Brice Laccruche Alihanga, ex-bras droit du président gabonais, Ali Bongo Ondimba, a été condamné, vendredi, 29 octobre, par le tribunal de Libreville à cinq ans de prison ferme pour «délivrance indue de documents administratifs». Il était titulaire d’une fausse nationalité gabonaise. Chose incroyable à ce niveau de l’Etat !
Nommé directeur du cabinet présidentiel en 2017, à la surprise générale, Brice Laccruche, un Français de 41 ans, était devenu le véritable homme fort du pouvoir après l’accident vasculaire cérébral du président, Ali Bongo Ondimba, en octobre 2018, qui avait laissé le chef de l’Etat très affaibli et absent de longs mois du pays. Il était alors devenu de facto le président du Gabon au sens propre comme au sens figuré. Il est reconnu coupable d’avoir obtenu illégalement la nationalité gabonaise. Autrement dit, c’est un Français qui fut directeur de cabinet du président du Gabon et non un Franco-Gabonais comme il le laissait entendre (Notre photo montre comme Laccruche avait réussi à infiltrer le couple présidentiel qui lui faisait totalement confiance alors que…).
En novembre 2019, peu après le retour du président de la République sur le devant de la scène politique, Brice Laccruche avait d’abord été écarté de la présidence, avec l’aide du fils du chef de l’Etat qui l’avait beaucoup aidé à y voir plus clair. Par la suite, il devint la cible d’une opération anti-corruption appelée Scorpion, qui avait aussi visé des ministres et hauts fonctionnaires proches de lui. Laccruche avait été arrêté en décembre 2019, tout comme plusieurs ministres et hauts-fonctionnaires, et incarcéré à Libreville pour détournements de fonds publics. Il a été condamné pour un chef relativement mineur au regard des autres pour lesquels il est aussi poursuivi dans des enquêtes séparées. Brice Laccruche a également été condamné à verser une amende de 5 millions de F CFA, soit environ 7500 euros. Les réquisitions du parquet ont été suivies.
Depuis 2020, une juge d’instruction parisienne enquête sur des accusations de «détention arbitraire» par les autorités gabonaises de Brice Laccruche, mais aussi, de son frère Grégory, également, poursuivi pour détournements de fonds publics.
Dès lors, les Gabonais se posent plusieurs questions sur cet individu : était-il l’espion de Paris aux côtés de leur chef d’Etat comme il se chuchote à Libreville ? Cette question est légitime dans la mesure où la détention de Laccruche (que personne n’appelle plus Alihanga comme il se faisait appeler avant) fait l’objet d’une instruction par la justice française. Ali Bongo Ondimba combat, de toutes ses forces, la Françafrique. Plus que le patriarche, pense-t-on. Mais voilà que son principal collaborateur a été nommé là où il n’aurait jamais dû être : directeur de Cabinet du président de la République. Que doit-on en penser ? L’autre question que se posent les Gabonais, c’est de savoir pourquoi leur président s’entoure-t-il de personnes souvent non recommandables ? Car ce n’est pas la première fois que le poste de directeur de cabinet du président du Gabon est parasité par un intrus : avant Laccruche, il y eut le Béninois, Maixent Accrombessi, devenu Gabonais sur le tard, qui fut la pluie et le beau temps pendant le premier septennat du président gabonais. Il est même accusé d’avoir failli faire échouer Ali Bongo Ondimba à la présidentielle de 2016 au point où Jean Ping, le candidat de l’opposition, continue jusqu’à ce jour, à revendiquer sa victoire.
Jean Ping et Alexandre Barro Chambrier « gérés » par Sassou-Nguesso depuis le Congo-Brazzaville.
Il faut cependant relever la force de caractère d’Ali Bongo Ondimba qui ne se fait pas prier pour reconnaître ses erreurs et à les corriger rapidement le cas échéant. Mais, il ne sera, sans doute, pas épargné par ses adversaires pendant la prochaine campagne présidentielle de 2023 car, selon des indications recueillies au sein de son parti, le Parti démocratique gabonais, il sera bel et bien candidat. Meilleure chance pour son parti, malgré sa maladie, il devra, à coup sûr, croiser à nouveau le fer avec Jean Ping, mais aussi, avec le professeur agrégé d’économie, Alexandre Barro Chambrier, à moins que l’un s’efface au profit de l’autre.
Cela dit, quelle que soit la formule choisie, Ali Bongo Ondimba et son PDG devraient avoir le dessus car les liens entretenus par ces deux opposants avec le Congo-Brazzaville et son président, Denis Sassou-Nguesso, rappellent de très fâcheux souvenirs aux Gabonais, qui ne sont plus prêts à vivre la même (mauvaise) expérience.