Le scénario funeste du procureur général Akiera et de Pigasse
Le 11 juin 2015, deux documents complémentaires ont été élaborés, concomitamment, suite au procès tenu 3 jours, auparavant, à la Cour suprême et portant sur le pourvoi formé par le colonel Mbango, l’adjudant Mabary et l’huissier Samba Mountou contre un arrêt de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Brazzaville, qui les avait déboutés de leurs demandes de mise en liberté d’office.
Il s’agit de la « Une » du quotidien du pouvoir, “Les Dépêches de Brazzaville” et de la « Note » à l’adresse du ministre de la Justice signée du procureur général près la Cour suprême, Akiéra Georges, alias « Vice-ministre ».
Le gourou Pigasse Jean Paul est, en fait, le signataire de l’article dont le titre est, ainsi, libellé : « Procès de Jean-Martin Mbemba – Le pourvoi en cassation de la défense rejeté ». Dans le corps de l’article, on peut lire : « Ils sont six dans cette affaire (dont) Me Jean-Martin Mbemba (…). Des six inculpés, trois sont actuellement en détention. Me Jean-Martin Mbemba est absent du Congo pour des raisons sanitaires ». On a, donc, compris, le gourou Pigasse a eu la mission de ses mentors de préparer l’opinion sur deux faits essentiels : d’une part, l’arrêt portant déchéance de pourvoi des demandeurs détenus arbitrairement sans loi ni titre depuis 2 ans, arrêt qui sera prononcé… 5 jours plus tard, et d’autre part, l’inculpation projetée de mon confrère Mbemba. Car à la date d’aujourd’hui, Maître Mbemba, n’ayant été mis en cause par personne ni par un quelconque acte ou preuve comme cela ressort du dossier du juge d’instruction, n’a jamais été cité par ce dernier et encore moins « inculpé », comme le reconnaît d’ailleurs le procureur général de la Cour suprême dans sa « Note ». Même les 3 détenus et Souami Eric – mort en détention à la suite des tortures – n’ont pas été inculpés comme l’ont souligné les avocats à l’audience de la Cour suprême du 8 juin dernier. Mais, pour le gourou Pigasse, qui mène une vie ostentatoire grâce aux deniers publics du Congo, et qui est placé à la tête d’une entreprise privée financée, entièrement, par les fonds publics, donc, susceptible d’être poursuivi comme détenteur de biens mal acquis, servir à tout prix le pouvoir, même sur fond de mensonges évidents et de trafic épatent de la vérité n’a pas de prix. Le gourou Pigasse – qui ne cesse de tenter des missions de rassembler des Français vivant au Congo, en leur demandant « d’être tous derrière le président Sassou, ami de la France » – s’est même bandé les yeux à l’audience du 8 juin : il n’a pas vu qu’il y avait, outre les brillants avocats que sont le bâtonnier Malonga, Maîtres Inchauspe et Maboya, le remarquable Maître Bondo du barreau de Kinshasa, et que la salle était bondée avec de nombreux journalistes et même… deux émissaires (un Noir et un Blanc) de l’Ambassade des Etats-Unis au Congo ! La « Note » prise le même jour que la publication du gourou Pigasse à l’adresse du ministre Yoka et signée du procureur général Akiera, alias « vice-ministre », est, encore, plus parlante.
Quelques remarques :
1. De quel document Monsieur Akiera tire-t-il les informations con-tenues dans sa « Note » ? Certainement pas des auditions faites dans le Cabinet du doyen des juges d’instruction. Car de ces quelques auditions faites par un des trois détenus sans la présence de ses avocats jamais informés, donc, au mépris de la loi, il n’en est rien ressorti. Peut-être que le « vice- ministre » s’appuie-t-il sur le témoignage de Maléla Jacques paru dans « La Voix du Peuple » du 6 août 2013. Dans ce cas, il faut reproduire en entier, notamment, le passage qui suit : « Contrairement à la thèse répandue selon laquelle nous avons commis un acte de braquage au domicile de Mahoungou Tékanima (…), je jure la main sur le cœur que ce motif nous a été forcément collé dans le but de nous présenter comme de vulgaires criminels(…). Jacques Maléla a encore précisé : « Ce jour-là, vers 18h30, c’est-à-dire, l’heure à laquelle Mahoungou Tékanima, mon ancien patron, est censé être à son domicile, mon compère Massamba Déric et moi avons décidé d’aller au domicile de celui qui m’avait fait la promesse de me payer les 13 millions de F CFA qu’il me devait à la suite de l’opération de transport de cercueils. Les mains nues, nous nous introduisons au domicile de mon débiteur. Malheureusement, pour nous ce soir-là, il était absent ». Après notre arrestation et pendant nos différentes détentions dans les commissariats et à la DGST, où nous avons subi de tortures insupportables, les services de la police nous ont pondu une autre thèse aussi farfelue que bancale que la première dite de braquage et selon laquelle nous étions impliqués dans une histoire de trafic d’armes devant servir au coup d’état de Jean-Martin Mbemba. Et Jacques Maléla conclut : « Comment pourrais-je faire un coup d’état avec quelqu’un que je ne connais pas et que je n’ai jamais rencontré » ?
