Les Etats-Unis sont face à un gros dilemme. Après s’être faits expulser du Niger par le CNSP, qui a dénoncé les accords de coopération militaire les liant, les Américains refusent de partir. De manière prévisible, ils regrettent, déjà, leurs tentatives d’intimidation à l’endroit des autorités actuelles de Niamey, qui ne les avaient pourtant pas dans leur collimateur, à l’inverse de la France.
Selon quelques indiscrétions des médias américains, Washington serait à pied d’œuvre pour que Niamey revienne sur sa décision. Ce qui s’annonce très difficile puisque les populations nigériennes ont, déjà, publiquement, pris fait et cause pour le départ des troupes américaines, et affiché leur soutien au pouvoir en place, lors des manifestations du 13 avril dernier.
Par ailleurs, le fait de demander à Abdourahamane Tiani de rétablir l’accord annulé le 17 mars 2024 lui coûterait en crédibilité, non seulement, auprès des Nigériens, qui ne veulent plus de base américaine chez eux, mais aussi, auprès des partenaires voisins de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), avec qui une coopération militaire a, justement, été mise en place pour pallier les décennies d’improductivité de présence militaire américaine au Sahel.
Le manque de considération des Américains envers les nouveaux dirigeants du Niger a outrepassé tous les seuils de tolérance. Surtout que, malgré leur étiquette de junte, ces derniers n’ont jamais rien fait qui soit de nature à provoquer une réaction inamicale de la part des Etats-Unis. Bien au contraire, ce sont ces derniers qui ont multiplié des actes susceptibles de causer une détérioration des relations bilatérales, comme s’il s’agissait de leur but caché.
Il y a, d’abord, eu la suspension, sans crier garde, de l’aide au développement instaurée par les Américains, alors qu’elle représentait l’essentiel du budget national des Nigériens. Ensuite, le semblant de coopération militaire qu’il restait entre les armées nigériennes et américaines a, lui aussi, été arrêté au mois d’octobre. Enfin, l’incident de trop pour le CNSP a été l’ingérence de Washington dans le choix des futurs partenaires de Niamey.
Voir les Etats-Unis fléchir le genou devant le Niger, comme c’est le cas aujourd’hui, devrait encourager les autres nations africaines à davantage faire valoir leur souveraineté face aux puissances étrangères aux velléités néo-colonialistes. Le monde tendant de plus en plus vers la multipolarité, il n’est plus question d’accepter, ni de subir les désidératas d’un petit groupuscule de pays, surtout, si ce n’est pas pour recevoir une contrepartie équivalente.
Paul-Patrick Tédga
MSc in Finance (Johns Hopkins University – Washington DC)