Comme nombre de pays européens, l’Espagne compte sur son sol de nombreux sans-papiers, et comme dans nombre de pays européens, des associations militent pour leur régularisation. Un collectif de défense des migrants, à la manœuvre depuis trois ans, pourrait parvenir à ses fins. Un véritable soulagement pour tout le monde.
Le Collectif n’y est pas allé de main morte. Il a soumis un texte assorti d’une pétition signée par plus de 700.000 citoyens, 900 associations et par… l’église, aux députés espagnols pour demander la mise en œuvre d’un « mécanisme permettant » aux immigrés « de sortir d’une situation d’invisibilité et de « non-droit » ». Ce texte, approuvé par la majorité des députés locaux (310 voix favorables et 33 voix contre), doit, désormais, être soumis à des amendements en vue d’un vote de sa version définitive.
S’il est adopté (comme on le pense), il devrait rendre les démarches administratives de régularisation moins lourdes et il allégerait les critères d’éligibilité. L’Espagne, qui compte, selon le Collectif, entre « 390.000 et 470.000 personnes en situation irrégulière », dont un tiers de mineurs, en serait à sa troisième campagne de régularisation massive en 25 ans. En 2000, 137.000 immigrés illégaux avaient obtenu des papiers, et en 2005, ils étaient près de 600.000 à avoir été régularisés.
Pour justifier leur démarche, les défenseurs du texte affirment que l’Espagne manque de main-d’œuvre, ce qui est vrai, bien que le taux de chômage espagnol atteint 11,5%. En fait, il s’agit d’une inadéquation entre les besoins des entreprises et la main-d’oeuvre disponible. De plus, les Espagnols réchignent quand on leur propose des emplois bas de gamme.
Si l’on en croit les militants, une fois régularisés, les migrants pourraient postuler dans ces filières en besoin. Ils pourraient, aussi, être un atout démographique. La population transpyrénéenne est vieillissante, son taux de fécondité est inférieur à deux enfants par femme depuis le milieu des années 1980 (1,19 en 2023), à cause d’une absence de « politique familiale digne de ce nom comme dans les pays scandinaves ». « L’arrivée de jeunes migrants et de migrants en âge de procréer pourrait artificiellement rajeunir la population », notent les observateurs.
C’est ce que l’ancien président-poète sénégalais, Léopold Sédar Senghor, appelait la « civilisation de l’universel » avec un « métissage culturel » assumé. A l’époque, on s’en moquait alors qu’il avait vu juste, avant tout le monde. La preuve, même les racistes en Europe, aujourd’hui, n’échappent plus aux mélanges. Bref, la notion de village planétaire n’a jamais aussi bien porté son nom. Car, au final, le monde, avec ses cinq continents, n’est qu’un grand village planétaire.