La Francophonie du 3e millénaire du recteur;Jean Tabi Manga

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Dans la préface qu’il rédige à mon endroit, il écrit : « A mon frère Jean Paul, un écho à nos valeurs en commun ». Tout simplement. Les vrais spécialistes de la langue française s’expriment dans la plus grande simplicité. Ils ne compliquent pas la langue. Ils ont compris, avant les autres, que la meilleure manière de se faire comprendre, c’est de parler facile. Dans « Francophonie : lieu de mémoire, projet d’espoir », la dernière sortie du recteur Jean Tabi Manga aux éditions Afrédit(1), il n’est point besoin d’être capé pour le suivre. C’est le pédagogue qui s’exprime. C’est l’ancien directeur de l’Ecole normale supérieure (ENS) du Cameroun qui nous fait vivre « cet humanisme intégral qui se tisse autour de la terre », comme l’avait si bien dit, un de nos maîtres éternels, Léopold Sédar Senghor.

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En dévorant son ouvrage qui se lit comme un polar, le lecteur découvre le parcours de l’auteur que Jean-Louis Roy, le très ancien dynamique secrétaire général de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), avait débauché à Yaoundé, en 1993, pour en faire le directeur général de l’éducation et de la formation de son organisation. Deux mandats pleins, remplis à la grande satisfaction des Etats, surtout, du Cameroun dont il était le digne représentant au sein de la francophonie. Avec une telle expérience acquise à l’international, le professeur dispose d’un profil de premier choix pour les autorités de son pays, malgré quelques propositions alléchantes de certaines universités françaises. Il rentre donc dans son pays où il commence par seconder, dans le domaine des affaires académiques, le professeur Jacques Fame Ndongo, recteur de l’Université de Yaoundé. Par la suite, l’Université de Yaoundé qui est un gros mastodonte est éclaté en deux entités bien distinctes, pour une meilleure efficacité pédagogique et managériale. Le professeur Jean Tabi Manga est logiquement nommé recteur de l’Université de Yaoundé II à Soa, une localité située à 15 kilomètres de la capitale où tout le campus doit être bâti. Travailleur infatigable, il n’a pas peur du défi. Au contraire, il peut montrer tous les contours de son talent de pédagogue, de meneur d’hommes et de concepteur de projet éducatif. Sans faire des jaloux, son université est, aujourd’hui, l’une des rares sinon la seule au Cameroun où on fait preuve d’innovation, de créativité et d’inventivité. La routine est proscrite dans les amphithéâtres de Yaoundé II et les enseignants sont invités à revoir de manière permanente leur façon de dispenser le savoir. Ils doivent sans cesse se remettre en question.

Dans la préface qu’il lui consacre, le recteur Michel Guillou qu’on ne présente plus dans notre belle vieille francophonie, soutient que son ami et non moins collègue du Cameroun « est un bâtisseur, un constructeur d’avenir (et qu’) il suffit pour s’en rendre compte de se rendre à l’Université de Yaoundé II qu’il dirige ». Nous sommes donc nombreux à nous en apercevoir.

Je passe volontairement la bagarre connue sur le positionnement du français par rappor t à l’anglais dans les organisations internationales. Ce qu’il en dit est très sensé d’autant qu’il connaît le problème non seulement en tant que linguiste, l’un des meilleurs de l’espace francophone, mais aussi, comme ancien patron de ce secteur pendant huit longues années à l’ACCT. Malheureusement, la francophonie a changé d’hommes et d’époque. Aujourd’hui, disons-le franchement, on en parle moins qu’autrefois sans que ses grands tenants ne s’en inquiètent. Ses pères fondateurs qui l’ont portée disparaissent l’un après l’autre, sans être intellectuellement et politiquement remplacés. Léopold Sédar Senghor a-t-il été remplacé ? Que non ! Zine El Abidine Ben Ali qui avait succédé au « Combattant suprême » (Habib Bourguiba) a honoré de sa présence combien de Sommets francophones durant son quart de siècle passé aux affaires ? On compte ses présences dans les doigts de la seule main gauche. Le président Abdou Diouf devrait donc sonner le tocsin : la francophonie risque de disparaître dans l’indifférence, les uns et les autres étant accaparés par les priorités que leur impose la mondialisation.

Souhaitons que nos dirigeants prennent le temps de lire la réflexion du recteur Jean Tabi Manga sur la francophonie qu’il partage avec nous dans son dernier livre. Car la francophonie dont il nous parle est une « francophonie utile, visible, concrète, qui sait réclamer sa place dans les instances internationales y compris monétaires et hurle avec les loups quand cela est nécessaire, une idée neuve dont il faut se saisir ».

Le recteur nous presse d’installer cette troisième francophonie, une francophonie qui « ne rase pas les murs » et qui soit capable d’habiter les rêves et l’imaginaire des jeunes et d’être un véhicule de bonheur. Bref, une francophonie du troisième millénaire.

Il ne me reste plus qu’à lui souhaiter d’occuper d’autres plus hautes responsabilités, encore, au sein de la francophonie (?), ou pourquoi pas dans son beau pays, le Cameroun (?), son parcours aussi bien national qu’à l’étranger, ayant été jusque-là effectué avec beaucoup de succès.

(1) Voir la rubrique « Arts et Lettres ».

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