EXPLOSION AU TCHAD : Qui en veut au général-président (démocratiquement) élu ?

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Neuf personnes sans doute beaucoup plus en comptant les blessés au nombre de 40 dont certains succomberont à leurs blessures dans des structures hospitalières qui sont de véritables mourroirs, et que MIDI (Mahamat Idriss Déby Itno) s’est engagé à reconstruire ou à moderniser pendant sa campagne présidentielle (si on lui en laisse la possibilité), voilà le triste bilan de l’explosion qui a secoué la capitale tchadienne dans la nuit du mardi, 18 au mercredi, 19 juin, dans le quartier de Goudji. Beaucoup n’acceptent pas l’élection démocratique du général-président qui, c’est une litote, n’hérite pas d’un pays à la tranquillité débordante. Et le fait qu’un incendie se soit déclenché dans un dépôt de munitions militaires, en plein cœur de N’Djamena, ne peut être un accident banal. Autrement dit, MIDI devrait dormir la nuit avec l’oeil droit ouvert.

Et pour cause, l’eau et le feu ne cohabitent jamais ensemble. Penser qu’on peut garder, côte à côte, dans la même ville et ses environs, mercenaires russes (dont certains affichent l’étiquette de conseillers) avec des Français dont le chef suprême de leurs armées, Emmanuel Macron, est perçu à Moscou comme l’ennemi numéro deux du pays après Joe Biden, c’est minimiser la haine et la volonté de s’exterminer mutuellement qui animent les deux belligérants. On n’a qu’à écouter les propositions formulées par le président français pour aider Volodymyr Zelensky à gagner sa guerre contre Vladimir Poutine comme l’envoi des troupes (françaises et européennes) au sol combattre les Russes en Ukraine (ce qui entraînerait de facto la troisième guerre mondiale) pour imaginer ce qui se passerait dans la capitale tchadienne en cas d’altercation entre Russes et Français. On ne parle même pas des Américains dont les soldats, croit-on savoir, sont en train de partir du pays.

Sodats russes et chinois peuvent faire la guerre côte à côte car leurs dirigeants poursuivent les objectifs à peu près similaires au sein des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), tout comme ils ont la même vision du monde. De même, le G7 n’est composé que des alliés économiques qui entretiennent les mêmes relations dans le domaine politique et même militaire, même si tous ne sont pas membres de l’OTAN. Quand ces deux blocs s’affrontent aux Nations-Unies et singulièrement au Conseil de sécurité, c’est le blocage, sinon, le droit de veto est systématiquement brandi. Pense-t-on que c’est dans la capitale tchadienne qu’ils pourraient cohabiter ? Que non ! On l’a vu au Niger où pour signer des accords militaires avec Moscou, Vladimir Poutine a exigé (et obtenu) le départ de tous les soldats américains du sol nigérien à son homologue, Abdourahamane Tiani. Ou c’est eux, ou c’est nous, lui aurait dit le maître du Kremlin.

Les conseillers de MIDI doivent donc lui dire de faire attention. Le Tchad de feu le maréchal est encore très (très) fragile pour résister à la déstabilisation programmée par l’un des deux camps. Si Moscou doit s’installer, Washington et Paris devront débarrasser le plancher. Tôt ou tard. Ce n’est pas N’Djamena qui modifiera les grands équilibres internationaux. Jusqu’à preuve de contraire, les dirigeants africains quels qu’ils soient, subissent encore le diktat des Non-Africains. En attendant le jour où ils comprendront la nature des enjeux qui caractérisent les relations internationales.

Le président nouvellement élu vient de diligenter une enquête pour connaître les tenants et les aboutissants de cette explosion. Je lui conseille d’en diligenter trois en confiant les deux autres à des enquêteurs qui se détestent ou qui ne voient pas la vie de la même manière. S’il ne le fait pas, il ne saura jamais la vérité.

Professeur Paul TEDGA

Docteur des Facultés françaises de droit et d’économie (1988)

Auteur de sept ouvrages

Fondateur en France de la revue Afrique Education (1993)

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