2. Akiéra, dans le point 3 de sa « Note » indique que les « armes (qui auraient servi au « braquage » de Maléla et Massamba) provenaient du poste de garde de Monsieur Jean-Martin Mbemba« . Où sont ces armes ? Et si elles existent, qu’est-ce qui prouve qu’elles proviennent de la garde du président de la CNDH (Commission nationale des droits de l’homme) ? Qui plus est, le même Akiéra avait présenté auparavant une autre thèse dans ses réquisitions du 20 janvier 2015 devant la Cour suprême lorsqu’il écrit : « Dans la nuit du 18 mars 2013, un vol à mains armées a eu lieu au domicile de Monsieur Mahoungou Tekanima, au quartier Kinsoundi. Les investigations menées par la police ont conduit à la saisie d’armes de guerre destinées au renversement des institutions de la République et à l’interpellation de Mbango Jean-Claude et autres ».
Puisque les dites armes ont été saisies, selon les écrits officiels et publics de Monsieur Akiéra, où sont-elles ? Au domicile de qui ont-elles été saisies ? En présence de qui ? Où sont les scellés ? Où est le procès-verbal de saisie légalement établi en vertu des dispositions de la loi, notamment, l’article 62 du code de procédure pénale qui stipule : « Les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction ne peuvent être effectuées sans l’assentiment exprès de la personne chez laquelle l’opération a lieu. La mention de cet assentiment doit être confirmée au procès-verbal ».
Où sont les « 300 à 400 p.m.a.k déjà saisis » qu’annonçait Monsieur Ndenguet (directeur général de la police, ndlr) à travers la parution du 15 mai 2013 du journal « Le Troubadour » ?
3. Akiéra affirme en point 6 de sa Note : « A l’exception de Mbango Jean-Claude, tous les autres susnommés ont été inculpés et placés sous mandat de dépôt le 21 juin 2013″.
Quelle honte !
Recourons à ce qui a été dit publiquement par le procureur général près la Cour d’appel dans ses réquisitions devant la Chambre d’accusation du 15 octobre 2014 (voir plumitif d’audience) : « Nos collègues d’en bas ont failli (…). Dans cette affaire, il n’y a pas de mandat de dépôt et les inculpations n’ont pas été notifiées aux parties.
En conséquence, concluait le parquet général, la chambre d’accusation a le pouvoir d’ordonner la mise en liberté… ».
La chambre d’accusation elle-même reconnaît que le dossier d’instruction est boiteux puisqu’elle « ordonne à Monsieur le doyen des juges de procéder immédiatement et sans délai à l’inculpation et à la régularisation des titres de détention de Mbango Jean-Claude et autres ». Il s’agit donc bien de Mbango Jean-Claude et autres, c’est-à-dire, de tous les autres. C’est du jamais vu. On ne peut pas régulariser des situations qui sont qualifiées par la loi d’arbitraires. A ce sujet, l’article 117 du code de procédure pénale, alinéa 1° indique : « Toute personne arrêtée en vertu d’un mandat d’amener qui a été maintenue pendant plus de 72 h dans la maison d’arrêt sans avoir été entendue est considérée comme arbitrairement détenue« .
Enfin, plus de 2 ans après l’annonce fracassante faite par Monsieur Ndenguet à travers la parution du 15 mai 2013 du journal «Le Troubadour » et malgré plusieurs et divers scénarios machiavéliques de ce dernier, on n’aperçoit toujours pas d’once de moindre preuve : ni arme, ni munition, ni document séditieux, etc. à opposer à Mbango, Samba Mountou, Mabari, Souami et Me Mbemba.
Cela n’empêche pas Monsieur Akiéra, alias « la voix de son maître », de conclure : « Le cerveau du complot, Monsieur Jean-Martin Mbemba n’a jamais été cité par le magistrat instructeur, l’avis du Ministre d’Etat devrait être recueilli afin d’assurer l’équilibre de la procédure ».
En clair, cela veut dire de la bouche de Monsieur Akiéra : “on s’en fout qu’il y ait preuves ou non ; il nous faut à tout prix Mbemba. Comme c’est politique et non du droit, le ministre doit nous donner l’ordre de nous emparer non seulement de Mbango et autres, mais aussi et surtout, de Mbemba”. Et le président de la Chambre pénale de la Cour suprême, Monsieur Nanga-Nanga, a emboîté le pas de Mr Akiera. Sans honte et sous les huées de l’assistance au procès du 16 juin 2015 de Mbango et autres, Mr Nanga- Nanga s’est autorisé de marcher sur la propre jurisprudence de la Cour suprême pour répondre aux ordres du pouvoir. Par exemple, les arrêts de la Cour suprême présidée au sommet dans les affaires pénales « Affaire des disparus du Beach (une seule consignation de 10.000 F CFA (15 euros)) dans le cadre d’un pourvoi formé et jugé régulier pour le compte de plus de 100 demandeurs de pourvoi) et dans l’« Affaire Colonel Ntsourou ». Mieux, se fondant sur les mêmes dispositions de la Loi du 20 janvier 1962 sur la Cour suprême reprises dans des termes identiques par le CPP et le CPCCAF, la Chambre administrative de cette même Cour suprême a statué comme suit dans un arrêt récent du 13 novembre 2014 : « Les dispositions combinées des articles 106 et 108 du CPCCAF exigent que la requête soit accompagnée d’une consignation de la somme de 10.000 F CFA (…) INDIFFEREMMENT du nombre des personnes morales ou physiques auteurs de ladite requête ».
