Dans une décision aussi bien prévisible que nécessaire, le premier ministre du Japon, Fumio Kishida, vient de procéder au remaniement de son gouvernement. Cette recomposition, la troisième du genre depuis août 2022, s’inscrit dans une logique d’urgence puisqu’elle intervient suite à un scandale relatif à une enquête en cours sur les finances de son parti, le Parti libéral démocrate (PLD).
D’après les enquêteurs, plusieurs membres du gouvernement nippon auraient perçu, environ, 3.5 millions de dollars sur cinq ans, et omis, volontairement, de les déclarer, se rendant, ainsi, passibles d’amendes et/ou de peines de prison. Cet argent correspondrait au surplus de recettes liées aux ventes de billets d’entrée aux campagnes de levée de fonds organisées par le parti, et qui devraient, principalement, servir de récompense aux membres ayant réussi à dépasser les objectifs de vente fixés.
Cette affaire a jeté un énorme discrédit sur le leadership de Fumio Kishida dont le secrétaire en chef du cabinet, Matsuno Hirokazu, fait partie des bénéficiaires de ces pratiques illégales. Le départ de ce dernier, ainsi que, de ceux de Yasutoshi Nishimura, ministre de l’Economie et de l’Industrie, Junji Suzuki, ministre des Affaires internes, Ichiro Miyashita, ministre de l’Agriculture, et une poignée d’autres officiels, était imminente après l’annonce du scandale, l’opinion publique s’étant exprimée de la manière la plus intransigeante en attribuant à l’équipe gouvernementale une côte de popularité de 17%, soit, la plus faible depuis la prise de poste de son premier ministre en octobre 2021. On se souvient d’ailleurs qu’en août de l’année dernière, ce pourcentage s’était effondré à 35% et provoqué quelques changements au sein du cabinet ministériel afin de regagner la confiance du peuple.
Aujourd’hui, la situation est bien plus critique pour Fumio Kishida, qui sait pertinemment que les Japonais ne lui pardonneront pas une quelconque implication à un scandale d’ordre financier. Car, en effet, le fait qu’ils tolèrent, déjà, tant bien que mal, son incapacité à agir contre la cherté de la vie est une chose, mais, qu’il soit parallèlement en train d’arrondir ses fins de mois de manière frauduleuse en est une toute autre, qui serait fatale à sa carrière politique.
Le dirigeant nippon, qui espérait pouvoir conserver son poste actuel au-delà des élections présidentielles du PLD prévues pour septembre 2024, craint, désormais, d’être évincé par ce dernier. C’est ce qui risque de se produire si de nouvelles révélations accablantes sont faites par le bureau du procureur du district de Tokyo, qui poursuit l’enquête.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)