Israël et son chef de gouvernement ont deux motivations principales pour s’intéresser davantage à l’Afrique : une demande croissante d’assistance sécuritaire israélienne, et la nécessité pour Israël de nouer de nouvelles alliances.
L’offensive de charme devrait se traduire par une visite de M. Netanyahu (ici accueillant le président kenyan, Uhuru Kenyatta, le 28 février dernier, à Tel Avis) autour du 40ème anniversaire de l’opération menée, le 4 juillet 1976, par des commandos israéliens pour libérer les passagers et l’équipage d’un vol Tel-Aviv/Paris détourné par des Palestiniens et des Allemands.
Le raid, qui avait eu lieu à l’aéroport d’Entebbe, en Ouganda, avait coûté la vie au chef du commando, Yonatan Netanyahu.
Benjamin Netanyahu a indiqué, fin février, accepter l’invitation de plusieurs dirigeants africains à se rendre sur le continent autour de la date anniversaire, sans donner plus de détails sur les étapes du voyage.
Le premier ministre a expliqué que ce voyage revêtait « une grande importance » du point de vue personnel, mais, que c’était, aussi, une façon de dire : « Israël revient en Afrique, l’Afrique revient en Israël ».
Si les pays africains, échaudés, notamment, par l’époque coloniale, ont des raisons d’être sceptiques, les progrès économiques de nombreux d’entre eux changent la donne, de même que la menace de l’islamisme radical, qui réclame des technologies de défense avancées.
Certains pays souhaiteraient, aussi, profiter du savoir-faire agricole et hydrologique israélien, dit Na’eem Jeenah, chef de l’Afro-Middle East Centre, basé en Afrique du Sud.
« Israël s’est présenté à ces gouvernements comme porteur d’opportunités énormes », dit-il.
M. Netanyahu s’était rendu, en Ouganda, en 2005, mais, n’était pas, alors, à la tête du gouvernement, et avait dévoilé une plaque à la mémoire de son frère.
Sa prochaine visite sera la première d’un premier ministre israélien, en Afrique, depuis 1994, et parachèvera des années de rapprochement.
Au-delà des promesses commerciales, Israël cherche à s’assurer le soutien des pays africains dans les institutions internationales, où il fait l’objet de vives critiques liées à l’occupation des Territoires palestiniens ou à ses activités nucléaires.
Le conflit avec les Palestiniens a porté un rude coup aux relations avec de nombreux pays africains, dans les années 1960, qui, aiguillonnés par les nations d’Afrique du Nord, ont pris leurs distances avec l’Etat hébreu.
Depuis le début des années 80, « les Africains ont réalisé qu’ils avaient fait une erreur », estime Aryeh Oded, ancien diplomate israélien en Afrique.
Israël a, longtemps, rechigné à renouer avec l’Afrique, dit-il. Mais ces dernières années, l’absence de progrès sur le front diplomatique avec les Palestiniens l’a conduit à se raviser.
Avigdor Lieberman, ministre des Affaires étrangères de M. Netanyahu, de 2009 à 2015, s’est rendu, à maintes reprises, en Afrique.
« Les relations avec le continent africain figurent en bonne place dans notre agenda diplomatique », disait, récemment, le directeur général-adjoint pour les affaires africaines aux Affaires étrangères, Yoram Elron.
Le président kenyan, Uhuru Kenyatta, le chef de la diplomatie ghanéenne et une délégation de dignitaires musulmans africains, ont visité Israël, ces dernières semaines. Le directeur général des Affaires étrangères israéliennes, Dore Gold, s’est rendu, lui, en Afrique du Sud où était, également, Shimon Peres, il y a quelques mois.
Le potentiel d’expansion commerciale est considérable : l’Afrique ne représente que 2% du commerce extérieur israélien.
« L’Afrique, qui possède aujourd’hui l’un des plus forts taux de croissance au monde, renferme de nombreuses opportunités commerciales dans des domaines où l’expertise israélienne fait autorité, comme l’agriculture, les télécommunications, l’énergie renouvelable et les infrastructures », dit M. Elron.
L’Afrique, où les djihadistes de Boko Haram, des Shebab et d’Al-Qaïda multiplient les exactions, présente bien des attraits pour les experts israéliens de la défense et du renseignement.
Alors qu’Israël reste consterné de voir les pays africains voter contre lui ou s’abstenir dans les arènes internationales, M. Netanyahu résume l’objectif d’un tel rapprochement : « Ce que je veux, c’est qu'(il) (…) se traduise dans les votes de l’Union africaine ».
Mais, selon M. Oded, les pays arabes et musulmans s’assurent les votes africains contre Israël en leur prodiguant une aide financière substantielle.
« Les Africains se livrent à un exercice d’équilibristes. Dans les relations bilatérales, ils sont avec nous. Au niveau international, ils sont de leur côté », dit-il.