Nanga-Nanga et Akiéra en ont décidé autrement, en exécution des lettres de cachet !
C’est dans cet esprit et en application des orientations contenues dans la « Note » d’Akiéra que ce 24 juin 2015, le dossier dont s’agit vient d’être retiré illico presto des mains du doyen des juges d’instruction. Non pas pour incompétence comme le clame partout Akiéra, car les incompétents pullulent partout dans ce palais de justice. Dans les coulisses et auprès des siens, Akiéra avance trois motifs pour justifier sa décision de retrait :
– Ne pas avoir inculpé le colonel Mbango et Mabari jusqu’ici (en fait il n’y a rien à leur reprocher) ;
– Ne pas avoir cité et inculpé le président de la CNDH, Me Mbemba (ici aussi, il n’y a rien dans le dossier) ;
– Ne pas avoir pu obtenir de Samba Mountou – aujourd’hui mourant et laissé sans soins à la Maison d’Arrêt sur décision d’Akiéra – lors de l’interrogatoire d’identité, des aveux « significatifs » pour fonder les inculpations.
En fait, la couverture débordante des journaux congolais et étrangers de cette affaire et l’activité des avocats parisien, kinois, brazzavillois et ponténégrin aux allures triomphantes ainsi que la ferme position héroïque des personnes détenues arbitrairement, ont poussé Akiéra, Bouka, Nanga-Nanga et Oko Ngakala dans les cordes. ON VERRA BIEN LA SUITE.
Je reprends ici ce que j’ai déjà dit au site Congo liberty.com : « La Cour suprême et la Cour criminelle ne sont plus que les anti-chambres du ministère de la Justice. Il n’y a plus de justice au Congo et le procès Mbemba est la cerise sur le gâteau puisque mon confrère a justement été un des Gardes des Sceaux qui a rendu une certaine indépendance à la justice congolaise. Il s’est même battu auprès du président Sassou, avec le concours appréciable du ministre des Finances d’alors M. Mathias Dzon, pour réaliser les rehaussements spectaculaires du traitement des magistrats en le multipliant par 3 ou par 4 selon les catégories professionnelles ». C’est dire que tout ce qui se passe est lamentable.
Je n’épiloguerai pas sur les bouffonneries de certains magistrats congolais qui, par courrier, ont décidé de refuser que Maitre Nganga plaident devant eux.
« Je rappelle que seul le Conseil de l’Ordre peut sanctionner un avocat en première instance, et la décision du Conseil est susceptible d’appel, ce qui n’est pas le cas de la déclaration des magistrats de la Cour suprême à l’encontre de Me Amédée Nganga. Mais, y a-t-il encore un ordre d’avocats au Congo ?
Celui-ci est dirigé par l’avocat qui avait demandé des sanctions contre Maître Malonga et Maître Hombessa !
Les avocats congolais sont en partie responsables de ce naufrage car à force de ne pas réagir, les résultats sont là.
Mon cœur saigne et je me remémore ce vent de liberté qui soufflait dans ce magnifique Palais de justice de Brazzaville qui est recouvert aujourd’hui d’une chape de plomb » ». Comme j’ai déjà pu l’indiquer à plusieurs reprises, il n’y a plus de justice indépendante au Congo-Brazzaville, les libertés individuelles ne sont plus protégées, le pouvoir politique et la police agissent en toute liberté dans un pays qui est devenu une dictature policière.
Tout ce qui se passe dans le procès de Maître Jean-Martin Mbemba est la reproduction de ce que j’ai vécu en ma qualité de défenseur du Colonel Marcel Ntsourou.
Il reste quelques avocats courageux, qui font l’objet de menaces, et qui sont même boycottés par certaines juridictions.
L’Ordre des avocats est également dirigé par des partisans du pouvoir.
La « Note » du procureur général au ministre de la Justice démontre la bêtise du rédacteur.
C’est d’ailleurs, ce qui va, à mon avis, sauver le Congo- Brazzaville.
Toutes ces personnes qui bafouent les liber tés sont incompétentes et négligentes. Face à elles, il existe des magistrats congolais qui ont été placardisés parce qu’ils étaient courageux.
Un jour, ils reprendront le flambeau et les libertés seront respectées.
Au fond, les motifs de cet acharnement contre Me Mbemba, c’est cette information diffusée, en 2015, par le site Zenga Mambu : « Le bâtisseur infatigable, c’est-à-dire, Sassou est très remonté contre Jean-Martin Mbemba. Outre qu’il lui reproche d’avoir inséré dans la constitution actuelle la limitation du nombre des mandats présidentiels et l’interdiction de réviser cette disposition, il le soupçonne d’être à la base de la réactivation du dossier des disparus du Beach en France ».