L’opposante rwandaise, Diane Rwigara, critique du président, Paul Kagame, a été acquittée, jeudi, 6 décembre, par un tribunal de Kigali d’incitation à l’insurrection et falsification de documents, des charges qui lui ont valu d’être emprisonnée, pendant plus d’un an, et dénoncées comme politiques par l’intéressée. « Les charges retenues par l’accusation sont sans fondement », a déclaré le juge président Xavier Ndahayo. La salle d’audience bondée, dans laquelle avaient, notamment, pris place des membres de la famille Rwigara, a laissé exploser sa joie une fois la lecture de la décision achevée. Est-ce la magie de la francophonie ? Car ce retournement de situation qu’on observe, depuis quelques mois, avec la libération d’autres opposants comme Victoire Ingabire, n’est pas le fruit du hasard : Paul Kagame a réussi (malgré beaucoup de critiques) à placer une de ses très proches, son ancienne cheffe de la diplomatie, Louise Mushikiwabo, à la tête de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie). Ceci expliquerait cela.
Les cinq coaccusés de Mme Rwigara dans cette affaire, dont sa mère Adeline, ont, également, été acquittés. « C’est la preuve que toutes ces charges retenues contre moi, ma mère et des membres de ma famille étaient montées de toute pièce », a réagi Diane Rwigara (sur notre photo avec sa maman dans leur tenue de prisonnières). Avant d’ajouter : « J’ai l’énergie et le zèle pour continuer à me battre pour la liberté d’expression et les droits de l’Homme au Rwanda ».
Le tribunal a estimé que les critiques de Diane Rwigara contre le gouvernement ne constituaient pas une « incitation à l’insurrection » car elles s’inscrivent dans le cadre de son droit à la liberté d’expression garantie par la Constitution rwandaise et les lois internationales. Et pourtant, avant cet abandon des charges, les juges justifiait son incarcération en disant, justement, le contraire.
Les juges ont, également, estimé que l’accusation n’avait pas prouvé que Mme Rwigara avait falsifié des signatures de partisans dans le dossier présenté à la commission électorale en vue de sa participation à la présidentielle de 2017. Le rejet de cette candidature avait été critiqué par des gouvernements occidentaux et des groupes de défense des droits de l’Homme.
Comme si Diane était passible de crimes contre l’humanité, l’accusation avait requis 22 ans de prison contre elle et sa mère. Outré par cette justice aux ordres, Afriqueeducation.com s’était demandé, à l’époque, s’il ne valait pas mieux pour Paul Kagame de ré-instaurer, carrément, un régime de parti unique au Rwanda car plus facile à gérer pour lui ? En effet, le président rwandais issu du génocide qui tua plus de 800.000 personnes montrait, clairement, qu’il était beaucoup plus à l’aise dans une dictature dont il contrôlait les tenants et les aboutissants que dans une démocratie où il était incapable de mesurer les pulsions de ses opposants.
Pour rappel, Adeline Rwigara était accusée d' »incitation à l’insurrection et promotion du sectarisme », notamment, pour avoir accusé le gouvernement, dans des conversations WhatsApp privées, de la mort de son mari Assinapol Rwigara.
Diane Rwigara et sa mère avaient été arrêtées et emprisonnées en septembre 2017 puis remises en liberté sous caution début octobre 2018.
« Diane et Adeline Rwigara n’auraient jamais dû être poursuivies pour avoir exprimé leurs opinions », a réagi Amnesty International dans un communiqué, saluant l’acquittement.
« Nous restons préoccupés quant aux attaques qui continuent de viser le droit à la liberté d’expression au Rwanda », a ajouté l’ONG. « Nous appelons les autorités rwandaises à se servir de ce jugement pour se diriger vers une plus grande acceptation envers les opinions alternatives et critiques ». Paul Kagame y sera, forcément, contraint, sinon, il polluera le séjour de sa protégée à la tête de l’OIF, en même temps qu’il augmentera les soucis de son nouvel ami, le jeune président français, Emmanuel Macron, qui aura été la personne à avoir permis l’élection de Louise Mushikiwabo.
L’ancien patron de l’APR (Armée patriotique rwandaise) a été réélu, le 4 août 2017, pour un nouveau mandat de sept ans avec près de 99% des voix. Qui dit mieux ? Même Brejnev ne faisait pas aussi bien ! Un grand artiste, ce général Paul ! Une réforme de la Constitution adoptée par référendum fin 2015 lui permet de potentiellement diriger le pays jusqu’en 2034.
Après l’arrestation de Diane, des biens appartenant aux Rwigara avaient été saisis et vendus aux enchères dans le cadre d’un …redressement fiscal de plusieurs millions de dollars. Un redressement fiscal (bien entendu) politique ou si l’on veut imaginaire. Ainsi va la vie dans le pays du général-président Paul Kagame. Après avoir fait tant de mal aux gens, on comprend qu’il cherche à s’accrocher au pouvoir qu’il devrait quitter vers 2034 (si Dieu lui prête vie).