A quatre jours de l’élection présidentielle américaine qui aura lieu le 5 novembre, même ceux qui disent savoir lire dans une boule de cristal, restent évasifs. Preuve qu’ils ont raison de ne pas trop se hazarder, Donald Trump n’a presque rien dit sur les « pays de merde », expression consacrée en 2018 pour expliquer son désintérêt total pour un continent que sa concurrente aura visité en 2023 ( Joe Biden, lui, compte visiter l’Angola en décembre si Trump ne conteste pas l’élection de Harris), montrant une certaine différence d’approche.
Ce qui devrait nous intéresser c’est le cap économique que suivront Donald Trump ou Kamal Harris (notre photo) s’ils sont élus, et les conséquences qui en découleraient pour le monde, et l’Afrique. On sait à peu près ce que peut penser le candidat républicain dont le programme économique, élaboré par de grands économistes, bouleverserait la planète, avec comme ambition de marginaliser encore plus l’Europe et concentrer les efforts destinés à creuser les écarts avec la Chine (actuellement distancée) et assurer un rapprochement notable avec l’Inde, pays le plus peuplé du monde, qui s’accoquine dans les BRICS (Brésil, Russie Inde, Chine, Afrique du Sud), avec comme principal risque de contrebalancer l’influence occidentale dans le monde. Ceci n’est pas un moindre risque pour Trump qui souhaite, toujours et encore plus, une Amérique triomphante comme centre de la terre.
Même s’il va conserver l’AGOA (African Growth and Opportunity Act) mise en place par l’administration Clinton, en mai 2000, pour permettre l’admission des produits africains sur le marché américain sans droits de douane afin de les rendre compétitifs, Donald Trump va relancer des mesures protectionnistes, qui avaient si bien réussi en 2017, à coups de décrets présidentiels. Avec moins d’impôts et une amélioration des salaires… C’est ce projet de taxer les importations (pour relancer la production et l’emploi américains) qui est de loin le plus révolutionnaire. Il s’agirait d’une taxe de 10 % à 25 % sur la totalité des produits importés (sauf probablement ceux concernés par l’AGOA ! La fin programmée du mondialisme, du multilatéralisme, à l’heure où Volkswagen, qui fit longtemps son miel aux USA, annonce mettre fin à son contrat de garantie de l’emploi, préparer des milliers de licenciements et la fermeture de trois usines en Allemagne…
L’Europe sera fortement impactée et Bruxelles, sous la pression des Etats membres, devra reconsidérer (est déjà en train de reconsidérer) sa politique d’ouverture des frontières par la prise des mesures plus coercitives par Ursula von der Leyen, présidente nouvellement réélue de la Commission européenne. La politique économique sous Trump privilégierait le marché intérieur au détriment de l’extérieur. Puisqu’il n’aurait que 4 ans et pas un an de plus à la Maison Blanche où il a déjà été locataire de 2016 à 2020, il mettrait des bouchées doubles quitte à faire souffrir les partenaires traditionnels des Etats-Unis au sein du G7 et de l’OCDE pour une « America First » comme cela n’avait jamais été le cas auparavant.
L’Afrique avec ses « pays de merde » serait concernée par de telles restrictions. Ambitionnant de terminer son mur de 3.000 kilomètres (seuls 700 kilomètres avaient été construits avant l’arrivée de Joe Biden qui a stoppé toute poursuite des travaux dans ce sens), on s’acheminera, vraisemblablement, vers une politique restrictive de la délivrance des visas africains pour entrer sur le sol américain.
La Chine, la Russie, notamment, se frottent les mains de savoir qu’elles auraient les coudées franches pour coopérer et dresser des partenariats avec les « pays de merde » alors que l’administration Biden, au moins, dans les discours, disait le contraire. Le voyage de Kamala Harris au Ghana, en Tanzanie et en Zambie, en 2023, avait, surtout, critiqué la Chine de favoriser l’endettement pour mettre les « pays de merde » sous sa coupe. Et que l’Amérique ne laisserait pas la Chine le faire.
Sur le plan de la lutte contre le terrorisme et le djihadisme, Donald Trump a déclaré urbi et orbi que l’Etat islamique était une création de l’OTAN sous l’administration Obama, et que l’autre principal objectif s’il était élu, serait l’accélération du retour à la maison des soldats américains positionnés dans de nombreuses bases militaires de par le monde. Une vision stratégique complètement différente de celle développée par les démocrates qui considèrent Oncle Sam comme le Super Gendarme du monde. A tort d’ailleurs.
Jamais, en temps de paix, le monde n’avait connu une échéance aussi importante que le scrutin américain du 5 novembre 2024.