alphabétique, Manganga Moussavou Pierre Claver, Moubamba Ben, Ndong Sima Raymond, Nzouba Ndama Guy et Ping Jean. Les échanges furent courtois, les membres de la CENAP étant dans une posture d’écoute.
A la sortie de cette rencontre, Casimir Oyé Mba a pris la parole, au nom de tous les candidats, pour dire qu’il avait été remis un mémorandum en contestation de l’éligibilité de BOA dans lequel les candidats « demandaient que la constitution soit appliquée à tous dans sa rigueur » absolue. Casimir Oyé Mba s’est appesanti sur la « responsabilité » qui incombe à la CENAP chargée d’instruire les demandes de candidature, et, a, notamment, mis l’accent sur les doutes qui pèsent sur l’acte de naissance de BOA, avant d’en « appeler à tous les Gabonais pour s’élever contre la violation de la constitution » qui se prépare dans les officines du PDG. Car, a-t-il tenu à préciser (et beaucoup de Gabonais ne le savaient pas forcément), « le code électoral autorise chaque électeur gabonais à contester une candidature non conforme » à la constitution. Il a, par conséquent, invité les membres et sympathisants de l’opposition, les membres de la société civile, les électeurs gabonais sans appartenance politique, à écrire, directement, à « Monsieur le Président de la CENAP B.P. 4028 Libreville, Gabon » pour s’élever contre ce « délit de droit », cette « forfaiture », cette « imposture » ayant trait à la candidature de BOA.
Dès demain, a-t-il insisté, au nom de tous les candidats présents et devant une nuée de micros et de caméras, les électeurs sont invités, à aller, sans peur, sans crainte, déposer leur lettre de protestation au siège de la CENAP, à Libreville, pour les besoins futurs. Cela dit, on peut s’attendre, aussi, à la réplique des partisans de BOA qui enverraient, également, un courrier pour confirmer, plutôt, la validité de l’acte de naissance de leur champion. Dans tous les cas, l’objectif est de mettre la CENAP (et plus tard la Cour constitutionnelle) devant leur « responsabilité » car, comme disent les candidats presqu’en choeur, BOA, ayant acquis la nationalité gabonaise en cours de route, est disqualifié par l’article 10 de la constitution. Sans aucune autre forme de procès.
Doté de vertus pédagogiques qu’on ne lui soupçonnait guère, Casimir Oyé Mba a invité les électeurs de province, à utiliser la formule plus sûre de lettre recommandée adressée au président de la CENAP afin de limiter les déperditions. Le fax de la CENAP au numéro (01.73.05.75) sera, aussi, à la disposition des électeurs gabonais de province, de la diaspora, et des administrations, pour ceux qui choisiront ce mode de transmission simplifié, mais avec le risque que certains fax se « perdent » dans la salle de fax de la CENAP. Oyé Mba a, aussi, pensé aux électeurs qui souffriraient d’un handicap intellectuel : ils les invitent à se rendre auprès des bureaux de l’USP (Union sacrée pour la patrie) ou des sièges de partis politiques ou d’associations de la société civile, où le meilleur accueil leur sera réservé, pour les aider à formuler leur requête.
Voilà comment le combat en vue du blocage de la candidature du BOA suprême commence à prendre forme. Oui, ça devient, enfin, sérieux. Après une tournée des principaux candidats en France pour sensibiliser les autorités hexagonales, il serait, aussi, question d’aller à la rencontre de quelques chefs d’Etat de la sous-région. Toutefois, le calendrier n’est pas, encore, arrêté bien que chaque chef d’Etat soit, déjà, parfaitement, au courant, de la réalité des choses dans le pays du patriarche Ondimba. Au final, le destin du Gabon est, totalement, pleinement, entre les mains des Gabonais et des Gabonaises, cette « maison de verre » où rien ne se cache comme aimait à le dire le patriarche.