Le président par intérim en Algérie, Abdelkader Bensalah, a proposé, dans un discours à la nation, un dialogue pour préparer la présidentielle dans lequel ni les autorités politiques ni l’armée ne seront, selon lui, impliquées. La question est sur toutes les lèvres : Commence-t-on à envisager l’éviction du chef d’état-major des armées, le tout puissant général, Ahmed Gaïd Salah, du processus menant à la prochaine élection présidentielle que l’opposition et la société civile soutenues par la grande majorité de la population, souhaitent, libre et, totalement, transparente ?
L’Algérie, où le président, Abdelaziz Bouteflika, a démissionné en avril sous la pression de l’armée et de la rue, est en proie à une crise politique majeure.
Un mouvement de contestation lancé en avril continue de refuser que le « système » en place organise la présidentielle et réclame au préalable le départ de tous les anciens soutiens de M. Bouteflika et la mise sur pied d’institutions de transition chargées de réformer l’Etat et d’élaborer une nouvelle Constitution. Cette mise à l’écart de tous les pro-Bouteflika implique celle, aussi, de son chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, qui est, également, comme un ancien indéfectible soutien d’Abdelaziz Bouteflika.
« Le processus de dialogue sera conduit et mené en toute liberté et en toute transparence par des personnalités nationales, crédibles, indépendantes, sans affiliation partisane et sans ambition électorale », a déclaré Abdelkader Bensalah.
« (…) L’Etat dans toutes ses composantes, y compris l’institution militaire, ne sera pas partie prenante à ce dialogue et observera la plus stricte neutralité tout au long du déroulement de ce processus », a-t-il affirmé.
Selon lui, « il est devenu aujourd’hui nécessaire de mettre de côté (…) les exigences irréalistes qui sont de nature à prolonger la situation actuelle et d’entraîner notre pays dans une situation de vide constitutionnel, source d’incertitude et d’instabilité ».
Son discours est intervenu à quelques jours de l’expiration prévue le 9 juillet de la période d’intérim à la tête de l’Etat, ouverte par la démission de M. Bouteflika.
L’impossibilité d’organiser le scrutin à la date du 4 juillet, faute de candidats, la présidentielle ne permet pas à M. Bensalah, qui assure l’intérim depuis le 9 avril, de rendre le pouvoir avant l’issue de la période de 90 jours prévue par la Constitution.
M. Bensalah a, déjà, annoncé qu’il prolongerait ses fonctions jusqu’à l’élection d’un nouveau président, à une date pour l’heure non indiquée.
Il s’agit de la deuxième proposition de dialogue du chef de l’Etat par intérim. Le 6 juin, il avait appelé l’ensemble de la classe politique au dialogue afin d’arriver à un consensus autour de l’organisation de l’élection présidentielle, une proposition rejetée par la contestation.
Le discours est survenu le jour même où des personnalités algériennes ont appelé leurs compatriotes à participer, massivement, vendredi, 5 juillet, à la 20e manifestation hebdomadaire contre le régime, qui coïncidera avec le 57e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie.
Cette année, « faisons du 5 juillet la concrétisation de la libération de l’Homme, après la libération de la patrie » du pouvoir colonial français, le 5 juillet 1962, ont lancé dans une vidéo postée sur internet des universitaires, un avocat, un ancien diplomate et un responsable d’un petit parti d’opposition.
Le célèbre avocat et défenseur des droits de l’Homme, Me Mustapha Bouchachi, la professeure de droit, Fatiha Benabbou, l’économiste, Smail Lalmas, le diplomate, Abdelaziz Rahabi, ex-ministre et ex-ambassadeur, le sociologue, Nacer Djabi et Karim Tabbou, porte-parole de l’Union pour la démocratie sociale (UDS), ont, aussi, réclamé du pouvoir « des mesures dans le sens de l’apaisement » montrant une « ouverture du dialogue pour sortir de l’impasse politique actuelle ».
Signalons tout de même que le chef d’état-major de l’armée, le général, Ahmed Gaïd Salah, refuse, lui, avec acharnement, depuis des semaines, les revendications du mouvement de contestation. Mais, sans sa mise à l’écart, comme le demande la contestation, il n’y aura pas d’avancée significative et l’Algérie continuera de tourner en rond.