ETHIOPIE : L’hommage de la nation au chef d’état major des armées assassiné

Date

Les responsables militaires et religieux éthiopiens ont rendu hommage au chef d’état-major de l’armée, condamnant son assassinat et ceux de responsables régionaux, samedi, 22 juin, lors d’une cérémonie chargée d’émotion, mardi, 25 juin, durant laquelle le premier ministre, Abiy Ahmed, a, ouvertement, pleuré (notre photo).

Quelques heures plus tard, des milliers de personnes ont accueilli la dépouille du chef d’état-major, Seare Mekonnen, à Mekele, dans sa région natale du Tigré (Nord).

Le chef du gouvernement éthiopien, dont le programme réformiste et progressiste a reçu une gifle avec les assassinats politiques de samedi, a essuyé ses larmes avec un mouchoir blanc durant cette cérémonie en l’honneur de Seare Mekonnen et d’un général à la retraite tué en même temps que lui.

« Le crime (les assassinats) n’a pas été commis par des forces étrangères, mais par notre propre peuple, et cela le rend encore plus douloureux », a déclaré Abune Mathias, le patriarche de l’Eglise orthodoxe, devant plus de 1.000 personnes, principalement des soldats et des proches des deux hommes.

Le général, Seare Mekonnen, a été tué par son garde du corps alors qu’il organisait la réponse à une attaque menée dans l’après-midi à Bahir Dar (Nord-Ouest) contre une réunion de hauts responsables de la région Amhara.

Le président de cette région, Ambachew Mekonnen, un de ses conseillers et le procureur général régional, Migbaru Kebede, qui participaient à cette réunion, ont été tués dans cette attaque.

Les attaques de Bahir Dar et d’Addis Abeba étaient coordonnées, estiment les autorités. Elles évoquent une « tentative de coup d’état » contre le gouvernement de la région Amhara, une des neuf régions du pays dessinées sur les bases d’un fédéralisme ethnique.

Le lien entre les deux attaques et les motifs de celle contre le général Seare restent à éclaircir. Les observateurs ont émis des doutes sur la théorie de la tentative de coup d’état.

Mais, tous s’accordent pour dire que ces événements s’inscrivent dans le cadre des tensions politico-ethniques en Ethiopie qui ont fait plus de deux millions de déplacés.

A la cérémonie d’Addis Abeba, l’assistance a exprimé sa douleur.

« Ils se sont beaucoup sacrifiés pour ce pays », a crié une femme en amharique. « Nous les aimons, mais nous les avons perdus pour toujours ».

L’assistance s’est levée comme un seul homme lorsque les cercueils, recouverts de drapeaux éthiopiens et portés par des généraux, sont entrés dans la salle.

Les lamentations se sont amplifiées lorsque M. Abiy, tout de noir vêtu et assis au côté de la présidente, Sahle-Work Zewde, est apparu sur un écran, sanglotant et priant, tête baissée.

Des soldats étaient au bord des larmes tandis que de nombreux militaires se succédaient sur l’estrade pour saluer les carrières des deux hommes. Evoquant le général Seare, un autre général a évoqué un valeureux guerrier « qui savait comment gagner » sur le champ de bataille, « était très courageux » et « a été le mentor de beaucoup de soldats ».

« Cela aurait été différent s’il avait été tué sur le champs de bataille (…), mais qu’a-t-il fait pour mériter cela ? », a interrogé le général Birhanu, Jula, adjoint du général Seare.

Un fils du général en retraite a suscité des applaudissements lorsqu’il a déclaré : « Ce sont des héros et les héros ne meurent jamais ».

M. Abiy a salué les deux cercueils, qui ont été emmenés à l’aéroport, d’où ils ont été transportés vers Mekele.

Une foule immense s’était alignée le long des rues, un cierge à la main et agitant des drapeaux sur le passage des cercueils. Les deux militaires, doivent être inhumés ce mercredi, 26 juin.

Le Tigré, la région la plus septentrionale du pays, est la région d’une minorité ethnique qui, jusqu’à l’arrivée au pouvoir de M. Abiy, était considérée comme la plus puissante au sein du parti au pouvoir.

Les Tigréens sont accusés d’avoir marginalisé les Oromo et les Amhara, les deux principaux groupes ethniques.

Abiy Ahmed s’est efforcé, depuis son entrée en fonction en avril 2018, de démocratiser le pays, légalisant des groupes dissidents et améliorant la liberté de la presse. Mais, cet assouplissement a, également, permis une expression plus libre des tensions inter-communautaires.

Les autorités accusent le chef de la sécurité de la région Amhara, Asaminew Tsige, tué, lundi, 24 juin, à Bahir Dar, par des policiers alors qu’il était en fuite, d’être derrière les deux attaques.

M. Asaminew, un nationaliste amhara ayant ouvertement entrepris de former des milices ethniques, se serait senti sur la sellette en raison de sa rhétorique belliqueuse.

Quatre hauts responsables locaux, dont le chef des forces spéciales de la région Amhara, ont été arrêtés pour ces attaques, a déclaré le chef de la police de la région Amhara, Abere Adamu.

Il a, également, assuré que sept membres de ce qu’il décrit comme « un groupe secret » ayant organisé la « tentative de coup d’état » ont été tués. Six membres des forces de sécurité ont trouvé la mort dans l’opération.

Le chef de la police nationale, Endashaw Tassew, a, lui, déclaré lundi soir que des membres du « groupe secret » avaient persuadé le garde du corps du général Seare de tuer ce dernier. « C’était une mission-suicide. Maintenant nous travaillons à déterminer qui sont les membres restants de l’équipe » d’assaillants.

Avec AFP

Envie d’accéder aux contenus réservés aux abonnés ?

More
articles

×
×

Panier