Beaucoup se rappelleront toujours cette nuit du 18 au 19 septembre 2002. Alors que le président, Laurent Gbagbo, était en visite à Rome, attendant d’être reçu par le pape, Jean-Paul II, la Côte d’Ivoire était attaquée et endeuillée par des soldats en rupture de ban réfugiés au Burkina Faso.
Partis de ce pays voisin et aidés par des mercenaires burkinabè, maliens, libériens et sierra-léonais, Ibrahim Coulibaly dit IB, Tuo Fozié, Chérif Ousmane, Koné Zakaria et d’autres, mettaient le pays à feu et à sang. Environ, 300 personnes perdirent la vie au cours de cette nuit.
Cette attaque était d’autant plus absurde que Alassane Dramane Ouattara (ADO), le patron de la rébellion, avait accepté, quelques semaines plus tôt, de faire partie du gouvernement du premier ministre, Pascal Affi N’Guessan.
La France était-elle derrière cette tentative de coup d’état ? Oui et on le sut lorsque Michèle Alliot-Marie, la ministre de la Défense, parla de guerre ivoiro-ivoirienne pour justifier le refus de son pays d’appliquer l’accord de défense le liant à Abidjan, lorsque Dominique de Villepin afficha une certaine familiarité avec les conjurés lors de sa visite à Bouaké, lorsque les discussions entre l’Etat ivoirien et les rebelles furent déplacées par le gouvernement français de Lomé à Marcoussis en France.
Plus tard, dans le livre écrit pour lui par le journaliste béninois, Serge Daniel, Guillaume Soro expliquera que lui et ses camarades avaient pris les armes parce qu’ils ne supportaient pas l’exclusion d’ADO de l’élection d’octobre 2000, parce que les Nordistes étaient victimes de discrimination, parce qu’il y avait une dictature en Côte d’Ivoire, etc. Mais, ironie du sort, Soro est exclu du jeu politique ivoirien par ADO depuis février 2019 et les Ivoiriens n’ont jamais été autant discriminés que sous ce régime qui pratique ouvertement le rattrapage ethnique après avoir accusé Konan Bédié et Laurent Gbagbo d’exclure une partie des Ivoiriens.
Soro, qui devrait maintenant savoir qui pratique vraiment l’exclusion et la dictature, se rebellera-t-il une seconde fois ? Lui qui prétend être contre l’injustice et la tyrannie, prendra-t-il ses responsabilités ? Si oui, quand le fera-t-il car le pays va à vau-l’eau et la situation devient de plus en plus intenable pour la majorité des Ivoiriens ?
Jean-Claude DJEREKE
est professeur de littérature à l’Université de Temple (Etats-Unis).