L’époque où le président Lula, grâce à son charisme et à sa popularité, pouvait couvrir quelques écarts de comportement sur tout quand les services de police ou de justice du Brésil, cherchaient à nuire à la tranquillité d’un dirigeant africain, ce temps-là est désormais derrière nous. Lula Ignacio da Silva, bien que tout blanc, aimait tellement l’Afrique qu’il pouvait tout lui pardonner. C’est d’ailleurs sous son impulsion que la coopération entre le Brésil et l’Afrique a pris son envol. Son départ du pouvoir après deux mandats n’a pas émoussé les ardeurs de son ancienne directrice de cabinet, Dilma Rousseff, qui lui a succédé à la présidence de la République. Celle-ci, comme son mentor, coopère et aide,l’Afrique, presque les yeux fermés. Comme Lula. Au point où son amitié et sa générosité vont jusqu’à vexer certains députés de l’Assemblée nationale du Brésil (lire Congo-Brazzaville : Un député met la présidente Dilma Rousseff dans l’embarras, dans le numéro 370 du 16 au 30 juin 2013). En effet, le député Jutahy Jr du PSDB (Partido da Social Democracia Brazileira) s’est élevé contre la générosité de Dame Dilma qui avait, au Sommet de l’Union africaine d’Addis Abeba, de mai 2013, où elle était invitée spéciale, annulé 900 millions de dollars de dettes d’une dizaine de pays africains dont plus du tiers pour le seul Congo-Brazzaville du dictateur cleptomane, Denis Sassou Nguesso, l’homme qui a confisqué le pétrole congolais pour lui tout seul, sa famille et le petit clan de son village Oyo. Le tollé fut général chez les députés brésiliens et Dame Dilma fut priée de (bien) vouloir revoir sa copie. Cela veut donc dire que les choses changent. Que les Brésiliens acceptent d’être généreux à l’endroit des Africains, à condition que cet effort de solidarité profite aux plus démunis en Afrique, ce qui n’était pas le cas au Congo-Brazzaville où Sassou a fait venir une équipe de Brésiliens pour s’occuper de son ranch privé à Oyo. On se souvient que c’est grâce à son cheptel entretenu dans ce ranch qu’il avait fourni gracieusement deux (gros) bœufs à son voisin Joseph Kabila afin qu’il prépare le méchoui à ses invités du Sommet de la francophonie en octobre 2012. Sassou ne faisant rien pour rien, il avait demandé et obtenu de Kabila pour qu’il lui arrange un rendez-vous avec le nouveau chef de l’Etat français, François Hollande, qui l’empêche de dormir sur ses deux oreilles. L’entrevue entre les présidents congolais et français, en marge du Sommet de Kinshasa, n’avait duré qu’un petit quart d’heure. Une humiliation suprême pour le dictateur d’Oyo. Les Brésiliens sont donc présents en Afrique et singulièrement au Congo.
Mais maintenant où la cote de popularité de Dilma a chuté de 16 points à cause des grèves dans plusieurs secteurs dont celui des transports (les usagers demandent la gratuité alors que l’Etat voulait augmenter le prix du ticket), les choses ne pourront plus être les mêmes.
Le problème de Teodorin Obiang Nguema Mangue sur vient donc à un mauvais moment. Habitué du Brésil où lui-même et quelques autres membres de sa famille disposent des biens, depuis plusieurs années, sans jamais être inquiétés le moins du monde, la police fédérale brésilienne, comme s’il n’était plus le 2e vice-président de la Guinée équatoriale, s’est subitement mise à fouiner dans son dossier, au point de le soupçonner de blanchiment d’argent au Brésil. C’est en février 2013, semble-t-il, que les ennuis avec la police brésilienne ont commencé quand celle-ci a envoyé une fiche à Interpol. A la demande de qui ? Personne ne le sait. Toujours est-il que dans la foulée, celle-ci s’est même transportée dans le triplex que Teodorin a acquis à Sao Paulo et qu’elle a fouillé de fond en comble. Pour y chercher quoi ? Là aussi mystère !
La législation équato-guinéenne est pourtant simple et claire : la constitution et les lois du pays reconnaissent à tout individu, même s’il est fonctionnaire ou homme politique, de pouvoir faire des affaires, s’il le veut, s’il le peut, pour arrondir ses fins de mois. En tant que fils aîné de Teodoro, le doyen des chefs d’Etat d’Afrique centrale depuis le décès d’Omar Bongo Ondimba, Teodorin fils aîné et possible successeur de son père, ne fait pas exception à cette règle (écrite). Il fait aussi ses affaires comme tous les dignitaires équato-guinéens. Alors, blanchiment ou pas blanchiment ? Telle est la question. Dans tous les cas, au regard de la législation équato-guinéenne, il n’est pas hors la loi et l’argent est légalement gagné …à la sueur de son front.
Les policiers brésiliens suivent sans doute leurs collègues d’Amérique du Nord (Etats-Unis) et d’Europe (France). Car selon une enquête du département d’Etat, Teodorin ne justifierait pas l’argent dont il a disposé pour acheter entre 2009 et 2011 six tableaux d’Edgar Degas, de Pierre Auguste Renoir, de Paul Gauguin et d’Henri Matisse, pour un total de 35 millions de dollars, soit 27,2 millions d’euros. En Europe, et particulièrement, en France où 9 voitures de luxe de sa collection saisie en septembre 2011 ont été vendues 3 millions d’euros (2 milliards de f cfa au profit du Trésor public français), aux enchères lundi 8 juillet à Paris-Drouot, par le commissaire-priseur, Damien Libert, à la demande de l’AGRASC (Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués aux criminels), il s’est mis en situation de persona non grata après avoir refusé de répondre à une convocation des juges Roger Le Loire et René Grouman, l’année dernière. Du coup, il ne peut même pas, dans ces conditions, siéger à l’Unesco où son père l’avait, également, nommé distingué délégué permanent-adjoint avec le statut diplomatique à la clé.
Bref, c’est une affaire compliquée, la procédure française risquant de se dénouer à la Cour internationale de justice de la Haye saisie par le président Obiang car on peut badiner avec les biens de la Guinée équatoriale ou des Equato-Guinéens à l’extérieur, mais quand il s’agit de préserver et de défendre l’indépendance et la souveraineté de l’Etat de Guinée équatoriale, on trouve Teodoro Obiang Nguema Mbasogo sur son chemin. A la Haye, telles que les choses se sont passées dans l’immeuble situé avenue Foch, à Paris, il n’est pas exclu qu’il ait gain de cause. Pour y par venir, il s’est donné les moyens. D’abord, en engageant de très bons avocats. Les robes noires qui officiaient jadis pour le compte de l’Etat ont été remplacées pour …incompétence. Maître Metzner avait été recruté à cet effet. Malheureusement, il est décédé quelques mois plus tard. Mais l’affaire est toujours suivie par les associés de son cabinet. For t de son bon droit, pense-t-on à Malabo, le président Obiang veut, pour une fois, clouer « leur bec » à tous ces dirigeants occidentaux, qui « jalousent secrètement le très riche sous-sol de la Guinée équatoriale », en essayant, chaque fois qu’ils en ont l’occasion, de salir son image et celle de son pays.