KENYA : Une terre devenue hostile à tout opposant (sous William Ruto)

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Malgré un nombre de réfugiés actuellement évalué à 800 000, le Kenya n’est plus la terre d’hospitalité qu’elle était jadis. En effet, elle vient, en moins de six mois, de déporter plus d’une quarantaine de dissidents aux régimes turc et ougandais. Recourant à chaque fois au même modus operandi, les autorités kényanes se livrent à des arrestations arbitraires d’individus ciblés, en pleine journée, et les remettent aussitôt aux bourreaux, qu’ils n’ont cessé de critiquer.

La première vague d’arrestations de ce type a eu lieu en juillet dernier, lorsque 36 opposants au président ougandais, Yoweri Museveni (sur notre photo reçoit Ruto à Kampala), se trouvant dans la ville de Kisumu, ont été interpellés par les forces de l’ordre kényanes. Leur déportation avait conduit à leur incarcération, en attendant leur passage devant un tribunal pour des faits de terrorisme. Ils ont été rejoints, le 16 novembre, par Dr. Kizza Besigye, un de leurs leaders politiques, et Haji Obeid Lutale.

Le 20 octobre, le gouvernement kényan a reconnu avoir arrêté et expulsé vers la Turquie des ressortissants turcs à la suite d’une demande adressée par le pouvoir d’Ankara. Une déclaration qui avait provoqué l’indignation dans les cercles des droits humains, puisque ces individus étaient des réfugiés connus des services de l’ONU. Opposés au président turc, Recep Tayyip Erdogan, ceux en possession d’une seconde nationalité avaient été relâchés. 

En statuant sur leur sort, William Ruto avait en tête ses accords passés avec les chefs d’Etat ougandais et turc. D’une part, l’ancien guérillero a promis de donner son vote à Raila Odinga pour le poste de futur président de la commission de l’Union africaine, de manière à le tenir loin de la vie politique kényane. D’autre part, Nairobi et Ankara ont signé un partenariat militaire cet été. Les décisions du dirigeant kényan étaient donc dénuées de toute objectivité.

Recep Tayyip Erdogan n’a pas encore été invité en Turquie malgré le travail qu’il effectue pour Erdogan.

L’opposition internationale n’est plus la bienvenue sur toute l’étendue du territoire kényan. Depuis la brouille diplomatique qu’il avait eue avec Félix Tshisekedi, suite à la demande par Kinshasa de se voir remettre le groupe de rebelles, dont Corneille Nangaa, se réunissant le 15 décembre 2023 à Nairobi, Ruto semble avoir relégué les principes démocratiques au second plan, pour ne considérer désormais que ce qui sert ses propres intérêts, au mépris des droits humains.

Paul-Patrick Tédga

MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)

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