La démarche du G5 en Centrafrique montre la façon (très laxiste) dont les questions africaines sont traitées à l’international. Parce que cela coûte cher à la communauté internationale, parce que pour une raison ou pour une autre, on ne veut pas s’en occuper, parce qu’on considère que c’est un éternel recommencement en Centrafrique, et pour d’autres raisons qu’on n’évoque pas forcément ici, le G5 a expédié la question de l’insécurité même si elle est est importantissime pour la tenue des élections centrafricaines.
Le G5 centrafricain est composé de la Russie, de la France, des Etats-Unis, de l’Union européenne, de la CEEAC et de la Banque mondiale. Plutôt un G6 qu’un G5. Ce G5 a beaucoup investi en Centrafrique pour une bonne tenue des élections en date du 27 décembre. Mais, dans ce domaine comme dans presque tous les autres, le gouvernement de Touadéra a été d’une inefficacité, d’une incapacité légendaire à répondre aux attentes des bailleurs de fonds. Quand l’argent n’a pas été détourné, il a été très mal utilisé. Conséquence : il est impossible de tenir des élections où 85% du territoire est contrôlé par 14 groupes armés (contre 50% du territoire tenu par 4 groupes armés quand Touadéra arrivait au pouvoir début 2016). En fermant les yeux et les oreilles sur le cri de désespoir de l’opposition, le G5 estime-t-il qu’il s’agit d’une AFFAIRE DES NEGRES et qu’ils n’ont qu’à s’entre-tuer, n’ayant pas réussi à bien utiliser l’argent qui a été mis à leur disposition pour faire des élections transparentes ?
Ce qui en réalité veut dire que, non seulement, le gouvernement du président Touadéra a échoué à utiliser l’argent du G5 pour une bonne tenue des élections (et tout le monde le constate), mais, le G5, au lieu de le sanctionner pour cet échec, l’autorise, au contraire, à organiser une élection qui n’en sera pas une car impossible de faire campagne dans un pays occupé à 85% par les groupes armés, ce qui ne peut qu’être une prime à la mauvaise gestion de Touadéra qui, lui, soutient, fermement, la tenue de ces élections à date parce que, lui, fait campagne par avion.
C’est la raison pour laquelle la COD-2020 (Coalition de l’opposition démocratique), au cours de la réunion extraordinaire de la Conférence des présidents du samedi, 19 décembre 2020, a procédé à l’analyse de la situation politique et sécuritaire du pays à quelques jours des élections groupées du 27 décembre 2020. La COD-2020 est composé des leaders dont les plus importants sont l’ancien président, François Bozizé, dont la candidature a été invalidée par la Cour constitutionnelle suite aux démarches souterraines du président Touadéra, le chef de l’opposition, Georges-Anicet Dologuélé, l’ancien premier ministre de transition et actuel porte-parole de la COD-2020, Me Nicolas Tiangaye (notre photo), et onze autres, tous désireux d’en découdre avec le pouvoir de Touadéra. La COD-2020 a fait deux constats majeurs :
1 – Sur le plan sécuritaire, on peut relever :
- le braquage, le vol et la confiscation des matériels de campagne, véhicules, motos et les fonds de plusieurs candidats aux élections législatives et présidentielle dans presque toutes les villes des provinces ;
- l’assassinat des militants et l’agression à l’arme blanche de plusieurs candidats ;
- l’impossibilité absolue des candidats de se rendre en province pour battre campagne librement à cause des mouvements des bandes armées et de leur affrontement avec les forces de défense et de sécurité ;
- l’incapacité du gouvernement et de la MINUSCA à assurer la sécurité des candidats à l’élection présidentielle comme promis dans le plan intégré de sécurisation du processus électoral ;
- les déplacements massifs des populations des provinces pour se réfugier en brousse avec leur cortège de morts et de blessés.
2 – Sur le plan technique, on note également à six jours du scrutin :
- le retard avéré accusé par l’Autorité nationale des élections (ANE) dans le déploiement du matériel électoral et la formation des présidents et membres des bureaux de vote ;
- le retard dans la distribution des cartes d’électeurs ;
- les multiples erreurs matérielles sur les bulletins de vote entraînant la confusion dans l’identification des candidats ;
- l’omission délibérée de plusieurs bureaux de vote de nature à empêcher les électeurs de voter.
Eu égard à ce qui précède, la COD-2020 :
- constate l’impossibilité de poursuivre la campagne électorale dans les conditions d’insécurité actuelle ;
- décide de suspendre la poursuite de sa campagne électorale jusqu’au retour de la paix et de la sécurité ;
- exige l’organisation des élections sur toute l’étendue du territoire national et dans le strict respect des standards internationaux ;
- exige le report des élections groupées du 27 décembre 2020 jusqu’au rétablissement de la paix et de la sécurité ;
- exige à cet effet la convocation sans délai de la concertation des forces vives de la nation.
Signé le porte-parole de la COD-2020
Me Nicolas Tiangaye
Ancien premier ministre de transition
Président de la COD-2020 par intérim.
N.B. Réponse du berger à la bergère de Touadéra : Touadéra a fait appel ce weekend aux mercenaires et soldats russes et aux soldats rwandais, pour l’aider dans son passage en force électorale. On compte aussi des mercenaires rwandais déguisés en FACA. C’est ainsi que Paul Kagame soutient la démocratie centrafricaine ?