CEMAC : L’ENVOL A LIBREVILLE CHEZ OMAR BONGO

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Après un démarrage plus que pénible, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) est en train de rattraper le temps perdu. Depuis bientôt trois ans, elle a fait aussi bien que sa consoeur de l’Afrique de l’Ouest, l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) aujourd’hui en panne à cause de la difficile crise que traverse la Côte d’Ivoire, pays qui pèse, lui tout seul, jusqu’à 40% de l’économie de cette zone.
A l’invitation du patriarche El Hadj Omar Bongo, les chefs d’Etat de la CEMAC ont consacré, à Libreville, le véritable envol de la CEMAC.

Ils étaient tous présents, le 23 janvier 2003, à Libreville, pour assister à la 4e session ordinaire de la Conférence des chefs d’Etat de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC).  » Initialement prévu à Bangui, notre Sommet se tient à Libreville du fait de contraintes indépendantes de nos volontés. Mais que ce soit à Bangui, Brazzaville, Malabo, N’Djamena, Yaoundé ou Libreville, l’important est de nous retrouver de manière régulière pour débattre des problèmes de notre sous-région dans le cadre de la CEMAC « . C’est par ce court message de bienvenue que le président El Hadj Omar Bongo a tenu à saluer ses homologues qui, pour la circonstance, étaient au grand complet, à savoir, Paul Biya du Cameroun, Denis Sassou Nguesso du Congo, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo de la Guinée Equatoriale, Idriss Déby du Tchad et Ange Félix Patassé, le président de la RCA et président en exercice de la CEMAC dont la capitale Bangui aurait pu être le lieu d’accueil de cette réunion au Sommet s’il n’y avait pas eu la tentative de coup d’état manqué du 25 octobre, fomenté par les troupes du général François Bozizé, actuellement réfugié en France. Avant de passer la parole à son frère de Centrafrique, le président du Gabon n’a pas manqué de lancer un appel à ses homologues pour qu’ensemble, ils conjuguent leurs  » efforts pour la paix et le développement, (et) pour la lutte contre la pauvreté et la maladie, plus particulièrement le VIH/SIDA « .

En reconnaissant l’impulsion donnée à la CEMAC par la présidence d’Obiang Nguema Mbasogo, le Centrafricain Ange Félix Patassé qui, après le mot de bienvenue du président hôte, a pris la parole en tant que président en exercice de la CEMAC, a commencé par « rappeler qu’il y a trois ans et demi, à Malabo, sous la présidence de notre frère et ami, le président Obiang Nguema Mbasogo, nous avons donné l’impulsion initiale à notre nouvelle communauté « .  » Ce sont assurément les directives de la déclaration historique de Malabo qui ont assuré le lancement effectif des activités de la CEMAC « , a-t-il poursuivi. C’est vrai qu’après la présidence équato-guinéenne, les présidents Idriss Déby du Tchad et Paul Biya du Cameroun, ont, à leur tour, su prendre la relève, en tant que présidents en exercice de la CEMAC, pour concrétiser un peu plus les rêves de cette organisation commune, fer de lance pour une véritable intégration et maillon fort de l’Union africaine.

Que peut-on retenir de la présidence Patassé en matière de programmes d’intégration sous-régionale ?

En dépit des difficultés incontestables, la CEMAC, tout compte fait, a fonctionné de manière satisfaisante. En effet, les quatre institutions qui la composent, à savoir, l’Union économique, l’Union monétaire, la Commission interparlementaire et la Cour de justice, ont, de l’avis du président en exercice, bien rempli leurs missions tout au long de l’exercice 2002. Par ailleurs, les organismes spécialisés qui sont affiliés aux deux premières ont aussi normalement fonctionné normalement. Toutefois, le président centrafricain n’a pas manqué de noter que la vision stratégique qui anime la CEMAC devrait être étroitement liée à l’idée de mouvement :  » Mouvement des biens et des capitaux pour attirer les investisseurs au bénéfice de l’économie de nos pays et de notre région ; mouvement des personnes, afin que les esprits, les talents et les compétences s’entrecroisent, s’interpénètrent pour revitaliser davantage notre génie créateur, et magnifier notre fondement culturel à tous les niveaux, afin d’aboutir à une véritable indépendance dans l’interdépendance entre nos peuples, elle-même gage de paix, de stabilité et de progrès « , a-t-il indiqué. C’est pourquoi il s’est félicité de la mise en circulation du passeport CEMAC qui est un document de voyage dont le but est de faciliter la libre circulation des opérateurs économiques au niveau de la sous-région. On se souvient que c’est pendant la Conférence des chefs d’Etat de la CEMAC à N’Djamena en décembre 2000 que cette décision de mise en circulation du passeport CEMAC fut prise.

Prenant la parole à son tour, le secrétaire exécutif de la CEMAC, le Camerounais Jean Nkueté, s’est appesanti non seulement sur les acquis déjà palpables de l’organisation, mais aussi sur les défis auxquels elle était appelée à faire face dans les mois ou années à venir.

