Le ministre camerounais de l’Economie, Alamine Ousmane Mey, souhaite relancer les pourparlers avec Washington en vue de rejoindre l’AGOA (African Growth and Opportunity Act), l’initiative commerciale phare des Etats-Unis avec l’Afrique, lancée en mai 2000 par Bill Clinton, alors chef de la Maison Blanche, pour booster le commerce entre les Etats-Unis et les pays africains. Le ministre camerounais a demandé la réintégration du Cameroun à l’AGOA, lors d’un événement organisé par le groupe de réflexion, Atlantic Council, en marge des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale à Washington.
Les Etats-Unis avaient retiré le Cameroun de la liste des pays bénéficiaires de l’AGOA fin 2019. L’AGOA est un dispositif qui permet aux pays éligibles d’exporter vers les Etats-Unis sans droit de douane, ce qui réduit, considérablement, le prix des produits concernés sur le marché américain et les rend, par conséquent, nettement, plus compétitifs que d’autres produits en provenance d’autres continents. Cette disposition de Bill Clinton est reconduite par chaque nouveau président des Etats-Unis, qu’il soit démocrate ou républicain, depuis son lancement. Des milliers de produits sont concernés issus des secteurs du pétrole, des textiles, de l’artisanat, ou de l’agriculture.
Pour Alamine Ousmane Mey, l’un des moyens pour éviter le surendettement du Cameroun serait de réintégrer l’AGOA.
L’ancien président, Donald Trump, avait suspendu le Cameroun du programme, fin 2019, en raison de « violations flagrantes et persistantes des droits de l’homme » par les forces de sécurité camerounaises. Il s’agit, ici, d’une appréciation de la façon dont les forces de sécurité camerounaises luttent contre le terrorisme dans les provinces du Nord-Ouest, du Sud-Ouest, de l’Extrême-Nord et de l’Est. Quatre régions sur dix sont affectées par des troubles et l’armée camerounaise y fait face, à sa manière, avec ses moyens. Les moyens utilisés n’étant pas du goût de l’administration Trump, elle a puni le Cameroun en l’excluant de l’AGOA.
Mais, la situation a beaucoup évolué sous l’administration Biden. En effet, la justice américaine vient de condamner, mardi, 4 avril, l’Américain d’origine camerounaise, Wilson Nuyila Tita, à « 63 mois de prison fédérale, suivis de deux ans de liberté surveillée » pour son soutien aux séparatistes camerounais. Agé de 47 ans, il a été condamné « pour complot, pour transport d’armes à feu avec numéro de série effacé, et pour la contrebande d’armes à feu et de munitions des Etats-Unis vers le Nigeria », selon le juge, Richard D. Bennett. « Les armes comprenaient des fusils de sniper, des fusils d’assaut SKS (certains avec des baïonnettes), d’autres fusils et plusieurs armes de poing. Il y avait 44 chargeurs de grande capacité, deux lunettes de visée et plus de 35.000 cartouches ». Pour brouiller les pistes, ces armes étaient acheminées vers le Nigeria, avant d’atterrir dans la zone anglophone du Cameroun. Wilson Nuyila Tita avait deux complices : Eric Fru Nji, 42 ans, de Fort Washington, Maryland, et Wilson Che Fonguh, 41 ans, de Bowie, Maryland, eux aussi co-accusés.
Ces trois personnes d’origine camerounaise collectaient de l’argent pour acheter des armes et des équipements militaires et les acheminaient auprès des terroristes qui font la guerre à l’armée camerounaise. Il est donc logique que les Etats-Unis allant jusqu’à mettre en prison ceux qui financent le terrorisme au Cameroun, Yaoundé demande à réintégrer l’AGOA. C’est le sens de la requête du ministre, Alamine Ousmane Mey, auprès de l’administration Biden.