Bien qu’elle ait, jusqu’à présent, été la plus vocale au sujet de la situation au Niger, Paris est loin d’être la seule capitale occidentale à avoir beaucoup à y perdre. Rome est, tout autant, inquiète à cause de ses énormes enjeux énergétiques et migratoires dans la région du Sahel.
Le 27 juillet dernier, la présidente italienne du Conseil, Giorgia Meloni, était en visite officielle à Washington pour convaincre le président américain, Joe Biden, de la pertinence de son approche en matière de gestion des flux migratoires. Un problème qui touche les deux pays, l’Italie faisant face à d’interminables vagues de ressortissants en provenance d’Afrique, et les Etats-Unis ayant traditionnellement toujours été confrontés aux arrivées massives des Sud-Américains.
La présidente du Conseil italien, qui avait, certainement, prévu de présenter les contours de l’accord signé avec le président tunisien, Kaïs Saïed, (notre photo montre les quatre dirigeants qui ont signé cet accord) a dû revoir ses plans à la lumière des nouvelles peu reluisantes arrivant fraîchement de la capitale nigérienne. Ces dernières devenant d’ailleurs le sujet principal de l’entretien entre les deux dirigeants du G7.
Après les sanctions qui se sont abattues sur la Russie en rétribution à la guerre en Ukraine, l’Italie n’a eu d’autres choix que de se tourner vers le continent africain, signant, ainsi, plusieurs accords d’exploitation de ressources énergétiques avec des gouvernements locaux (Libye, Algérie) afin, dans un premier temps, de combler ses propres besoins en énergie, et, dans un second temps, de servir d’intermédiaire de premier ordre entre l’Afrique et ses voisins européens pour également adresser la demande énergétique de ces derniers.
Seulement, Giorgia Meloni, tout comme le reste du monde occidental, n’a pas vu venir le coup d’état au Niger. Sinon, elle n’aurait certainement pas mis le président de Tunisie, Kaïs Saïed, sous autant de pression, allant même jusqu’à solliciter le premier ministre néerlandais, Mark Rutte, et la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, en renfort afin de l’inciter à signer un accord de politique anti-migratoire.
Ayant fait de la traque aux migrants le cheval de bataille de son programme électoral, la cheffe du gouvernement d’extrême-droite est, aujourd’hui, dans l’inquiétude totale à cause des potentielles répercussions sur son pays de la prise du pouvoir par le général Abdramane Tchiani.
Récemment désavouée par une étude scientifique, publiée dans la revue, Nature, dans son argumentaire selon lequel les opérations de recherche et de secours des migrants seraient l’une des principales causes de l’accroissement exponentiel du nombre de départs en mer des ressortissants subsahariens à partir des côtes africaines, Giorgia Meloni est à deux doigts de voir tout son travail s’effondrer.
En effet, avec, d’un côté, la perspective de la menace djihadiste qui, plus que jamais, rend incertain le bon déroulement des opérations d’extraction des minerais des sols africains, et, de l’autre côté, le fait que le Niger ne participe plus activement à la lutte contre l’immigration illégale. Conclusion : il est difficile d’imaginer un pire scenario pour la cheffe du gouvernement italien.
Paul Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)