La Mauritanie a aboli l’esclavage en 1991, alors pourquoi criminalise-t-elle les opposants à l’esclavage, se demandent Irwin Cotler et Judith Abitan, deux défenseurs canadiens des droits de l’homme ? La triste vérité est que le pays du général-président (dictateur), Mohamed Ould Abdel Aziz, n’a pas aboli l’esclavage, mais reste sa dernière place forte.
Bien que la Mauritanie affirme qu’elle a aboli l’esclavage, elle demeure en fait l’un des seuls bastions de l’esclavage au monde. Biram Dah Abeid (notre photo) est le leader du mouvement anti-esclavagiste international et président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste en Mauritanie (IRA-Mauritanie).
Biram, un ancien prisonnier politique mauritanien soumis à de nombreuses arrestations – répertorié par Time Magazine comme l’une des 100 personnalités les plus importantes au monde – est l’un des grands héros des droits de l’homme de notre époque et récipiendaire de nombreux prix internationaux pour ses courageux plaidoyers.
En tant que conseiller juridique international de Biram, nous l’avons accueilli, à Montréal, pour nous rejoindre en tant que conférencier invité à l’occasion de notre célébration du 375e anniversaire de Montréal, en tant que «ville des droits», en mai 2017. Il a, également, comparu en tant que témoin expert devant le sous-comité parlementaire canadien sur les droits de l’homme pour témoigner de la détérioration de la situation en Mauritanie.
C’est peut-être parce que beaucoup de membres de la communauté internationale ont adhéré au récit de la Mauritanie selon lequel il a aboli l’esclavage en 1991, date à laquelle sa constitution stipule que «personne ne sera réduit en esclavage ou en servitude humaine ou être soumis à la torture et à d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants… ». Il reconnaît même que de telles pratiques constituent des «crimes contre l’humanité ». La douloureuse vérité est que la Mauritanie a moins aboli l’esclavage. En effet, en tant qu’Etat partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale – encore une autre ruse de la part de la Mauritanie -, il est en violation permanente de ses obligations juridiques internationales. La Mauritanie, non seulement, criminalise les opposants à l’esclavage, mais, les empêche même d’exercer l’un quelconque de leurs droits fondamentaux, y compris, celui de participer aux élections. En bref, il est, à la fois, dépositaire de l’esclavage et de la tyrannie et mérite l’opprobre et la honte de la communauté internationale. La première étape pour dénoncer et démasquer la duplicité et la criminalité mauritaniennes doit être la libération immédiate de Biram et sa candidature aux élections.
Irwin Cotler et Judith Abitan
Irwin Cotler est président du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne et ancien ministre de la Justice et procureur général du Canada. Il a été l’un des conseillers juridiques internationaux de Biram Dah Abeid.
Judith Abitan est directrice exécutive du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de l’homme, qui a adopté l’affaire et la cause de Biram Dah Abeid dans le cadre de son projet international de défense des prisonniers politiques.