Les Emirats arabes-unis viennent d’acter un rapprochement économique majeur avec la République centrafricaine. A en croire les déclarations des équipes de Mohammed Ben Zayed et de Faustin-Archange Touadéra, cette entente devrait hisser les transactions bilatérales entre les deux pays à un milliard de dollars dans les cinq, voire, sept prochaines années. Bangui et Abu Dhabi ayant mutuellement convenu d’éliminer la majorité de leurs tarifs douaniers. Rien à redire, a priori, de ce deal, jusqu’à ce qu’il soit mis en parallèle au dossier du conflit soudanais.
En décembre dernier, les Emirats arabes-unis s’étaient engagés auprès des Etats-Unis à arrêter de fournir de l’arsenal militaire au général Hemedti. Cette décision faisait suite à l’introduction, un mois plus tôt, d’un projet de loi par le sénateur, Chris Van Hollen, visant à suspendre la vente d’armes à l’Etat du Golfe, si celui-ci ne garantissait pas qu’elles ne finiraient pas dans les mains des Forces de soutien rapide (FSR). Face à une telle menace, Abu Dhabi avait été obligée de se ranger, après avoir longtemps nié en bloc toute implication dans l’instabilité au Soudan (sur notre photo, le cheikh Mohammed Ben Zayed et le président Faustin-Archange Touadéra).
Désormais, surveillés par les Américains, les Emiratis semblent avoir changé de stratégie et ont identifié les Centrafricains comme pouvant être les parfaits intermédiaires pour continuer de soutenir leur allié, Hemedti. Ce qui suggère donc que les accords bilatéraux conclus ce mois entre Bangui et Abu Dhabi ne sont qu’un trompe-l’œil, dont le but est d’endormir les consciences. En réalité, si la capitale de la petite nation pétrolière prête autant main forte au leader des FSR, c’est principalement à cause de l’or illicite auquel ce dernier lui donne accès.

Après avoir surpris, en fin 2024, en prêtant 500 millions de dollars au maréchal-président, Mahamat Idriss Déby Itno, à taux réduit pour relancer l’économie du Tchad, le président émirati, Mohammed Ben Zayed, récidive, cette fois, de manière plus mesurée, avec Faustin-Archange Touadéra. Ces événements quasi-successifs confirment sa détermination à poursuivre sa politique de déstabilisation du Soudan, dans un objectif plus large d’accroître son influence en Afrique. En bref, un autre acteur externe à qui les Africains doivent affirmer leur souveraineté.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)