BOURSES SECONDAIRES AU GABON : Quand la médiocrité et la facilité s’invitent dans le débat

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Les militaires sont aux affaires depuis le 30 août 2023. Si leur arrivée a été, généralement, saluée, ils ne manquent pas d’occasion pour faire du populisme en annonçant des bonnes nouvelles qui, parfois, mettent le budget de l’Etat sous tension. Car même si le Gabon reste le Gabon, il n’est pas encore le Qatar, ni l’Arabie Saoudite. Il y a encore de la marge.

C’est la raison pour laquelle la ministre de l’Education nationale, Camélia Ntoutoume Leclercq (sur notre photo prête serment le 12 septembre 2023 sous l’oeil du premier ministre, Raymond Ndong Sima), avait donné d’utiles précisions sur la gratuité scolaire, en septembre 2023, que venait d’annoncer urbi et orbi le général-président, Brice Oligui Nguema. En effet, chaque parent y allait de son interprétation, et pour beaucoup, l’arrivée du CTRI (Comité pour la transition et la restauration des institutions) voudrait dire : « Tout est désormais cadeau au Gabon » ! Loin de là. Puisqu’ils sont encore populaires, les militaires devraient en profiter pour faire beaucoup de pédagogie car les temps durs arrivent en zone CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) et le Gabon ne fera pas exception.

Croyant très bien faire ( et c’est vrai qu’on commençait à oublier cette mesure dans le dispositif social des aides à la gabonaise), les militaires ont relancé l’idée des bourses dans le secondaire. Il s’agit des établissements de l’Etat et de confessions religieuses, hormis le privé pur. Le cadeau venant du ciel, beaucoup au Gabon ont voulu semer la confusion en soutenant la généralisation de cette mesure, ce qui n’a jamais été le cas auparavant. Car cette bourse créée par le patriarche n’est pas nouvelle. Il a fallu que la ministre de l’Education et ses différents démembrements régionaux montent au créneau pour donner des précisions nécessaires.

Cultivant l’excellence et face à une enveloppe des bourses qui n’allait pas satisfaire tous les élèves, la ministre a commis un crime de lèse majesté (selon une catégorie de Gabonais) en élevant la moyenne à 12/20 au lieu de 10/20. Les contestataires se fondent sur l’article 28 du texte concernant les bourses qui énonce : « Les bourses d’études de catégorie A et B sont versées trimestriellement aux élèves du secondaire et à ceux qui sont scolarisés dans des écoles spécialisées ayant obtenu une moyenne trimestrielle d’au moins 10/20 ». Ils ont sans doute raison de demander la simple application de cet article sauf que les contraintes budgétaires du gouvernement imposent un ajustement de la disposition, qui peut être fait au travers d’une ordonnance, d’un décret ou d’un arrêté. Ainsi, les puristes n’auraient plus raison de se cramponner sur ce texte paru dans le journal officiel.

Le Gabon est le seul pays de la CEMAC et l’un des rares en Afrique où les élèves du secondaire ont une bourse scolaire. Cette mesure permet de réduire l’école buissonnière dans la mesure où elle encourage les enfants à aller au cours. Toutefois, 12/20 est une note qui milite pour l’excellence. En même temps, elle traduit la difficulté du gouvernement à faire face, financièrement, à la démographie scolaire.

Mays Mouissi, le ministre de l’Economie, a déclaré que 18 milliards de F CFA vont financer les bourses scolaires en 2023-2024. Ramené à la taille du Cameroun, par exemple, une telle mesure releverait de la sorcellerie des Bantu car elle se chiffrerait, bon an mal an, à près de 200 milliards de F CFA, le Gabon étant dix fois moins peuplé que le Cameroun. Pour 2024, Pauline Nalova Lyonga n’a obtenu que 539,2 milliards de F CFA pour son ministère des Enseignements secondaires, soit, une hausse tout de même de 61,4 milliards de F CFA de son enveloppe budgétaire par rapport à 2023. Une telle allocat.ion met la bourse pour les élèves du secondaire hors de portée des possibilités de l’Etat camerounais. C’est pourquoi la bourse scolaire au Cameroun est un rêve irréalisable. Les Gabonais devraient, par conséquent, savoir que leur pays est béni des dieux et que les moyens disponibles devraient être utilisés de façon intelligente pour le bien de tous.

Cela écrit, Camélia Ntoutoume Leclercq ne ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin. Toujours dans l’encouragement de l’excellence, il ne serait pas inutile que son collègue de l’Enseignement supérieur et elle-même, relèvent l’admissibilité au baccalauréat de 8/20 à 10/20. Objectif : cesser de former des Gabonais au rabais.

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