C’est une annonce qui a surpris beaucoup d’observateurs au Sénégal. Le président de la République, Macky Sall, a demandé à son ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ismaela Madior Fall, à l’occasion de la première réunion du Conseil des ministres du nouveau gouvernement de préparer une loi d’amnistie en faveur de Karim Wade et Khalifa Sall.
Le chef de l’Etat sénégalais a demandé au ministre de la justice de voir les voies et moyens pour permettre aux hommes politiques, qui ont été privés de leur droits de vote de le recouvrer.
« Abordant la consolidation du dialogue national et l’ouverture politique, le président de la République demande au Garde des Sceaux ministre de la Justice, d’examiner, dans les meilleurs délais, les possibilités et le schéma adéquat d’amnistie pour des personnes ayant perdu leurs droits de vote », a annoncé la présidence sénégalaise.
Une des lectures qu’on peut en faire, est que le président qui est appelé à quitter le pouvoir en 2024 au terme de son deuxième et dernier mandat, ne voudrait pas laisser une situation politique où ses principaux adversaires seraient privés de vote. Il entend leur restituer leurs droits civiques et politiques avant de quitter la présidence de la République pour qu’on ne le lui reproche pas après. Cette façon de lire cette décision présidentielle ne contente pas tout le monde. Ancienne première ministre qui a conduit la liste de la majorité présidentielle aux dernières législatives et qui a espéré accéder à la présidence de l’Assemblée nationale sans succès, Mimi Touré est, catégoriquement, contre l’idée d’élargir Karim Wade qui aurait été condamné pour avoir détourné les fonds publics. Cette position d’une partisane de premier plan de Macky Sall montre qu’il existe de sérieuses divergences dans le camp présidentiel et qu’à mesure où le président s’approchera de la fin de son deuxième mandat, il y aura de moins en moins de cohésion dans les cercles de la majorité. Une équation future assez difficile à résoudre pour le président.
Il faut rappeler que Karim Wade, fils de l’ancien président, Abdoulaye Wade, et Khalifa Sall, ancien maire de Dakar, ont été privés de leurs droits civiques et politiques après avoir été condamnés, pour le premier, dans le cadre de l’enrichissement illicite, et pour le deuxième, dans le cadre de détournement de deniers publics dans la Caisse d’avance de la Ville de Dakar.
Si Khalifa Sall vit à Dakar depuis qu’il a été gracié par Macky Sall en 2019, il en est autrement pour Karim Wade en exil au Qatar depuis sa libération en 2016.
L’amnistie, qui concerne des faits visés, devrait, ainsi, permettre à ces deux hommes politiques, de revenir dans le jeu politique à 16 mois de la présidentielle de 2024. Et pour Macky Sall qui n’est pas en très bons termes avec son ancien mentor, Me Abdoulaye Wade, ce serait un excellent moyen de se réconcilier avec lui, en donnant la possibilité à son fils, Karim Wade, de devenir candidat à la future élection présidentielle de 2024 à laquelle Ousmane Sonko est d’ores et déjà candidat.