La diplomatie américaine s’est dite dans un communiqué « profondément déçue par le processus électoral imparfait en République du Congo ». Et de poursuivre : « Des irrégularités généralisées et des arrestations de soutiens de l’opposition dans la foulée des élections ont marqué un vote qui a pour le reste été pacifique ».
Le secrétariat d’Etat a exhorté le Congo à « corriger ces nombreuses déficiences avant de programmer les élections législatives en vue d’apporter une crédibilité aux processus électoraux à venir ».
Une telle posture distante des Etats-Unis est, plutôt, réconfortante pour le dictateur. On a, vraiment, la preuve qu’il a dépassé tout le monde.
De son côté, la France, de la bouche de son ambassadeur au Congo, Jean-Pierre Vidon, de nature pas grand bavard, a coupé court à toute rumeur en affirmant que Paris n’aura pas une réaction propre, mais collective au sein de l’Union européenne (UE). Après avoir pris, ouvertement, position en faveur du référendum qui modifiait la constitution afin de faire de Sassou un président à vie, malgré ses déclarations au Sénégal et en République démocratique du Congo, le président « normal » avait fait un rétropédalage resté mémorable dans les annales de la politique africaine. Mais, il était tard, ses propos de la veille ayant stupéfié l’Afrique. Le Congo-Brazzaville est, donc, un dossier qui brûle les doigts à Paris, où le dictateur tiendrait certains dirigeants français par la barbichette. Cela, il sait très bien le faire, grâce à son tiroir-caisse.
Le 7 avril, justement, l’UE a pondu son communiqué sur l’élection présidentielle au Congo. Très critique (c’est le moins qu’elle avait à faire), elle a reconnu d’emblée que « Le processus post-électoral a été marqué par des atteintes aux droits de l’homme, arrestations, intimidations de l’opposition et des médias, (ce qui) met en question la crédibilité des résultats ». Selon Bruxelles, « la participation en nombre des candidats de l’opposition et des électeurs témoigne de l’aspiration démocratique du peuple congolais », mais l’UE indexe, sans ménagement, « les sérieuses insuffisances de la gouvernance électorale déjà soulignées dans (sa) déclaration du 19 février ». Tout est dit. Mais pourquoi ne demande-t-elle pas l’annulation ou le ré-comptage des bulletins de cette présidentielle, comme l’opposition, pour être logique avec elle-même ? Pas de réponse, pour l’instant, à Bruxelles. Ni même à Washington. Encore moins à New York aux Nations-Unies.
Pour ne pas cautionner les fraudes massives du régime congolais, l’Union européenne et les Américains s’étaient abstenus d’envoyer des observateurs en vue de la supervision de cette présidentielle. Une telle initiative se serait apparentée à une manœuvre visant à couvrir la fraude de Sassou qui, manifestement, ne voulait pas d’une présidentielle transparente, de peur d’être éliminée dès le premier tour.
La question la plus importante est : « Maintenant on fait quoi » ?
Le Congo est bloqué, ce qui pousse, le dictateur à se livrer à son sport favori : les massacres des populations civiles surtout du Sud du Congo, au vu et au su de toute la communauté internationale, qui a baissé les bras sans se soucier des accusations ayant trait à la non-assistance à pays en danger dont elle fait déjà l’objet. Accusations qui deviendront insistantes dans les jours à venir, si elle ne se bouge pas.
Après avoir bombardé plusieurs localités du département du Pool, le dictateur a fait encercler par la police, l’armée et ses miliciens, les résidences d’André Okombi Salissa et du général Jean Marie Michel Mokoko. Ce dernier s’est même vu retirer les militaires qui étaient affectés à sa garde. Il ne reste plus qu’avec son cuisinier dans sa grande maison, actuellement, privée de courant électrique qu’a fait couper Sassou, sans se soucier des qu’en dira-t-on. Conséquence : Mokoko ne peut même plus regarder la télé ni charger son portable tandis que le filtrage des personnes qui lui rendent visite est digne d’un régime du goulag. Si Sassou voulait l’asphyxier, voire, « l’assassiner », comme il se chuchote, à Brazzaville, qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Malfaiteur né, le sanguinaire aime commettre ses forfaits dans la nuit. On se souvient de la proclamation des résultats de la présidentielle à 3h00 du matin, pendant que Brazzaville dormait, après avoir pris le soin de poster 5.000 militaires, policiers et miliciens, dans des lieux stratégiques de la ville. En se réveillant au petit matin, les Brazzavillois étaient mis devant le fait accompli, interdits de manifester à cause de la dissuasive présence militaire et policière. Même Pyongyang ne fait pire.
Okombi et Mokoko, tous deux du Nord comme Sassou, sont accusés par le dictateur d’avoir refusé de reconnaître sa victoire, comme l’ont déjà fait les deux maillons faibles du Sud, Guy Brice Parfait Kolelas et Parfait Tsaty Mabiala. Le général Mokoko dit à qui veut l’entendre que Sassou peut envoyer le tuer à tout moment. Voilà pourquoi il a commencé par faire le vide autour de lui. La communauté internationale est, donc, avertie. Si un cheveu de Mokoko manquait à sa petite tignasse, demain, on saurait auprès de qui s’en prendre. Il en est de même d’Okombi Salissa.
La crise est à son comble : Sassou a perdu les élections et s’est auto-déclaré vainqueur. Pékin a reconnu sa victoire hier, en envoyant son ambassadeur le féliciter à Oyo. Selon certaines rumeurs, le dictateur aurait choisi la Chine comme pays d’accueil s’il perdait le pouvoir.
Sassou détient une victoire issue d’une fraude industrielle. L’IDC-FROCAD, de son côté, maintient la pression en faisant savoir qu’il y avait un deuxième tour entre Kolelas et Mokoko, selon son propre décompte, et que Sassou, le mal aimé du Congo, n’est sorti que cinquième, respectivement, après Kolelas, Mokoko, Okombi et Mabiala.
Prenant le relai de Kolelas, d’Okombi et de Mokoko, l’IDC et le FROCAD, dans leur totalité, demandent, avec insistance, la médiation de la communauté internationale, avec en premier lieu, les Nations-Unies, l’Union européenne, l’Union africaine, et Washington.