MASSACRES DE THIAROYE (SENEGAL) : Quelle leçon en tirer pour quelle attitude à l’endroit du bourreau (France) ?

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Il y a 80 ans, la France massacrait environ 300 soldats africains appelés tirailleurs sénégalais, dans le Camp de Thiaroye, une banlieue de Dakar (Sénégal). Ces Africains, qui venaient de contribuer à mettre fin à l’occupation et à l’humiliation de la France par l’Allemagne nazie, quel crime avaient-ils commis pour être traités de la sorte ? Ils avaient simplement réclamé le paiement de leur solde, ils avaient simplement voulu bénéficier du même traitement que leurs frères d’armes français.

Regarder le film que Sembène Ousmane consacra en 1988 à ce massacre vous met forcément en colère mais, après la colère, que fait-on ou bien que devrions-nous faire pour ne plus subir ce genre de foutaise ? (Sur notre photo, on voit le président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye recevoir les présidents du Gabon, le général, Brice Oligui Nguéma, de la Mauritanie, le général, Mohamed Ould Ghazouani, de la Gambie, Adama Barrow, des Comores, le colonel, Azali Assoumani, de la Guinée Bissau, le narco-général, Umaru Sissoco Embalo. Presque tous sont des béni-oui-oui de la France alors qu’ils devraient se dresser contre son ordre colonial).

Les massacres de Thiaroye au Sénégal  :  ici, le cimetière au Sénégal qui abrite les restes des soldats qui avaient (vaillamment) combattu pour la France pour vaincre l’Allemagne nazie et qui réclamaient leur solde que la France refusait de payer. La France est mille fois responsable et mille fois coupable. Elle doit absolument réparer…

Malheureusement, les Africains n’ont jamais exigé ni excuses ni réparation pour cette barbarie. Alors, les Français ont continué à tirer sur le Noir : Um Nyobè et ses camarades qui luttaient pour la vraie indépendance au Cameroun en 1958, plusieurs milliers de Camerounais brûlés au napalm par l’armée française dans les années 50 dans la ville de Douala, à l’Ouest et dans le pays Bassa, juste parce qu’ils demandaient l’indépendance du Cameroun à la France coloniale, 63 jeunes qui manifestaient pacifiquement devant l’hôtel Ivoire, début novembre 2004, une centaine de jeunes massés autour de la résidence présidentielle ivoirienne en avril 2011, 19 civils maliens qui participaient à un mariage le 30 mars 2021, etc.

Ces crimes et d’autres ont été commis parce que l’affront de Thiaroye en 1944 n’avait pas été lavé. Au lieu de demander réparation,  nous avons préféré pardonner et tourner la page. Mais, c’était oublier qu’un tel pardon équivalait à un permis de tuer encore.  Et les tueurs ont continué à tuer. Et, avec la complicité de Blaise Compaoré, ils ont tué celui-là même qui disait que nous ne tendrions plus l’autre joue, Thomas Sankara.

Non, nous ne devons plus tendre l’autre joue. Nous ne devons plus ni pardonner ni oublier. Ce qu’il faut, c’est répondre du tac au tac comme Maliens, Burkinabè et Nigériens l’ont fait ces trois dernières années. Le Tchad vient de mettre fin à son accord de défense avec la France. Espérons que le Sénégal, le Gabon et la Côte d’Ivoire lui emboîteront le pas sous peu.

L’heure de nous faire respecter a sonné. Laissons l’amour des ennemis de côté et comportons-nous dignement. Montrons que nous sommes un peuple qui a des couilles.

La loi du talion (« œil pour œil, dent pour dent »), parce qu’Israël la pratique, quiconque veut l’attaquer est obligé de réfléchir plusieurs fois avant de passer à l’action. L’un ou l’autre Africain a préconisé que nous puissions bousiller la mâchoire de celui qui nous a arraché une dent. Pourquoi pas ?

Le dossier sur les massacres français au Cameroun est nettement plus lourd que les massacres de Thiaroye au Sénégal. Le Cameroun attend la réaction de la France à ce sujet depuis François Hollande et, aujourd’hui, Emmanuel Macron. Avant de parler « réparations »…

Bref, nous ne pouvons pas continuer à pardonner à nos bourreaux, parce qu’il y a des crimes impardonnables. Nous ne pouvons pas continuer à dire, idiotement, que nous laissons pour nous à Dieu. Dieu aime tous ses enfants. Il n’y a donc aucune raison pour qu’il soit avec Yao contre Dupont. Dieu passe par les hommes pour venir en aide aux hommes brimés, exploités ou humiliés. C’est à nous de voir qui, parmi ces hommes, peut nous aider à avoir la force militaire sans laquelle les tueurs seront toujours tentés de nous massacrer.

Dieu nous a donné une intelligence. Utilisons cette intelligence pour trouver les moyens de nous faire respecter. Ces gens-là ne reculent que devant la force. Ils ne respectent que ceux qui sont capables de leur tenir tête. C’est le principal enseignement que nous devrions tirer du 80è anniversaire du massacre de Thiaroye.

Jean-Claude Djéréké

est professeur de littérature à l’Université de Temple (Etats-Unis)

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