En effet, Brazzaville est, déjà, en état de siège. Précisément, dans les quartiers Sud comme Bakongo et Makélékélé. Tout se passe comme si l’attaque de la capitale congolaise était imminente. Des murets de sacs de sables sur certains ronds points, montrent à la population apeurée que le pire est à venir et qu’il n’est plus exclu qu’elle revive le même calvaire que celui de la guerre de 1998-1999.
Bien que préoccupé par cette situation, Sassou-Nguesso a été obligé de se rendre à Oyo mardi pour assister à l’anniversaire de la mort de sa maman, Madame Mouébara, survenue, en 1982, à Paris. Mais, en vérité, le dictateur n’a pas le cœur en place. Pendant que son corps dort à Oyo, son esprit rôde dans les faubourgs de Brazzaville et dans le département du Pool où un génocide en vase clos est en train de se commettre. Plusieurs charniers y ont été creusés pour dissimuler des dizaines de corps que l’état-major ne pouvait remettre aux familles, de peur de provoquer la colère de ces dernières. On sait, d’autre part, que le fleuve Djoué a charrié plusieurs corps de personnes tuées dans le Pool, que le pouvoir voulait cacher. Des dossiers sur ce génocide sont d’ailleurs en train d’être constitués, avec des photos très parlantes à l’appui sous la direction de l’intraitable Me Maurice Massengo-Tiassé. Une enquête de la CPI, sur les massacres des populations civiles au Congo-Brazzaville, n’est plus à exclure. Des albums photos montrent le degré d’horreur que vivent les populations civiles du Pool depuis un an. Dans un silence de cathédrale de la communauté internationale. En septembre dernier, déjà, Me Tiassé, en sa qualité de deuxième vice-président de la Commission nationale des droits de l’homme du Congo, avait pu remettre un rapport d’une gravité extrêmement insolente, à la Commission des Nations-Unies pour les droits de l’homme, à Genève, sur les massacres du président, Sassou Nguesso, contre les populations civiles. Ce même rapport a, également, atterri à la CPI où il suit, toujours, son cours.
Après l’assassinat par balle, dans le Pool, cette semaine, d’une petite fille de trois ans (dont la photo a fait le tour du monde), à cause, semble-t-il, d’une « balle perdue » de la police, voici une autre photo d’un enfant du même âge à qui les soldats de Sassou ont crevé les deux yeux (notre photo). Pour punir son père suspecté d’être un milicien de Ntumi ? Il faut noter que le dictateur compte des dizaines et des dizaines de petits-enfants du même âge, qui, eux, ne manquent de rien, et dont le mot souffrance est inconnu de leur vocabulaire.
L’horreur a atteint son paroxysme dans le pays. Les soldats du dictateur (ce n’est plus un secret) ont le moral dans les chaussettes. Ils refusent de plus en plus de combattre d’autant plus qu’ils ne savent pas pourquoi on les envoie faire la guerre contre leurs frères du Pool. Sassou doit, très vite, résoudre cette équation d’une armée qui n’en est plus une. Sinon, lui et ses parents vont se surprendre en train de traverser le fleuve Congo à bord des pirogues de fortune. Dans un sauve qui peut sans nom.