Premier défi de taille, la finalisation du dossier de la compagnie communautaire de transport aérien afin qu’elle voit le jour avant la fin de l’année en cours. Outre le partenaire technique à trouver, les chefs d’Etat de la CEMAC devront se déterminer rapidement sur les objectifs qu’ils entendent lui assigner et les moyens qu’ils peuvent lui allouer pour y faire face. Cette compagnie sera-t-elle sous-régionale en ce sens que ses vols se limiteront-ils à désenclaver les pays de la sous-région ? Sera-t-elle continentale ou devra-t-elle desservir aussi les autres continents ? Sera-t-elle la fusion des grandes compagnies sous-régionales existantes à savoir Air Gabon et Cameroon Airlines notamment, etc. ? Bref, il existe pas mal de questions encore sans réponse qui rendent sceptiques certains observateurs qui ne manquent de qualifier ce projet de  » véritable serpent de mer « . Pourtant avec la disparition de la multinationale Air Afrique, le rentabilité d’une telle compagnie ne devrait pas se poser d’autant plus que la sous-région de l’Afrique centrale est celle où on enregistre les plus grands besoins en matière de transport aérien.

La CEMAC, selon son secrétaire exécutif, a également mis en œuvre le projet de renforcement des capacités avec le soutien de l’ACBF. Objectif : améliorer la participation des Etats de la sous-région aux grandes négociations commerciales avec l’Union européenne et d’autres organismes similaires. Dans le même ordre d’idée, l’ISSEA de Yaoundé et l’ISTA de Libreville, vont être dotés des seconds cycles supérieurs destinés à former respectivement des ingénieurs statisticiens économistes et des analystes de projets de haut niveau.

Les préparatifs pour les négociations des accords de partenariat économique avec l’Union économique se poursuivent et l’ouverture de celles-ci au niveau régional est prévue pour septembre 2003. Par ailleurs, le dossier CICOS a finalement abouti et la mise en place définitive de l’institution va intervenir dans les tout prochains mois pour faciliter la circulation dans l’important axe fluvial Oubangui-Sangha-Congo.

La première pierre de la construction du siège du parlement à Malabo ayant été déjà posée par le président en exercice, les dispositions sont prises pour le démarrage des travaux. Sur le plan institutionnel, on constate aussi des avancées notables. C’est ainsi que le projet de la convention du parlement déjà adopté par les autres instances est soumis à l’approbation des chefs d’Etat. De même, devenue totalement opérationnelle, la Cour de justice poursuit la réalisation de ses diverses activités à travers la Chambre judiciaire et la Chambre de comptes. Au plan monétaire, les réalisations les plus marquantes concernent :

  • l’exécution du programme sous-régional de redressement économique et financier,
  • la mise en place du cadre réglementaire de la Bourse de valeurs mobilières de l’Afrique centrale,
  • la réforme des systèmes de paiement et des règlements et la finalisation du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux,
  • la mise en place de la réglementation de la micro-finance,
  • le renforcement du contrôle en vue de la consolidation de l’assainissement du système bancaire,
  • l’organisation des cérémonies de commémoration du 30e anniversaire de la BEAC à Libreville.

En ce qui concerne le secteur réel ou non monétaire, d’importantes actions ont été conduites dans des domaines divers :

  • le nouveau mécanisme de financement, avec le Fonds de développement de la Communauté dont l’objectif principal est d’assurer le financement des projets intégrateurs et la compensation des pertes de recettes dues à l’application des réformes fiscalo-douanières est déjà opérationnelle dans tous les Etats. Les premiers résultats de ce mode de financement dont dépend la survie de la Communauté sont encourageants ;
  • l’aménagement du cadre macro économique se poursuit à travers les opérations de réformes fiscalo-douanières visant l’harmonisation et la modernisation des instruments fiscalo-douaniers. Les principaux travaux portent sur l’élimination de la double imposition, le règlement sur l’assistance mutuelle administrative en matière douanière, fiscale et financière, la réforme de l’imposition personnelle et de la fiscalité de l’épargne qui prend en compte la dimension de la bourse de valeurs mobilières de l’Afrique centrale ;
  • la surveillance multilatérale dont le processus se poursuit normalement constitue un des dossiers prioritaires conduit avec attention particulière, car un processus d’intégration économique et monétaire repose obligatoirement sur un certain nombre de principes parmi lesquels la convergence des politiques économiques des Etats membres et partant le respect des règles précises de comportement préétablies. Dans cette perspective, les actions particulièrement conduites concernent les grandes orientations de politiques macro-économiques, les programmes triennaux de convergence et les études prospectives ;
  • le dossier de la sécurité alimentaire est finalisé pour être soumis aux bailleurs de fonds internationaux dont la Banque africaine de développement (BAD) avant la fin de ce mois de février.

Les résultats combinés de ces efforts avec ceux réalisés dans chaque Etat pris individuellement auront, selon de récentes analyses, imprimé à la CEMAC une croissance d’environ 4,7% en termes réels contre près de 5,7% en l’an 2001, une plus grande consolidation de la monnaie avec un taux de couverture de plus de 80% et un assainissement continu des finances publiques.

Aristide Koné

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