Le premier tour de l’élection présidentielle a donné son verdict : comme en 2017, Emmanuel Macron affrontera Marine Le Pen, le 24 avril. Mais contrairement à il y a cinq ans, Emmanuel Macron, cette fois-ci, défendra son bilan, un bilan qui est diversement apprécié par les lecteurs d’Afrique Education tandis que Marine Le Pen s’est « gauchisée » au regard de la campagne très à droite de son rival au sein de l’extrême-droite, Eric Zemmour. Connaissant donc mieux le président sortant, les deux questions sont surtout posées à son adversaire du deuxième tour.

Ces deux questions concernent le F CFA et la présence de l’armée française en Afrique.

Parlant du F CFA, les peuples africains (c’est une litote) n’en veulent plus. S’ils étaient écoutés par leurs chefs d’Etat ou si, exactement, les chefs d’Etat africains étaient courageux, les 14 pays africains qui en sont membres, seraient sortis de ce système. En Afrique de l’Ouest, la CEDEAO a annoncé la création d’une monnaie commune, l’ECO, avec l’accord du Nigeria et du Ghana. Il restait à travailler les différentes étapes avant de l’adopter formellement : un calendrier avait été mis en place et les responsables du suivi de ce calendrier désignés. Sauf qu’en décembre 2019, le président français, Emmanuel Macron, lors d’un séjour en Côte d’Ivoire, chez son homologue ivoirien, Alassane Ouattara, a littéralement torpillé cette initiative de la CEDEAO saluée par les peuples africains. Pendant ce séjour de deux jours à Abidjan, Emmanuel Macron et Alassane Ouattara (qui présidait l’UEMOA qui compte la BCEAO parmi ses institutions) ont annoncé le remplacement du F CFA par la monnaie ECO au sein (non pas de la CEDEAO) mais de l’UEMOA qui rassemble les pays africains utilisateurs du F CFA. Du coup, la confusion s’est installée et aujourd’hui, on ne sait pas exactement où en est l’ECO version CEDEAO et ce qu’il en est de l’ECO version UEMOA. A noter que Alassane Ouattara est le principale défenseur du F CFA en Afrique francophone et son animosité à l’endroit de son remplacement n’est un secret pour personne.

D’où la première question à Marine Le Pen : que ferait-elle du F CFA, qui en fait, est une monnaie française (et non africaine) mais juste mise à la disposition des utilisateurs de l’Afrique francophone qui sont exactement 14 ? (Sur notre photo, Marine Le Pen veut la France pour les Français et « Choisit la France » tout comme les Africains veulent l’Afrique pour les Africains, ce qui suppose l’abolition de la Françafrique en Afrique). Marine Le Pen étant donc un partisan de l’Afrique aux Africains, accepterait-elle de quitter le F CFA en retirant le trésor français de la gestion de cette monnaie, et en encourageant les 14 pays concernés à embrasser leur souveraineté monétaire, quitte à ce qu’ils tracent eux-mêmes des critères d’une future coopération (ou non) avec l’ancien colonisateur ?

Deuxième question : Après avoir été chassée du Mali, l’armée française en se rendant au Niger a été bloquée au Burkina Faso et même au Niger par des manifestants qui lui demandent de quitter l’Afrique. De manière générale, cette armée basée en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Gabon, au Tchad, est perçue comme le bras colonial de la France dont le but est de surveiller les régimes politiques des pays africains et donc de perpétrer la colonisation française qui provoque la malgouvernance qui, elle, est à l’origine de l’immigration tant décriée par Marine Le Pen en France.

Question, que ferait Marine Le Pen de l’armée française en Afrique ? La rapatrierait-elle ou ferait-elle le dos rond comme Emmanuel Macron le fait depuis cinq ans ?

Les bi-nationaux africains sont très (très) sensibles à ces deux thèmes, qui n’ont pas émergé pendant la campagne du premier tour, mais qui compteront, énormément, beaucoup dans l’appréciation de leur futur vote.

Notons pour terminer qu’un sondage commandé par la chaine BFMTV, ce lundi, 11 avril, matin, donne un score de 52/48 au profit du président sortant. Autrement dit, l’élection est très ouverte.