S’il y avait une échelle de Richter de la violence, la République du Congo se situerait au niveau 9, c’est à dire, la position la plus catastrophique : assassinats, répressions violentes, guerres civiles, coups d’états réels ou virtuels, ont émaillé depuis l’indépendance, acquise en 1960, l’histoire politique de cette ancienne colonie française. Avec, pour corollaire, des milliers de morts et une pauvreté chronique dont le Congo tarde à se remettre. Tous ces drames avaient pour commun dénominateur la prise du pouvoir et/ou sa conservation.
Pour remédier de façon définitive à cette fatalité, la nation s’est retrouvée entière, sans exclusive et de façon solennelle, en une Conférence nationale pour fixer les règles devant permettre à la vie politique de se redéployer sur des bases plus démocratiques, histoire de conjuguer les efforts pour affronter les enjeux de développement.
Ces règles du jeu, acceptées par tous, furent enchâssées dans la Constitution de 1992. Parmi ces règles consensuelles figurent, notamment, le multipartisme, les élections libres, le droit à la désobéissance civile, et surtout, une limitation, à deux, du nombre des mandats du président de la République, garantissant l’alternance et un renouvellement à la tête de l’Etat. Après la prise de pouvoir par les armes de l’actuel président de la République, les rédacteurs de la Constitution élaborée en 2002 n’osèrent pas éliminer ces dispositions, devenues le socle des acquis de la Conférence nationale. Ils les reconduisirent intégralement. Or voilà que sans raison aucune, avec une mauvaise foi évidente, le président de la République décide unilatéralement de changer les règles du jeu. Les acquis si chèrement mis en place à la Conférence nationale sont donc remis en cause. Après avoir cumulé plus de trente années à la tête de l’Etat, le président, Denis Sassou Nguesso, entend jouer les prolongations et se donner la possibilité de rempiler pour un nouveau mandat, renouvelable deux fois.
Faute d’alternance démocratique et d’un renouvellement en douceur au sommet de l’Etat, le Congo risque de renouer avec ses vieux démons : l’instabilité, la lutte acharnée pour le pouvoir, avec son lot de victimes.
Dans le simulacre de référendum du 25 octobre 2015 au Congo, il ne s’agit pas d’exercer son devoir de citoyen en allant voter, librement, en toute conscience, pour ou contre un texte de loi comme l’ont seriné les partisans du changement de Constitution. Il s’agit de donner un vernis démocratique à un exercice frauduleux dont le résultat est connu d’avance. Toutes les élections organisées par le Parti congolais du travail (ex-parti unique) depuis des décennies ont toujours été truquées.
La sagesse aurait voulu que le président de la République retire son projet de référendum. Malheureusement, il ne l’a pas fait. Un adage africain dit qu’il ne faut pas faire son temps et le temps de ses enfants. Il faudrait qu’il comprenne que, maintenant, c’est le temps de ses enfants.
Aller voter non, n’aurait rien changé, les urnes congolaises sous le règne du PCT ayant un pouvoir miraculeux : un bulletin NON qui y entre, en ressort transformé en OUI. Inutile donc d’aller voter. Boycotter non plus, n’aurait servi à rien, la liste électorale ayant été faite de telle sorte que le pouvoir trouve, toujours, le nombre d’électeurs qu’il lui faut. Qui ne sait pas, par exemple, que Impfondo, au Nord du pays, est plus peuplé que Dolisie au Sud, d’après le fichier électoral du PCT ?
La seule solution aurait été de faire en sorte que ce scrutin n’eût pas lieu. C’est, là, tout l’enjeu de cette désobéissance civile.
Contacts : Emmanuel Dongala, écrivain, Richard B. Fisher Chair in Natural Sciences Emeritus, Bard College (Massachussets, USA), mail : edongala
Noël Magloire Ndoba, économiste universitaire, mail : bantuonline2009@gmail.com
Mawawa Mâwa-Kiese, physicien, edpaari@gmail.com
Signataires
Benjamin Ntoungamani
Ferdinand Justice Moukala
Colonel Simon Moussounda
Djess dia Moungouassi