Ce qui n’était seulement qu’une rumeur, est-il en train de se confirmer ? Le 3e mandat d’Alassane Ouattara comme président de la République n’est plus un sujet tabou. Bien sûr que l’intéressé l’a, toujours, démenti : « C’est mon dernier mandat », a souvent déclaré le président quand la question lui est posée. Mais, reste qu’il n’est pas seul, et ne fait pas ce qu’il veut, tout seul. Il doit composer avec un entourage très exigeant qui n’entend pas perdre, aussi facilement, ses privilèges. En effet, les hiérarques du RDR (Rassemblement des républicains, le parti présidentiel), se sont, tous, embourgeoisés. Vont-ils laisser le gâteau à leurs ennemis-amis du PDCI-RDA (Parti démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement démocratique africain) du président, Henri Konan Bédié, lui aussi, pris dans un étau par ses propres cadres du parti ? La Côte d’Ivoire risque de proposer, dans les mois à venir, un spectacle ahurissant au regard des appétits du pouvoir des uns et des autres. Alassane Ouattara pourrait aller au 3e mandat (à pas forcés) pour préserver l’unité des Houphouétistes ou ce qu’il en restera, tandis qu’Henri Konan Bédié qui aspire aussi à revenir au pouvoir (ou à y placer quelqu’un de très proche) fera tout de son côté pour que le PDCI retrouve le pouvoir qu’il avait perdu en décembre 1999. C’est plus qu’une question d’honneur pour lui.
C’est pour cette raison que le président ivoirien, Alassane Ouattara, a nommé, mardi, 10 juillet, un nouveau gouvernement « de combat avant la présidentielle de 2020 », largement, dominé par sa formation politique, et ouvert aux personnalités favorables à son projet de « grand parti unifié ».
Avant les élections municipales et régionales prévues en septembre, selon une source proche de la présidence, et surtout, deux ans avant la présidentielle qui mobilise, déjà, toute la scène politique, le RDR cherche à élargir ses soutiens, faute d’un accord avec son grand allié, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), pour former un parti unifié.
Dans un cabinet plus fourni – 41 ministres et secrétaires d’Etat, contre 34 pour le précédent – mais sans grand changement, le président a reconduit les barons du RDR : Amadou Gon Coulibaly comme premier ministre, Hamed Bakayoko à la Défense, Marcel Amon Tanoh aux Affaires étrangères et Kandia Kamara à l’Education nationale.
Albert Toikeusse Mabri, président de l’Union pour la démocratie et la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI), est de retour au cabinet, avec le portefeuille de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
M. Toikeusse et son parti se sont prononcés en mai pour la formation du parti unifié, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), voulu par le président Ouattara. M. Toikeusse avait dû sortir du gouvernement en 2016 pour avoir refusé une alliance électorale avec le RDR.
M. Ouattara a gardé au gouvernement les ministres PDCI qui se sont déclarés favorables au RHDP, notamment, Kobenan Kouassi Adjoumani qui a lancé un mouvement dissident à l’intérieur de son parti, voulant rassembler les pro-RHDP. M. Adjoumani conserve son portefeuille des Ressources animales et halieutiques.
Le gouvernement voit l’entrée notable d’un vice-président du PDCI, Eugène Aouélé Aka, comme ministre de la Santé.
Le président du PDCI, Henri Konan Bédié (à la demande de la base de son parti), s’oppose à la création du parti unifié, ce qui provoque une crise au sein de la coalition au pouvoir, et qui a suscité la dissolution du gouvernement.
Bédié réclame à M. Ouattara un retour d’ascenseur pour la présidentielle de 2020 : que le RDR soutienne un candidat unique issu du PDCI, après que le PDCI eut soutenu M. Ouattara aux scrutins de 2010 et de 2015. Mais le RDR refuse.