Le Sommet des Etats-Unis/Afrique a été une véritable catastrophe pour le PCT (Parti congolais du travail) et son grand leader « bien aimé », Denis Sassou Nguesso. Les milliers de drapeaux rouges du parti, qui l’ont accueilli, à son retour, à l’aéroport de Maya Maya, n’y ont rien changé. Le « bâtisseur infatigable » a deux bonnes années, devant lui, pour organiser son départ du pouvoir, dans la paix et le calme. Si les choses se passent, autrement, il sera responsable de tout dérapage ou trouble à l’ordre public. Il ne pourra pas s’en servir comme prétexte pour s’accrocher au pouvoir. Les Américains n’étant pas comme les Français (qu’on sait calmer à Brazzaville à coups de « ngiris » (sacs d’argent)), Sassou doit quitter le pouvoir comme son idole, Nelson Mandela, et non, comme son ancien voisin, Mobutu Sese Seko. A lui de faire le bon choix. L’ambassadrice des Etats-Unis au Congo, Suzanne S. Sullivan, le lui a rappelé, tout comme, sa patronne directe, Linda Thomas-Greenfield, secrétaire d’Etat adjointe aux affaires africaines. La marge de manœuvre du chef de l’Etat congolais s’est réduite, alors que son opposition donne de la voix, marquant un refus net de voir la constitution manipulée ou changée, pour le maintenir au pouvoir (lire l’interview de M. Dzon, page 24). Que faire ?
Du côté du PCT, des dignitaires commencent à chercher à se positionner par rapport à cet après-Sassou. Ils savent que les dés sont jetés et qu’on entre dans un moment où chacun doit essayer de tirer son épingle du jeu. Continuer de soutenir Sassou, comme avant, les yeux fermés, peut être très préjudiciable, pour la suite d’une carrière. Chaque mot, est désormais, pesé et soupesé, avant d’être prononcé, quand on appartient à la majorité présidentielle. L’heure du bilan, et donc, des comptes, va bientôt sonner.
Dans le Congo-Brazzaville, d’aujourd’hui, si on regarde bien avec un microscope, six personnes, dans l’entourage immédiat de Sassou, ont intérêt à ce que rien ne change. Ces personnes ont pour nom : Okemba, Obara, Yoka, Ndengué, Ngakala, Mboulou. Ils contrôlent tout le pays, sans être président de la République. Affectées par l’échec de la stratégie de leur mentor, à Washington, ces personnes tentent le tout pour le tout, pour que Sassou reprenne la main. Car ils voient la richesse du pays leur échapper. Leur souhait, c’est en quelque sorte de pousser l’opposition à la faute, pour reprendre la situation (actuellement pratiquement perdue) en main.
Mais, certains au PCT, commencent, également, à réfléchir à une deuxième voie.
Dès son retour de Washington, Sassou a eu l’idée de convoquer les parlementaires de la majorité, à Oyo, pour une concertation qui devait déboucher sur une feuille de route conduisant au référendum. Par la suite, il a envoyé une délégation conduite par Ibami Itou, le président du Sénat, arracher le Oui du roi des Téké pour changer la Constitution. Cela dit, les Américains l’ont mis en garde contre toute manœuvre visant à déstabiliser le pays. La stratégie du « après moi le déluge » pourrait lui être fatale. Alors, il fait attention. Il aurait intérêt à ne plus trop écouter son fameux groupe des six.
Le bon sens voudrait qu’il sache tourner la page, ce que lui a, amicalement, suggéré Linda Thomas-Greenfield. C’est ce que lui aurait, aussi, soufflé, au détour d’un petit aparté, son vieux complice, le président béninois, Yayi Boni, qui, lui, a annoncé sa décision de ne pas chercher à modifier la constitution pour obtenir un troisième mandat et de quitter le pouvoir en juin 2016. Il se propose de devenir un prédicateur évangéliste, à plein temps, hormis des missions que l’Union africaine ou les Nations-Unies pourraient lui confier. Il pourrait en être de même pour Sassou. Sassou est, donc, tiraillé entre ceux, comme Yayi Boni et Jacob Zuma, qui lui demanderaient de terminer, en beauté, ce qui lui permettrait de regarder la communauté internationale, la tête haute, sans avoir honte, et certains de son camp, notamment, la bande des 6 qui l’invite à déjouer les pronostics en s’accrochant au pouvoir, malgré les risques encourus. Tôt ou tard, ces six devront rendre des comptes.
Au sein du PCT, d’éventuels prétendants commencent à se préparer, pour être fin prêts, dès que le parti aura besoin des candidats susceptibles de lui permettre de conserver le pouvoir. D’autres, comme André Okombi Salissa, se sont, déjà, dévoilés. Ils sont quelques-uns comme ce dernier à n’avoir pas attendu que Sassou dise les choses clairement. Ils savent que sa carrière est, désormais, derrière lui, et il ne peut plus incarner un avenir pour le parti. Ils sont prêts à se jeter à l’eau.