Après avoir ouvert plusieurs fronts dans le monde, aussi bien, sur le plan commercial (Chine, Europe) que militaire (Russie, Iran, Corée du Nord, etc.), Donald Trump voit qu’il lui est impossible de poursuivre plusieurs lièvres à la fois, bien qu’il soit le chef de la superpuissance mondiale, les Etats-Unis. Après tout, il n’est pas le maître de l’univers et ses menaces ne valent que pour ceux qui les prennent vraiment au sérieux. A preuve, la Corée du Nord a prévenu les Etats-Unis qu’elle envisagerait « sérieusement » de revenir à sa stratégie politique de développement de son arsenal nucléaire si les sanctions économiques infligées à son pays n’étaient pas levées. Habitué à obtenir ce qu’il veut de ses interlocuteurs après les avoir menacés, Trump se rend compte qu’il n’en sera pas de même avec le « leader bien aimé », Kim Jung-un. Du coup, son gouvernement se remet à travailler à la tenue d’une nouvelle rencontre au sommet courant 2019. Trump n’a plus, totalement, son destin à main, à deux années du renouvellement de son bail à la Maison blanche. Tout faux pas lui est interdit, surtout, chez la turbulente Corée du Nord.
Pendant des années, Pyongyang a mené une politique dite du « byungjin », ou « développement simultané » de ses capacités nucléaires et de son économie.
En avril, le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un, avait annoncé que la quête pour se doter de l’arme nucléaire était terminée et que le Nord se concentrerait, désormais, « sur la construction économique socialiste ». La péninsule connaît un « nouveau climat de détente et de paix », avait-il expliqué.
Dans un communiqué, le ministère nord-coréen des Affaires étrangères a déclaré que Pyongyang pourrait revenir à la politique du « byungjin » si les Etats-Unis ne changeaient pas d’attitude en matière de sanctions.
« Le mot +byungjin+ pourrait refaire son apparition et un changement de politique pourrait être sérieusement envisagé », selon ce texte publié, vendredi, 3 novembre, soir, par l’agence officielle KCNA.
Lors de leur sommet historique à Singapour en juin, le « leader bien aimé » et le président, Donald Trump, avaient signé une déclaration vague sur la dénucléarisation mais depuis, les négociations n’ont guère progressé.
En pointe des efforts internationaux menés en 2017 pour faire pression sur l’économie nord-coréenne, les Etats-Unis refusent un allègement des sanctions tant que le Nord n’aura pas procédé à une « dénucléarisation finale et entièrement vérifiée ».
Pyongyang a condamné les « méthodes de gangster » des Américains accusés d’exiger son désarmement unilatéral sans faire de concession.
« L’amélioration des relations et les sanctions sont incompatibles », ajoute le communiqué signé par le directeur de l’Institut des études américaines du ministère des Affaires étrangères.
Toujours attendue, « la réponse correspondante des Etats-Unis », ajoute le texte. Mais, Mike Pompeo va, incessamment, rencontrer un bras droit de Kim Jung-un, aux Etats-Unis, avec qui il va commencer la préparation d’une autre rencontre au sommet avec Donald Trump. Cela veut dire que la menace de Pyongyang a porté ses fruits. Trump a, absolument, besoin de la coopération de Kim pour vendre sa politique étrangère aux électeurs américains.
La Corée du Nord, qui est soumise à de multiples sanctions de l’ONU du fait de ses programmes nucléaire et balistique interdits ainsi qu’à des sanctions unilatérales de Washington, se montre de plus en plus impatiente avec les Etats-Unis.
Le mois dernier, les médias officiels avaient accusé Washington de « double jeu » et critiqué implicitement Donald Trump pour des propos selon lesquels Séoul ne lèverait pas ses propres sanctions contre le Nord sans l’aval de Washington.
Des divergences d’approche sur le dossier nord-coréen sont apparues entre Séoul et son allié américain, qui déploie 28.500 soldats en Corée du Sud pour la protéger de son voisin.
Le président sud-coréen, Moon Jae-in, est partisan de longue date d’un dialogue avec le Nord. Il a fait miroiter à Pyongyang investissements et projets transfrontaliers pour l’inciter à la dénucléarisation.
Washington martèle, pour sa part, que les sanctions doivent être maintenues tant que la dénucléarisation ne sera pas totale. Mais, au regard de la situation et des enjeux, Trump ne devrait-il pas mettre un peu d’eau dans son vin en épousant le réalisme de son allié sud-coréen ?