De Jean Paul Tédga
Même si « Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années », il est indéniable qu’à 50 ans, Macky, bien que formé à l’école d’Abdoulaye Wade, est encore très jeune, et très frêle au niveau des épaules pour supporter le lourd fardeau du Sénégal.
Je ne m’inscris pas seulement en faux face à la vision des Occidentaux qui imposent leurs modèles aux Africains, vision qui veut que parce que la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne, ont choisi, depuis quelque temps, de privilégier des dirigeants peu âgés, à la tête de leur Etat, l’Afrique, aussi, devrait en faire de même. Eux c’est eux. Nous c’est nous. A chacun sa stratégie pour aller vers le bien-être et le progrès de ses populations.
Si j’étais le conseiller de Macky Sall, j’aurais fait interdire le très intempestif soutien dont il bénéficie des médias occidentaux particulièrement français. Au lieu de l’aider, un tel soutien (qui laisse croire que Macky candidat de la France et des Occidentaux a déjà plié l’élection), risque de constituer un handicap majeur pour cet ancien disciple d’Abdoulaye Wade. Car, au moment de jeter son bulletin dans l’urne, l’électeur sénégalais qui passe pour être (avec le Sud-Africain), le plus avisé du continent, va réfléchir aux enjeux auxquels le Sénégal et l’Afrique font face, avant de se déterminer. Il pourra se dire que le Mali qui, hier, encore, vivait en paix, est, actuellement, déstabilisé avec plus de 200.000 réfugiés à la clé, après seulement deux mois de conflit dans le Nord, et tout cela, à cause des pays qui soutiennent Macky. Le retour à la guerre au Mali peut interpeller l’électeur sénégalais au moment du vote. Il pourra aussi se souvenir que Kadhafi qui aimait, particulièrement, le Sénégal (et qui a refusé jusqu’au dernier moment d’écouter Abdoulaye Wade qui s’était invité à Tripoli pour le supplier de quitter le pouvoir afin d’avoir au moins sa vie sauve) en a été chassé alors qu’il n’avait rien fait aux Français ni aux Américains, ni à personne, avant sa chute. Les exemples de l’ingérence multiforme des pays du Nord dans les affaires du continent noir sont tellement nombreux que Macky n’a pas à se glorifier de bénéficier du très encombrant soutien des pays qui maintiennent l’Afrique dans la pauvreté et le sous-développement. Abdoulaye Wade ne pourrait-il pas finalement devenir l’arroseur de ceux qui voulaient l’arroser ? Cela risque bien d’être le cas.
Enfin, Macky ne surmontera pas aussi facilement le vote anti-peul qui fut fatal à Celou Dalein Diallo en Guinée en 2010 alors qu’au premier tour, il avait dépassé 43,69% avant de bénéficier du soutien de Sidya Touré avec ses 13,62%. Ce total arithmétique n’a pas empêché Alpha Condé avec ses modestes 18,25% obtenus au premier tour à le battre au deuxième tour. Aujourd’hui, c’est bien Alpha Condé qui préside aux destinées de la Guinée et Celou malgré son élection « pliée » comme on entendait dire à Conakry, n’a que ses yeux pour pleurer. Au deuxième tour, il n’avait eu que 47,5% contre 52,5% pour Alpha Condé.
Que voudrais-je dire par là ? Que la science électorale n’est pas encore programmable sur les ordinateurs d’Afrique, comme c’est le cas peut-être en Occident. Sous les tropiques, en effet, le soleil réserve encore et toujours de bien bonnes surprises.